samedi 17 mai 2025

 
« Il n’y a pas de moi: il n’y a que des torrents sans lit, des exclamations sans écho, des gestes sans but. Se perdre en soi-même suppose qu’il y ait un soi: illusion. Nous nous croyons un, et nous ne sommes que des multitudes.»
 
E. M. Cioran, La chute dans le temps
 
 


Pendant que tout le chapiteau se disloque, les mâts s'affaissent, les lumières clignotent comme des étoiles lointaines, les cordes se détachent et se balancent en d'infinis mouvements de pendule. Colporteurs de rumeurs et girouettes effrayées dansent en ce singulier théâtre… où l’absurde serait ce auquel on croit. À coups de mains vides, comme des coups de cuillères émoussées, lentement Pinocchio l'Autre creuse dans l’obscurité de la Nuit... et ne cesse de parler avec lui-même, confondant les voix qui le peuplent.
 … Il creuse... oui... non... vers une issue, mais pour atteindre ce point d’incandescence où le silence prend feu. Le bois de son front cogne contre les parois invisibles d’une mémoire étrangère, veuve d’elle-même, et dont il hérite sans le vouloir. Car il ne sait pas qui l’habite... et l’habite-t-il seulement? Il parle, plutôt il s’effiloche en mots dédoublés, reflétés, reflués. Parole sans direction, parole retournée contre la bouche, bégaiement d’un souffle pris dans le nœud d’un rêve ancien.
 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Vos commentaires sont les bienvenus