« Quand il s'agit d'une bonne action dont l'auteur s'est inspiré de certains dogmes, il faut toujours distinguer si ces dogmes en ont été le motif réel, ou s'ils ne seraient pas, comme nous le disions plus haut, l'explication illusoire dont on se sert pour contenter sa raison au sujet d'un acte sorti d'une tout autre source; on a fait l'action parce qu'on est bon; on est incapable de l'expliquer correctement,
Parce qu’on est pas philosophe; et pourtant on a besoin de s’en donner une explication, seulement la distinction est difficile à faire; il faut pénétrer jusqu'au fond des intentions. C'est pourquoi nous ne pouvons presque jamais juger exactement, au point de vue moral, les actes d'autrui; et les nôtres même, rarement. Les actions et la manière de se conduire, soit d'un individu, soit d'un peuple, peuvent être grandement modifiées par leurs croyances, par l'exemple, par l'habitude. Mais au fond les actions, ces “opera operata”, sont de pures et vaines images, et une seule chose leur donne une signification morale: c'est l'intention qui les inspire.»
Arthur Schopenhauer, Le monde comme volonté et comme représentation, puf, p. 465
Sans vouloir alarmer la pudeur d’un éventuel lecteur, il faut dire qu’en abrégeant les tourments tout relatifs de Don Carotte, que ce dernier à l’aube d’une mortelle journée où il se prépare à tomber dans les abysses avec une détresse vertigineuse. Dans un dernier sursaut d'orgueil il se laisse aller vers une pensée négative:
– Je suis un homme juste, que ce jour soit maudit! Quitte à devoir plonger, autant le faire avec dignité, j’em…
Le vent, fort à propos, redouble d’énergie et couvre les propos dissonants de Don Carotte.
Il n'a pas le choix et doit se résoudre à l'évidence: chevaucher ce qui ne lui semble plus être des racines mais un monstre marin pourtant venu de la terre et dont il ne peut mesurer l'étendue si ce n'est qu'elle l'emporte au large et en des profondeurs qu'il ne peut connaître. Convoquant les faiseurs de sortilège, il les supplie réveillant les puissances du chaos qui l'emmène vers ce néant primordial qu'il s'était promis de combattre.
– Malédiction, voilà ce qui arrive quand oncques je n’ai été capable de répondre…
– Oncques n’est plus français… et vous êtes bien trop hardi! Vous l’excitez!
– La voix de Sang Chaud… je la reconnais!
Ce sera la dernière chose qu'entendra Don Carotte avant que l'indésirable progression du monstre ne l'emmène là où il ne veut pas aller.
– Je suis un homme juste, que ce jour soit maudit!
Personne n'entendra jamais ces mots qu'il prononce.
– Pour la dernière fois je suppose...
La terre tremble et la mer bouillonne. Au loin, le volcan crache le feu

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