lundi 30 juin 2008

Généalogie


"Pleust à Dieu qu'un chascun sceust aussi certainement sa geneallogie, depuisl'arche de Noë jusques à cest eage! Je pense que plusieurs sont aujourd'huy empereurs, roys, ducz, princes et papes en la terre, lesquels sont descenduz de quelques porteurs de rogatons et de coustretz, comme, au rebours, plusieurs sont gueux de l'hostiaire, souffreteux et miserables, lesquelz sont descenduz de sang et ligne de grandz roys et empereurs, attendu l'admirable transport des regnes et empires"*...

- Mon Maître, auriez-vous la sympathie de bien vouloir me parler plus simplement ?
- Pourquoi cela Lancinante ?
- Pour la bonne raison que je ne comprends rien à la descendance des règnes et autres fanfreluches de l'esprit.

*Gargantua,
Rabelais


dimanche 29 juin 2008

Porteur


- Ayant donc longuement réfléchi, mon Maître, je me suis subitement aperçu que, des choses visibles par leur nature, ce qui est là sous mon nez et entre les deux orieilles, ne pourrait jamais sortir un "Tout dépourvu d’intelligence qui fût plus beau qu’un Tout intelligent"!
Et, en outre, que la pensée ne peut naître en nulle chose, si on la sépare de l’Âne qui la porte...

samedi 28 juin 2008

Avant de commencer



- "Soit donc le Ciel tout entier ou le Monde!"*


Posons d’abord, en ce qui nous touche, une question que, dirions-nous, il faudrait poser avant de commencer toute chose.
- Avons-nous existé toujours, n’y a-t-il pas eu un commencement bien avant notre naissance, comme le dit Socrate. A-t-il commencé à partir d’un certain terme initial dont nous serions, en quelque sorte une des fins possible ?

- Mon Maître que je porte au mieux, je ne suis, de par ma condition, point assez élevé de corps et surtout d'esprit pour vous répondre !




* Platon, Timée

vendredi 27 juin 2008

Serviteur



- Montez, chevalier ! Et que votre âme ne reste céans !


- C’est en pensant à vos paroles d’hier, quand, de grand cœur, vous m’avez prié de vous laisser élargir mon point de vue sur les étendues infinies, que j'ai décidé de ne point mourir sur le champ. Je pensais que personne ne serait plus capable que vous-même, si vous le voulez encore, de poursuivre un si noble mais poussiéreux chemin. Après avoir si longtemps hésité, vous avez engagé votre si profonde personne dans une périlleuse quête et combattu le doute qui sans cesse nous étreint.Vous avez su trouver les mots et les gestes qui réveillent. Il n’y a que vous qui avez partie liée à ces temps anciens, ruines majestueuses mais rugueuses, parmi les hommes de ce temps qui puissiez m'insuffler cet air large, profond et pourtant vif qui me convienne. Maintenant que j’ai traité la question dont vous m’aviez chargé, je vous prie à mon tour de me traiter, non comme destrier, mais comme serviteur et compagnon. Je ne suis plus guère qu'un misérable et inconfortable sac de peau, mais ce qu'il contient ne recèle pas que des os et des maux. C'est ainsi que, sur mon dos, vous pourrez à votre tour étendre votre regard aux plus lointaines lunes.




Celui qui sait voyager ne laisse pas de traces.
Celui qui sait parler ne fait pas de fautes.
Celui qui sait compter n'a pas besoin de boulier.
Celui qui sait garder n'a nul besoin de serrures
Pour fermer, ni de clés pour ouvrir.
Celui qui sait lier n'utilise pas de cordes
Pour nouer.

Ne pas révérer l'enseignement subtil
Ne pas respecter la matière brute
Amène grande erreur
Quel que soit le savoir.

La parole conduit au silence
Autant en pénétrer le sens.

L'essentiel est énigme.

Lao Tseu

jeudi 26 juin 2008

Partage de bon coeur


- Cher Lancinante, sans vouloir vous faire offense, de nombreux témoignages de mes sens me forcent à croire que vous n'êtes, de par votre naturel et votre éducation, à la hauteur des questions et de la quête qui nous préoccupent. Il me faudra, pour remédier à cela, que je me hisse au-dessus de vous pour atteindre une certaine hauteur de point de vue. Celle-ci ayant été atteinte, il ne fera aucun doute que nos horizons s'élargissent. Le mien par la hauteur que vous me prêterez et le votre par ce que je partagerai avec vous. Ce à quoi je consens de bon cœur.

mercredi 25 juin 2008

À l'ombre du bâton


- Levez-vous, mon brave, l'histoire nous attend !

