mercredi 30 juillet 2025

Première clé





– D’où venez-vous? Me demanda-t’il.
– Qui donc?
– Lui, qui voulez-vous que ce soit?
– Et lui qui est-ce?
Don Carotte peine à prononcer le nom,qu'il ne connaît d'ailleurs pas... mais aussi la nature de celui avec qui il vient de s'entretenir... 
– Celui que vous me destinez comme destrier…
– Le maître de l’énigme… vous voulez dire! Puis-je vous suggérer, avec le plus grand respect, de me dire ce que vous  lui avez dit?
– Ne sachant point comment commencer… et supposant qu’il voulait savoir où nous en étions… j’ai mis quelque huile dans la conversation… Je me mis à parler de l'Archipel et de cette île en particulier... C’est un cône de basalte, noir, encore incandescent, lui répondis-je, confondant l’endroit où j’étais avec celui d’où je venais, qui perce la mer comme une dent neuve mais déjà cariée. Mais le travail du temps va l’éroder. L’océan, en vagues puissantes, ne cesse de le marteler. Rien ne m’arrêtait plus. Les pluies acides, nées des gaz volcaniques constamment le lessivent. Des pans entiers s’effondrent dans la mer…
L'u comme l'autre, nous savions que sa question ne concernait point le lieu... mais... Autant vous dire que, sans rien dire, il n’en perdait pas une miette et jouait le jeu, alors je continuais.
Et à mesure que la plaque tectonique dérive, quelques centimètres par an, mais des kilomètres en millions d’années, la source de feu restait en place, forant plus loin, plus à l’ouest, de nouvelles îles dans son sillage.
Brusquement, il m’interrompit:
– Ainsi nait et renaît l’archipel: une procession d’îles comme des perles arrachées à l’ombre. Certaines n’existent plus que comme des hauts-fonds, d’autres se dressent encore, imposantes, jeunes ou vieilles, selon leur position dans cette ligne de feu. Les îles les plus anciennes, situées à l’est de la chaîne, sont désormais presque éteintes.
Leurs cratères sont comblés, leurs coulées fossilisées, et des couches de cendre, de sable, de vie s’y sont déposées. L’érosion y a sculpté des falaises tabulaires, des promontoires étranges, parfois des arches naturelles. Elles abritent aujourd’hui une flore rudimentaire, de mousses et d’arbustes nains, accrochés aux plis du vent. Et il arrive que des voyageurs découvrant ces derniers, croient, par manque de conscience de leur propre état, être face à un géant!
Bien sûr, vous imaginez bien que devant une telle affirmation, j’étais fort désemparé… mais bientôt je me repris et lui demandait de m’expliquer ce que j’avais de la peine à comprendre…
– Vous parlez de l’énigme?
– Non, vous allez trop vite! J’en étais à la situation… mais lui, comme toi, y était déjà… sans que j’aie compris comment il y était arrivé en me parlant de choses et d’autres!
– Bref, vous y étiez!
– Il y était… et moi j’étais un peu perdu! Je lui demandais alors pourquoi…
– Pourquoi… quoi?
– Pourquoi j’étais à ce point perdu face à la première énigme et face à cette deuxième qui, mine de rien me plaçait à nouveau dans une très inconfortable situation ! 
– Et alors il me répondit le plus simplement du monde…
– Alors?
– Soyez patient! Sang Chaud… j’y arrive. Il m’a très aimablement… au vu de ma condition présente… et probablement au vu de celle qui présiderait à notre futur ouvrage commun… peut-être de notre collaboration…
– Accouchez donc!
– Après m'avoir témoigné du plaisir que je lui faisais avec ma visite, et,au vu des circonstances, m'incitant à croire en la providence, il m’offrit de... m’offrir une clé… Offre que je ne déclinais point…
– Et cette clé? Quelle est-elle?
– Je… Nous devrions, en ce qui concerne notre énigme… enfin la sienne… qui est devenue la nôtre… nous devrions supposer que c’est le labyrinthe qui parle…
– En son nom?
– Non, au nom du labyrinthe…
– C’est ce que je voulais dire!
– Mais le labyrinthe n’a pas de nom…
– Reprenons: Je suis un infiltré chez un agent double schizophrène que je suis. Qui suis-je si je suis celui qui le dit et qui suis-je si je ne suis que celui qui l’entend?” C’est alors que je compris comment en quelques mots peut se former un labyrinthe.» Ainsi, selon vous, il s’agirait du labyrinthe qui parle… en son nom propre…



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