«
Il n’y a pas de moi: il n’y a que des torrents sans lit, des
exclamations sans écho, des gestes sans but. Se perdre en soi-même
suppose qu’il y ait un soi: illusion. Nous nous croyons un, et nous ne
sommes que des multitudes.»
E. M. Cioran, La chute dans le temps
Pendant
que tout le chapiteau se disloque, les mâts s'affaissent, les lumières
clignotent comme des étoiles lointaines, les cordes se détachent et se
balancent en d'infinis mouvements de pendule. Colporteurs de rumeurs et
girouettes effrayées dansent en ce singulier théâtre… où l’absurde
serait ce auquel on croit. À
coups de mains vides, comme des coups de cuillères émoussées, lentement
Pinocchio l'Autre creuse dans l’obscurité de la Nuit... et ne cesse de
parler avec lui-même, confondant les voix qui le peuplent.
…
Il creuse... oui... non... vers une issue, mais pour atteindre ce point
d’incandescence où le silence prend feu. Le bois de son front cogne
contre les parois invisibles d’une mémoire étrangère, veuve d’elle-même,
et dont il hérite sans le vouloir. Car il ne sait pas qui l’habite...
et l’habite-t-il seulement? Il parle, plutôt il s’effiloche en mots
dédoublés, reflétés, reflués. Parole sans direction, parole retournée
contre la bouche, bégaiement d’un souffle pris dans le nœud d’un rêve
ancien.
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