31juillet 2016

Divine providence

 Épisode 201

– Ce sont les hommes qui font les faits
et donc pour connaître les faits il faudrait connaître les hommes
et connaître les hommes n'est point chose aisée.
Les faits sont là, l'histoire est là, il ne reste plus qu'à l'écrire!
Comme disait, à peu près, Rouletabille... 
– Je vous fait remarque...
– Laquelle?
–  L'histoire que l'on écrit après ne peut être l'histoire qui se déroule.
– Et pourquoi donc
– C'est une question de temps.
– Le temps qu'il fait?
– La fécondité de l'esprit, tout comme le ciel,
est dépendant du mouvement des astres...

Tout comme l’abaissement du niveau du mercure du baromètre annonce la chute de la pluie, quand la main ne peut contrôler, la chute n'est plus loin et la boule va s'en retourner vers tout ce qui dans le passé s'est dissous... en cet état la construction du sens est quelquefois bien ardu, que soit le point de vue, celui de l'auteur et celui du lecteur.
Les séquences et les images défilent, au sens poétique, un tissu qui se défait et dont le fil s'échappe comme le fil d'une histoire jusqu'à ce que l'imagination recommence immédiatement à reproduire, à retisser: des sens qui demande à ses lecteurs-auteurs de suspendre l'inévitable processus de référence individuelle, dans le meilleur des cas, collective pour le plus grand nombre. 

 

30 juillet 2016

Divine providence

 Épisode 200

– Où le regard se porte, les pieds sont déroutés.

Notre homme, le troisième roi, peu solidaire et survolté, ne sait pas où il met les pieds... on l'a déjà dit. Il n'est pas superflu d'être observateur. Ce qui fait que regarder ce qui est au loin empêche de voir ce qui est sous nos yeux, tout autant et peut-être plus encore, que ce qui est sous nos pieds... Y penser ne change rien. Le problème est simple comme un petit pois dans le premier cerveau venu. Il y a un temps pour tout et la lumineuse perception n'empêche pas la chute...

 

29 juillet 2016

Divine providence

 Épisode 199

– - Nous sommes déjà en retard et tout risque de foirer...
Suivons ces traces et avec un peu de chance...

Le troisième roi, peu solidaire et survolté, ne sait pas où il met les pieds... La boule, mue par une force indicible, sans se soucier de rien ni de personne, a poursuivi son chemin.
Ainsi propulsé par un je-ne-sais-quoi par définition indéfinissable, notre roi s'est mis en mouvement en misant sur la chance.

 

28 juillet 2016

Divine providence

 Épisode 199

– Si la boule est perdue, ne perdons pas l'espoir...

La boule, mue par une force indicible, sans se soucier de rien ni de personne, a poursuivi son chemin.
Que fait un être qui perd la boule au sein de la mer? La boule suit-elle un chemin? Peut-on trouver une trace persistante de son passage? De laquelle émanerait quelque chose qui ressemble à une mémoire? D'autant que la possibilité que la boule sans témoin fut prise pour un œuf et mangée par le premier poisson venu est bien grande... et la trace du passage du poisson n'est guère plus évidente que la trace d'une boule.
Les trois frères en leurs royaumes eussent eu bien des conseils et surtout nombre de conseillers. Mais là, dans la crudité de leur destin, ils sont bien seuls. D'autant que l'un d'eux semble bien mal-en-point pour ne pas dire plus...
Rompant avec l'humeur douce d'un conte, voilà nos trois frères, chacun en son état, dont aucun ne les flattait vraiment, remis en route, troublante coïncidence ou grotesque simulacre d'un auteur attardé, par la même force indicible que la boule dont ils ont perdu la trace. Mais tous ces tâtonnement de la plume n'enrayent en rien la machine du temps. Les voilà qui se propulsent plus qu'ils ne sont propulsés...

 

