samedi 28 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(56)


Il est trop tard Anarchasis a plongé. Il tombe, mais il se sent libre et croit voler comme l'oiseau.
- C'est irrémédiable et je ne suis point fou. En ce moment dans l'espace est suspendue la loi du temps. Rien ne pourra plus être comme avant et tant pis si je meurs devant ce qui reste de ce monde acronyque. Du plus archaïque et au-delà, des plus anciens rochers où se sont figés mes ancêtres envolés jusqu'aux plus profonds et muets mystères épars dans les déserts, dans les landes et les forêts, d'invisibles vestiges plus ou moins engloutis, immobiles dans le fleuve de l'histoire attendent patiemment qu'un accident les fassent reparaître sur le visage du monde.
Devant lui, en sens exactement inverse, surgi des profondeurs, un même visage béat s'avance. Dans le même temps, ils ouvrent les bras et perdent leurs sourires qui font place au même effarement.
La face du monde sait que l'accident est là. Cela ne saurait tarder.

vendredi 27 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(55)

Anarchasis, pris de vertige, s'est élancé dans le vide.
- Mais ce que je fais n'est pas ce que l'on peut croire. La "Vertueuse" est une "danse grave et majestueuse, destinée à honorer les esprits des montagnes et des rivières". Elle engage tout autant l'esprit que le corps. Il se passe quelque chose de particulier dans la chute vertigineuse. L'esprit, pour un instant, cède les rênes au corps et ainsi se libère.

jeudi 26 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(54)


— Je connais bien que ce que je viens d'entendre n'est pas miennes paroles. Il faut que j'en aie le cœur net.

mercredi 25 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(53)


Anarchasis aime les rives escarpées de sa rivière. Il en aime les dangers tout autant que sa douceur relative. Et puis, il ne s'en vante ni n'en parle guère, mais il y entend des voix...

mardi 24 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(52)


En moins de temps qu'il ne faut pour le dire, les deux gouttes d'eau ont retrouvé le confort douillet de l'immensité et de son silence. Rien ne reste de leur passage, hormis la beauté déchirante, la savante ordonnance et l'éloquence sauvage des origines qu'Anarchasis croyait perdues et qui s'étirait langoureusement à ses pieds. Il lui suffisait de suivre le moindre des reflets pour que la source lui apparaisse scintillante de mille feux.

lundi 23 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(51)


- Je ne sais que penser de ce que vous m'exposez sans...
- C'est précisément cette absence de pensée que je crains.
La brusquerie de cette réponse a des conséquences dramatiques. Sous l'actiondu léger tremblement qui en résulte, la fine enveloppe qui sépare les deux gouttes d'eau se déchire. Toutes deux disparaissent dans l'infini de leurs semblables.

dimanche 22 février 2009

samedi 21 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(49)


«"S'il est un fait étrange et inexplicable, c'est bien qu'une créature douée d'intelligence et de sensibilité reste toujours assise sur la même opinion, toujours cohérente avec elle-même. Tout se transforme continuellement, dans notre corps aussi et par conséquent dans notre cerveau.»

Fernando Pessoa, , Chronique de la vie qui passe


— Peu importe, je vous le dirais quand même. Il n'est pas seul.
— Qui?
- L'homme qui est dans le ciel.
— Celui en qui vous avez voyagé?
— Oui.
— Il n'est pas unique?
— Ce n'est pas ce que je vous ai dit.
— Vous m'avez dit qu'il n'était pas seul! C'est ce que j'ai entendu.
— Oui.
— Ah! Donc il n'est pas unique.
— Ce n'est pas si simple.
— Expliquez-moi.
— Ils sont plusieurs milliards et pourtant chacun est unique.
— Je crois que vous faites une sorte d'amalgame dans lequel nous serions comprises.
— Non, mais d'une certaine manière vous pourriez ne pas avoir tort.
— Ce n'est pas un secret dont vous me faites part, c'est un mystère.
— Vous avez raison.
— J'ai peut-être raison, mais je n'y comprends rien.
— C'est normal.
— C'est peut-être normal, mais cela ne me rend pas heureux pour autant.
— Je vous trouve bien terre-à-terre pour quelqu'un qui vient d'entendre quelque chose de si extraordinaire.
— De toutes façons, je peine à vous croire.