Au moment précis où l'ombre du bâton disparait:

- Je veux qu'en plein midi se dévoile enfin ce qui ne peut se voir qu'à minuit !

"Et durera ce temps de passepasse
Iusques à tant que Mars ayt les empas.
Puis en viendra un que tous aultres passe
Dilitieux, plaisant, beau sans compas,
Levez vos cueurs: tendez à ce repas
Tous mes féaulx. Car tel est trespassé
Qui pour tout bien ne retourneroit pas,
Tant sera lors clamé le temps passé"*

mardi 24 juin 2008

"Et les abysmes eriger au dessus des nues "*


"Tout bon vouloir aura son compromis.
Et le soulas qui iadis fut promis
Es gens du ciel, viendra en son befroy.
Lors les haratz qui estoient esthommys
Triumpheront en royal palefroy."*


-Que le jour se lève s'il veut être à l'image de l'homme que je peux être !

Walid Neill



*"Et les abysmes eriger au dessus des nues "

Rabelais

lundi 23 juin 2008


«Toutes choses sont mêmes et non mêmes"

Corpus hippocratique, Du régime, I, 5.

dimanche 22 juin 2008

Constance


«Finalement, il n'y a aucune constante existence, ny de notre estre, ny de celuy des objets. Et nous, et notre jugement, et toutes choses mortelles, vont coulant et roulant sans cesse. Ainsin il ne se peut establir rien de certain de l'un à l'autre, et le jugeant et le jugé estans en continuelle mutation et branle.»

Montaigne, Essais.

vendredi 20 juin 2008

jeudi 19 juin 2008

Illusion


Quand l'illusion disparaît...


... la place se libère pour une illusion plus grande encore: celle qui croit en elle-même.

mercredi 18 juin 2008

"L’inconnu, c’est la part du lion"*



"L’inconnu, c’est la part du lion"

François Arago



"Depuis quelques instants nous admirions, à travers la poussière, la mosaïque tumultueuse des masques hurlant sous les lustres et s’agitant..."

Le Convive des dernières fêtes

Villiers de L’Isle-Adam

mardi 17 juin 2008

"Ancrage"



"L'Imaginaire et le Réel ont chacun un pied dans le monde du Symbolique et le cul entre deux chaises"...


Enfin aux fonds des forêts, Walid Neill




"Finalement, quand le jour fut venu pour mon maître de montrer sa munificence, on décida de m'amener au théâtre. J'y entrai donc. Il y avait un grand lit fait d'écailles de tortues indiennes et incrusté d'or. On m'y étend, la femme à mes côtés. On nous plaça alors sur une machine qui nous amena dans le théâtre et nous déposa au milieu. Le public poussa un grand cri et éclata en applaudissements."

lundi 16 juin 2008

"Rondes"



"Au-delà d'un jardin, dans un arbre nu, une pensée s’est perdue. Assouvie d’un sourire, sur son écorce meurtrie des yeux s’ouvrent et cherchent en vain leurs pareils."


Enfin aux fonds des forêts, Walid Neill




Une part infime de l'infinité des circonstances qui sont la cause de la volonté humaine et qui ont elles-mêmes leurs propres origines tracent un cercle dans lequel la volonté tente d'établir son territoire. Mais ce cercle, en mouvement constant, vit au rythme des petits et grands tourbillons qui s'élèvent jours après jours, entraînant à leurs tours, les secondes, les heures, les semaines, les mois, les saisons et les années en une ronde effrénées qui en effacent constamment le centre.

dimanche 15 juin 2008

"L'infinité de l'étendue"




"L'infinité de l'étendue a pour perfection celle de ce qui est étendu."


Le théorème d'Almodóvar, Antoni Casas Ros



« C’est un beau jour! »

... tout jour nouveau n'est que lendemain. Il est la conséquence de mille et une nuits, de mille et un rêve et autres cauchemars que nous ne pouvons connaître.

samedi 14 juin 2008

Sans fin



"Chez ce qui est sans ciel, ce qui est essentiel
Nos même mains amies se tiennent comme un appel
Pour savoir sans vous, non sans mal je l'avoue,
Pour ce qui est de vous, pour ce qui est de nous,
Savoir sans fin semer, savoir enfin s'aimer.
..."