27 juillet 2016

Divine providence

 Épisode 198

Dans notre époque dite de "grand progrès" le lecteur est souvent un être curieux, peut-être un peu gauche quand il croit être subtil, il se prend à rêver que ce qu'il lit contienne quelque vérité et s'étonne souvent qu'il en contiennent plusieurs parmi lesquelles il n'aurait pas à choisir. Ainsi en est-il des histoires qui n'en forment qu'une... Permettant ainsi, aussi incongru qu'il puisse être, un mélange qui est chose bien courante dans la vie. Qui serait capable de séparer sûrement et définitivement ce qui ne forme qu'un grand tout serait considéré pour un sage si la somme des parties étaient à même de dépasser le tout. Ainsi, pour de multiples raisons, on dit que le sommeil de l'âne arboricole est un moment crucial de son existence. Pour s'élever au rang de maître au sein de son ordre il doit maîtriser parfaitement et conjointement: la connaissance de sa queue, celle de l'arbuste sur lequel il vit en symbiose, la psychologie appliquée au rêves inversés, puisque réalisés la tête en bas.
Il n'y a alors pour lui plus rien d'autre à faire qu'à accepter... Quelque chose alors se met à changer. Sans que le rêveur ne puisse discerner quel est le sujet qui en est l'objet...
Il lui semble alors, dès son réveil, que quelque chose d'indéfinissable, mais de naturel et vivant, a été ajouté à son existence. Sans aucune mélancolie, l'âne se réveille en prenant conscience de l'infini qui l'entoure et dans lequel il prend une place de plus en plus petite.


"Vies, moeurs, éducation et destinée des baudets sauvages
à l'usage des sages et de ceux qui les croient bienheureux”

 

26 juillet 2016

Divine providence

 Épisode 197

– Lorsque par la grâce du miroir, 
le chemin de l'aigle dans le ciel
ressemble à s'y méprendre
à celui d'un poisson, l'homme qui s'égare
cherche en vain quelque racine...

On retrouvera le troisième Roi écrasé sur le ponton. Sa boule, encore visible, s'enfonçant lentement vers les hauts fonds.

 

25 juillet 2016

Divine providence

 Épisode 196

– Nous sommes dans un monde

où nous ne vivons pas mais où nous sommes vécus...

vouloir le rattraper est la pire des illusions... 

mais là réside tout notre pouvoir...

... avec aussi peu de succès. Le troisième roi tombe et disparaît. Leurs gestes geste sont désespérés, ils sont dans l'écart et la distance... 

 

24 juillet 2016

Divine providence

 Épisode 195

En un geste désespéré, il tente vainement de le rattraper pendant que ses deux frères en font tout autant pour lui...

 

23 juillet 2016

Divine providence

 Épisode 194

Le roi, surpris, laisse échapper sa petite boule et une lourde exclamation...

 

22 juillet 2016

Divine providence

 Épisode 193

Alors que le premiers des trois rois regardait vers nous au moyen d'une petite boule qu'il tenait dans sa main tendue, une minuscule oscillation fit très légèrement vaciller le bateau... 

 

21 juillet 2016 (192)

Divine providence

 Épisode 192

Les événements qui se déroulaient devant mes yeux perturbaient la mémoire que j'avais de ce récit que j'avais alors trouvé passionnant. Cependant il me fallait admettre que ce que je voyais et ce que j'entendais valait le coup aussi...

– C'est le roi qui a fait enlevé notre princesse !..
Nous étions en fuite, en chemin pour l'île de notre ânesse quand celle-ci s'était mise à brailler en fermant les yeux, l'air inspirée. De là où nous étions nous ne voyions rien de l'arrivée du bateau, aussi étions-nous fort surpris de l'entendre.
- ...et ils sont venus à trois... ajouta-t-elle...  

 
“Vies, mœurs, éducation et destinée des baudets sauvages,

accessoirement arboricoles"

"À l'usage des sages
et de ceux qui les croient bienheureux” 

20 juillet 2016 (191)

Divine providence

 Épisode 191

Pendant ce temps, le bateau ne tarda pas à revenir. Mais comment être sûr que ce fusse le même. Une meilleure coordination hormonale et un sens plus aigu de l'observation m'eût permis de constater le présence d'une troisième cheminée et la présence obsédante d'un parfum que nous ne connaissions pas, mais il n'en fut rien. La peur repris le dessus et nous nous enfuîmes. Et dans ma tête se poursuivait un récit qui...

 
“Vies, mœurs, éducation et destinée des baudets sauvages,

accessoirement arboricoles"

"À l'usage des sages
et de ceux qui les croient bienheureux” 

19 juillet 2016 (190)

Divine providence

 Épisode 190

Au printemps, les plus chanceux des ânons à peine éclos de l'épais manteau de neige sauront distinguer les anciens parmi le feuillage naissant et garderont à jamais, cachée au plus profond d'eux-même, l'image d'un être qui sait se tenir droit dans la lumière, sans qu'il lui soit nécessaire de s'aider de sa queue.

 
“Vies, mœurs, éducation et destinée des baudets sauvages,

accessoirement arboricoles"

"À l'usage des sages
et de ceux qui les croient bienheureux” 

18 juillet 2016 (189)

Divine providence

 Épisode 189

En hiver, la principale difficulté de l'âne arboricole est de se trouver à manger et à boire. L'eau qu'il boit ne doit pas avoir eu de contact avec la terre. Ainsi, les rares observateurs qui ont eu la chance de les voir vivants eurent tous le sentiment d'une fragilité extraordinaire...