vendredi 20 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(48)


— Je crois que je vais vous confier un secret.
— Faites donc, je vous en prie!
— Il faudrait pour cela que vous me promettiez de le garder pour vous.
— Tout dépend de ce que vous me direz.
— Un secret est un secret et une promesse est une promesse.
— Alors, je ne suis pas sûr...

jeudi 19 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(47)


— Vous savez, quand je vous regarde, j'ai ai l'impression de me voir dans le passé.
— C'est étrange, il m'arrive d'avoir presque le même sentiment, mais moi, j'ai la très nette impression que, dans votre présence, c'est l'avenir que je vois.

mercredi 18 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(46)


— Vous vous trompez, le voyage dont vous parlez n'en est pas vraiment un. C'est tout juste si l'on peut le qualifier ainsi. De plus, vous seriez surprise de constater à quel point cela se fait tout seul.
— Vous vous sous-estimez...
— Il m'arrive de penser que vous n'êtes pas là, que vous ne seriez qu'une extension de moi-même à laquelle je parlerais. Une sorte de mémoire, de miroir en qui je ferais semblant de me reconnaître. Heureusement que vous n'êtes pas toujours d'accord avec moi, cela m'aide un peu, mais pour peu de temps. Êtes-vous bien là? Je me le demande.
— C'est curieux...

mardi 17 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(45)


Brusquement, le dialogue s'interrompt. Un silence pesant s'installe. Les contours disparaissent peu à peu. Les deux gouttes d'eau se rapprochent dangereusement. Un brusque sursaut leur fait prendre un peu de distance.
— Vous m'entendez?
— Que croyez-vous?
— Vous êtes là?
— Mais enfin, comment pouvez-vous en douter!
— Je ne sais pas.
— Que vous arrive-t-il? Vous me semblez bizarre. On dirait que, subitement vous êtes devenue autre. Je ne vous reconnais presque plus.
— Vous avez raison. Je sens que je redeviens ce que, finalement, en y réfléchissant bien, je n'ai jamais cessé d'être.
— Non, je vous en prie, laissez grandir en moi cet espoir qui, je le sens moi aussi, est en train de naître en moi-même.
— Je ne voudrais pas vous empêcher de rêver, mais nous ne sommes que deux misérables gouttes d'eau perdues dans un temps si limitée que nous aurions peine à le discerner si nous étions celui dont nous parlions.
— Ah, vous allez mieux, continuez je vous prie.
— Nous parlons d'un monde qui n'est pas plus le notre que le leur.
— Comment écrivez-vous "leur"?
— C'est un piège que de vouloir tout savoir.
— Le "leurre" est donc un piège. Votre savoir m'émeut. On voit que vous avez voyagé.

lundi 16 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(44)


«J’eus peur de lui, soudain. Je me mis secrètement en garde.
Les sens aiguisés, je notais que mon homme avançait prudemment,
à la manière des cerfs, et c’est à peine si j’entendis, sous ses pas, craquer quelque branche.
Qui était la proie, de lui ou de moi?»

Anne Larue, Une vie de Démocrite


— Je dois vous dire que de tout ce temps que je passais en lui, je n'en ai guère de souvenir. C'est assez normal, je ne m'appartenais plus. Je faisais partie d'une entité bien plus grande que je ne pouvais prétendre maîtriser du fait que ma part était tout-à-fait dérisoire. Au mieux, je participais...
— Vous ne m'avez pas répondu.
— A quel propos?
— Vous me disiez que, paradoxalement, c'était en même temps d'une grande banalité.
— Oui, c'est cela. Je croyais, à ce moment là...

dimanche 15 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(43)


