«
Ils sont encore en cet heureux point, de ne désirer qu'autant que leurs
nécessités naturelles leur ordonnent ; tout ce qui est au-delà est
superflu pour eux, ils s'entr'appellent généralement, ceux de même âge,
frères ; enfants, ceux qui sont au-dessous ; et les vieillards sont
pères à tous les autres.
Ceux-ci laissent à leurs héritiers en commun cette possession de biens
indivis, sans autre titre que celui tout pur que nature donne à ses
créatures, les produisant au monde. Si leurs voisins passent les
montagnes pour les venir assaillir, et qu'ils emportent la victoire sur
eux, l'acquêt du victorieux, c'est la gloire, et l'avantage d'être
demeuré maître en valeur et en vertu ; car autrement ils n'ont que faire
des biens des vaincus, et s'en retournent à leur pays, où ils n'ont
faute d'aucune chose nécessaire, ni faute encore de cette grande partie,
de savoir heureusement jouir de leur condition et s'en contenter. »
Michel de Montaigne, Essais, Livre premier, chapitre XXXI
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Vos commentaires sont les bienvenus