Walid Neill


vendredi 13 juin 2008

"Illusion"


"Candide, tout stupéfait, ne démêlait pas encore trop bien comment il était un héros. Il s'avisa un beau jour de printemps de s'aller promener, marchant tout droit devant lui, croyant que c'était un privilège de l'espèce humaine, comme de l'espèce animale, de se servir de ses jambes à son plaisir."


Candide,
Voltaire




"Ce qui de vous à moi, du fond du visage apparait peut du plus ou du moins n'être qu'illusion. Peut être folle, aussi, la moindre des raisons."

Discours sur les masques,
Walid Neill



jeudi 12 juin 2008

Recherches



"Dans l'ombre des bosquets et des sillons se dissimulent d'inaccessibles jardins."

Walid Neill



Derrière les masques se cachent les gestes secrets. Ils tentent d'écrire l'histoire. On ne voit d'eux que ce qu'ils savent faire paraître et qui n'est plus ce qu'ils sont mais ce qu'ils recherchent.

mercredi 11 juin 2008

Geste


L'immobilité est un geste difficile. Celui qui se tait dit quelque chose qui ne peut être entendu.

mardi 10 juin 2008

"Coïncidences"


"D'une part, le corps vivant est un composé de matière et à n'importe quel moment sa réalité coïncide totalement avec sa matière à l'instant considéré. C'est-à-dire avec une multitude déterminées de composants individuels. Ce que vous êtes en l'état, maintenant, c'est l'ensemble de votre matière."

Hans Jonas



Chaque jour un petit bout de fil se noue, qui se déroule pendant la nuit, et rejoint au matin ce qui se représente sans fin jusqu'à ce que l'ouvrage enfin, se présente dans sa totalité qui signifie aussi sa disparition.

lundi 9 juin 2008

"Occurrences"


"Le fabricant de masques produit en fonction de l'action sur la scène. Il regarde à travers le masque même quand le masque n'est pas encore fait, Et pendant son geste il porte lui-même le masque du fabricant de masques."

** Les Gestes,
Vilém Flusser



"Puisque, dit Descartes**, je remets en cause toutes mes opinions, et que je ne sais pas encore où se trouve la vérité, ni ne l'ai pas encore établie, je ne peux faire autrement que de suivre les opinions d'autrui."

** Discours de la méthode,
Descartes



"Le second moyen de reconnaître qu'une machine ressemblant, par son aspect et ses mouvements visibles, au corps humain, n'est pas un vrai homme, mais une machine, est qu'elle est incapable de répondre, par ses actions, à toutes les occurrences de la vie, qui sont, étant des occurrences, en nombre illimité et imprévisible."**

** Discours de la méthode,
Descartes


dimanche 8 juin 2008

"Insaisissable réel"


Avec la photographie, l'homme ne cesse de se persuader qu'il a inventé le moyen de capturer "tel qu'il est" ce en quoi il se plait à croire : le réel. Puis de le montrer sans que pour cela il n'ait aucune crainte de se tromper.


Et pourtant, il le sait, dans la moindre zone d'ombre ou dans la plus claire des lumières se dissimulent, se mélangent, apparaissent et s'annulent tour à tour des quantités infinies d'univers, tous plus ou moins inaccessibles, auprès desquels, dans lesquels, sans lesquels, sur ou sous lesquels il marche sans fin, un jour espérant et le lendemain désespéré de ne rien pouvoir saisir que le fait d'être saisi.

samedi 7 juin 2008

Secrets pernicieux


"Socrate est un homme dangereux, qui, par une curiosité criminelle, veut pénétrer ce qui se passe dans le ciel et sous la terre, fait une bonne cause d’une mauvaise, et enseigne aux autres ces secrets pernicieux."*


* Apologie de Socrate,(acte d'accusation)
Platon
(Traduction de Victor Cousin, 1822)


vendredi 6 juin 2008

Decipimur specie recti *


"C’est un grand et beau spectacle de voir l’homme sortir en quelque manière du néant par ses propres efforts ; dissiper, par les lumières de sa raison les ténèbres dans lesquelles la nature l’avait enveloppé ; s’élever au-dessus de lui-même ; s’élancer par l’esprit jusque dans les régions célestes ; parcourir à pas de géant, ainsi que le soleil, la vaste étendue de l’univers ; et, ce qui est encore plus grand et plus difficile, rentrer en soi pour y étudier l’homme et connaître sa nature..." **

** Discours sur les sciences et les arts,
Jean-Jacques Rousseau





* Nous sommes trompés par l'apparence du bien.