«Quand j’aperçus Démocrite entre les fourrés, je n’osais d’abord l’approcher.
Était-ce d’avoir vécu à la manière des ours qui l’avait rendu si repoussant?
Démocrite était devenu un véritable homme des bois, trapu, râblé, couvert de poils; ses yeux noirs luisaient, fanatiques, dans sa face noire et burinée. Il portait barbe et cheveux longs ; il semblait ne s’être ni lavé, ni rasé depuis des mois. Je notais l’habileté inquiétante de ses longs doigts, que la vie en forêt semblait avoir étrangement déliés ; et aussi la force de ses bras, la maigreur musclée de ses cuisses; mon ami philosophe avait le corps incroyablement agile d’un acrobate. On aurait dit quelque Arlequin à figure de diable, au masque noir.»

Anne Larue, Une vie de Démocrite


— Tout le temps que j'ai passé en lui restera pour moi un fantastique réservoir duquel jaillissent sans cesse des pensées totalement nouvelles pour moi. Il m'est presque impossible de vous décrire ce qui s'est passé. Je ne crois pas qu'il soit possible de vous faire ressentir cela par de simples mots ou même par les concepts les plus sophistiqués.
— Croyez-vous que cette expérience soit unique?
— Bien entendu, elle est unique. Mais ce qui est paradoxal est qu'en même temps elle est d'une grande banalité.
— Expliquez-moi, je vous prie.

samedi 14 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(42)


«L'utilité ne serait en quelque sorte que la sertissure qui permet de mieux manier le joyau dans la circulation courante ou qui peut attirer sur lui l'attention de ceux qui ne s'y connaissent pas suffisamment, mais qui ne saurait avoir pour effet de le recommander aux connaisseurs ni d'en déterminer le prix.»

Emmanuel Kant, , Fondements de la métaphysique des moeurs.


— J'allais accéder au cœur même du langage, à sa source. Je marchais dans les profondeurs d'où émane le souffle.
— C'est pure folie!
— Ne m'interrompez-pas...

vendredi 13 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(41)


— C'est alors que tout a commencé véritablement. J'avais quitté, pour toujours croyais-je, ce qui devait être l'unique monde auquel j'appartenais et voilà que ce que je vivais était, au sens propre, incroyable.

jeudi 12 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(40)


— Tout en me parlant sans que je ne puisse rien comprendre de ce qu'il disait, il approchait sa main de son visage éclairé par les reflets miroitants du soleil.
À peine avais-je pu le distinguer dans l'azur que je fus avalé. J'étais en lui! Je faisais partie de lui-même.

mercredi 11 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(39)


— En un instant le ciel s'est déchiré et sa main a plongé sur moi sans que rien ne puisse s'y opposer. Ce fut un moment de désordre intense. J'étais au creux de sa main. L'incroyable s'était produit qui pourtant ne sera que peu de chose face à ce qui suivra.

mardi 10 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(38)


— Je ne vous raconterai pas tout. Sachez seulement que le vis se pencher vers moi. Naturellement, je doutais. Je me disais que c'était un hasard, mais l'ombre de sa main était déjà sur moi et comme vous le savez maintenant, dans l'ombre chacun se met à penser différemment. J'étais inquiet, je vous l'avoue, conscient que quelque chose m'arrivait et inconscient de ce qu'elle pouvait être. Au cœur de ma félicité, une angoisse profonde que ne connaissais pas avait pris naissance.

lundi 9 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(37)


— Vous êtes la première qui avez su me répondre.
— Ah...
— Comment il se fait qu'aucune autre ne l'ait fait jusqu'alors m'a surpris et me surprend encore. J'étais seule. Le fait d'accéder à ce nouveau monde me rendait solitaire. Il faut admettre que cette situation commençait à me peser. je m'émerveillais de ce que j'entendais et bientôt de ce que j'arrivais moi-même à exprimer. Même si ce que nous vivons ne peut entièrement se décrire avec des mots, je crois qu'il s'agrandit par ce moyen et se met à correspondre avec ce qui lui est parallèle et dont nous n'avons aucune conscience tant que nous n'avons pas les outils pour y accéder. Je crois que vous n'allez pas croire ce qui s'est passé. Quand je l'ai entendu parler et chanter, j'étais sous le charme, mais j'étais bien loin d'imaginer ce qui allait se passer.

dimanche 8 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(36)


— C'est un peu confus...
— En fait c'est bien plus compliqué que vous ne le pensez et si je vous racontais l'entier de cette histoire, il est fort probable que vous ne me croiriez pas.
— Essayez toujours.
— Promettez-moi d'être patient et de ne pas m'interrompre!
— Je vais faire tout mon possible.
— Nous ne sommes que deux gouttes d'eau que le courant emporte. Nous n'avons de l'avenir et du passé qu'une vague idée qui correspond à notre situation. La même situation que des milliards d'autres gouttes d'eau. Je devrai dire presque la même situation. Car il y a une petite différence entre elles et nous.
— Nous?
— Vous m'aviez promis de ne pas m'interrompre.
— Excusez-moi.
— Cette différence se manifeste justement dans le fait que nous parlions.

samedi 7 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(35)


— Ce serait lui qui vous a appris à parler.
— Je n'en suis pas sûr, il se peut que ce soit à son insu.
— Expliquez-moi, je vous prie.
— Je ne crois pas qu'il se doute que je l'ai entendu.
— Je ne suis pas sûre de bien comprendre.
— Lorsque je l'ai entendu la première fois, j'étais comme vous: je n'y comprenais rien.
— Je commence à comprendre. Ce serait...
— Vous me rassurez.
— Ce n'est que plus tard, quand...
— Quand ?..

vendredi 6 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(34)


— Qui vous a appris à parler?
— En fait, personne ne m'a appris.
— Voulez-vous dire que vous avez appris tout seul? un peu comme moi.
— C'est cela.
— Mais alors il a fallu que vous ayez un exemple à suivre...
— Bien entendu.
— Je commence à comprendre. Ce serait...
— Parfaitement.

jeudi 5 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(33)


« La moindre des expériences nous confirme que la plus infime des parties
n’existe que par sa relation au tout... »


— Je vous le répète, je ne vois rien.
— Je vous avoue que, moi non plus, je ne vois pas ce que vous voulez me dire.
— Vous commencez à comprendre.
— Je suis confus et vous me faites rougir...
— Je suis capable de suivre votre conversation et pourtant je ne suis pas équipée pour cela. En très peu de temps, depuis que je vous connais, je suis entré dans votre univers de mot qui le compose. Si quelqu'un me demandait comment cela se peut, je ne saurais lui répondre. Cela est, c'est tout.
— Ce que vous me dites là est très...
— Je vous le répète, je ne vois rien.
— Ne m'interrompez plus, je vous prie, sinon nous ne pourrions avancer. Cet univers qui est le votre et dans lequel je suis entré, moi : misérable goutte d'eau qui n'ai jamais fait débordé quoi que ce soit, sans que cela ne me coûte le moindre des efforts est ainsi devenu le mien sans pour cela que je ne le comprenne. Il m'est étrange de constater que j'y évolue tout comme vous sans que pour autant je ne puisse m'y reconnaître. Vous me parlez comme si j'avais un visage, une tête, un corps et je ne sais quoi encore, mais c'est faux. Je ne suis rien de tout cela.
— Et pourtant vous me parlez.
— C'est ce qui m'inquiète.

mercredi 4 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(32)


— À propos,j'ai depuis longtemps une question qui me pèse si lourdement que j'ai peine à vous suivre et m'empêche de saisir pleinement cet univers dont vous voudriez me faire part. Je vous entends fort bien sans réfléchir, mais aussitôt que je laisse résonner ce que vous venez de me dire, je n'y comprend plus rien. C'est comme si les mots perdaient leurs origines et s'habillaient de façons si diverses qu'ils ne puissent plus être reconnus, au point que tout cela n'a plus aucun sens pour moi. Il s'en suit, fort naturellement, que j'éprouve un sentiment de solitude, mêlé d'une angoisse, que je n'avais encore jamais éprouvé auparavant et qui m'attriste.
— C'est la moindre des choses.
— Vous n'êtes guère encourageant.
— Je connais si bien ce que vous ressentez que je pourrais, sans aucun effort, en poursuivre l'exposé à votre place.
— Cela m'étonnerait!
— Il n'y a pas de doute à cela.
— Voilà qui est nouveau.
— Pour vous seulement.
— Sommes-nous condamnés à découvrir ce que d'autres avant nous ont découverts et ce que d'autres, après nous, découvriront?
— C'est un peu cela et plus encore.
— Dans le fond, vous ne m'avez pas écouté...

mardi 3 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(31)


— Je perçois, comme vous, plus que je n'en parle et il se pourrait que je ne sois pas plus figée et bornée que vous. Regardez autour de vous et dites-moi comment tout cela se fait.
— Ce n'est pas chose facile et je ne le pourrais que si vous me donnez un peu de temps.
— C'est une grande illusion que de croire retenir et posséder un peu du temps qui passe.
— Il ne peut rien y avoir de surprenant si le temps ne passe.
— C'est encore une autre chose qui soit certaine.
— Et pourtant, même si le temps passe, il n'est pas certain que quelque chose de surprenant nous arrive.
— Sauf à considérer qu'en inversant le processus normal de nos pensées, ce ne serait plus le temps qui passerait mais nous qui passerions sous son regard amusé.
— C'est surprenant.
— Vous voyez.
— Que dois-je voir?
— Vous êtes surpris.
— Vous me parliez de regard amusé, pourquoi serait-il amusé?
— À sa place,je crois que je le serais.
— Vous moqueriez-vous de nous?
— Je vous l'ai déjà dit, je ne plaisante jamais, mais une légère ironie ne peut faire de mal qu'aux vaniteux.

lundi 2 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(30)


— Revenons à lui.
— Oui, c'est bien la seule chose qui soit possible.
— Ce n'est pas ce que je voulais dire. Dès la première fois où nous le voyons il devient impossible de ne plus penser à lui.
— Vous oubliez une chose: je ne l'ai pas vu. J'ai vu ce que vous m'avez montré et je n'en tire pas les mêmes conclusions que vous.
— Je vous comprends.
— Je n'en suis pas si sûr.
— Puisque je vous le dis.
— Ce n'est pas suffisant.
— Qu'est-ce qui serait suffisant?
— Que vous me le montriez vraiment.
— Qui donc?
— Il ne s'agit pas de lui mais du fait que vous me compreniez.
— Je ne sais pas comment vous faire comprendre que je vous comprends.
— Vous voyez!
— Que dois-je voir?
— Qu'il vous est impossible de faire en sorte que, de mes yeux, je voie ce que vous voyez avec les vôtres.
— Mais c'est impossible!
— Je ne vous le fais pas dire.
— Pourquoi êtes-vous donc si borné, imperméable et en même temps si soumis? Tout se meut autour de vous et vous n'en percevez rien.

dimanche 1 février 2009

" Le monde des brumes et du brouhaha"(29)


— Pourquoi cette image spécialement?
— À vrai dire je ne le sais pas.
— Et maintenant, qu'allons-nous faire?
— Nous allons faire ce que nous avons appris.
— C'est-à-dire?
— Voyager.
— Ne sommes-nous pas déjà en train de voyager?
— Oui, mais il va s'agir d'une autre sorte de voyage.
— Pourrais-je savoir de quelle sorte sera ce nouveau voyage?
— Il s'agit d'un voyage dans le temps.
— C'est banal.
— Comment cela?
— Tous les voyages se déroulent dans le temps, vous devriez le savoir...