 
“Vies, mœurs, éducation et destinée des baudets sauvages,

accessoirement arboricoles"

"À l'usage des sages
et de ceux qui les croient bienheureux” 

17 juillet 2016 (187)

Divine providence

 Épisode 187

Qui était ce personnage... La vraie question eut dû être :
"Qui pouvait-il être?" tant sa faculté d'échapper au raisonnable semblait évidente. Ainsi me racontait-il, avec le plus grand sérieux, des histoires auxquelles j'ajoutais immédiatement ma jeune foi grandissante:

 
“Vies, mœurs, éducation et destinée des baudets sauvages,

accessoirement arboricoles"
Sous titrée :

"À l'usage des sages et de ceux
qui les croient bienheureux” 

L’âne arboricole vit essentiellement sur des arbustes très particuliers, eux-mêmes en voie de disparition sur lesquels il arrive que certaines lucioles se posent par mégarde ou aveuglement.

16 juillet 2016 (186)

Divine providence

 Épisode 186

– Tu n'es pas mon père !
Ces quelques mots me troublèrent bien plus que je n'eus pu  l'imaginer jusqu'alors.
– Tu n'es pas mon père...
Était-ce la manière de le dire, ce qu'il me dira ensuite, de ma propre lâcheté ou encore de cette lourde et sirupeuse odeur qui réapparaissait ?
Pourquoi cette impression de déjà vu, ou, pour être plus précis, cette impression déjà ressentie...
– Cette histoire a commencé il y a fort longtemps. J'étais alors un personnage important...
Jamais il n finissait ce qu'il commençait de me raconter. En tous cas c'est l'impression que j'avais. Depuis qu'il a disparu son regard revient sans cesse se poser sur moi. Nous avions les mêmes yeux et nous n'avions jamais eu le même regard.
Aujourd'hui, je suis presque aveugle. On dirait que mon œil se vide, ma nuit se remplit. Je commence à peine à voir ce qu'il disait.

 – Ce fut une bien longue histoire... me disait-il souvent. Je suis retourné dans mon village, plus pauvre qu'avant. 
Ses mains, perchées sur son bâton, se serraient l'une contre l'autre et oubliaient peu à peu les gestes simples d'autrefois. 

15 juillet 2016 (185)

Divine providence

 Épisode 185

– Tu n'es pas mon père !
Était-ce la manière de le dire, ce qu'il me dira ensuite, de ma propre lâcheté ou encore de cette lourde et sirupeuse odeur qui réapparaissait ?
Ces paroles me soulagèrent. Non pas que je l'aimais moins, ni que cela changerait notre situation, mais cela me permettait de prendre une certaine distance qui me rapprochait de ce que j'étais vraiment.

14 juillet 2016 (184)

Divine providence

 Épisode 184

Malgré le froid, la neige avait fondu sur l'île voisine. Après avoir partagé le petit poisson, ce qui nous réchauffa quelque peu, l'enfant, sur le ton de la confidence, me fit cette déclaration surprenante...

13 juillet 2016 (183)

Divine providence

 Épisode 183

Cependant cela n'expliquait pas tout. La flèche et l'eau continuaient de vibrer...

12 juillet 2016 (182)

Divine providence

 Épisode 182

L'enfant fut plus vite dégrisé que moi. Il expliqua avec un aplomb presque comparable à celui de la flèche que celle-ci n'était pas tombée du ciel sans raison. Que la raison en était plus simple que ce que pouvait imaginer mon esprit qu'il trouvait tortueux, voire torturé. La flèche était simplement celle qu'il avait, face au navire, tiré en direction du ciel. Elle avait mis un certain temps pour redescendre et voilà tout.

11 juillet 2016 (181)

Divine providence

 Épisode 181

La flèche ne s'arrêta pas à la surface du ponton, mais le pénétra profondément jusqu'à se perdre à notre regard dans l'eau sous nos pieds. La flèche vibrait encore quand j'osais approcher ma main comme je l'avais fait tout à l'heure avec Illusion qui était partie très vite sans nous avoir dit ce qu'elle avait fait de ma poupée. C'était une vibration intense qui faisait vibrer le ponton à l'unisson. Un étrange instrument de musique vibrait sous nos pieds. Le choc s'éloignant je prenais plaisir à cette musique. La mer s'était mise à danser, elle aussi... De petite vagues luminescentes ondoyaient autour de la partie immergée de la flèche.

10 juillet 2016 (180)

Divine providence

 Épisode 180

J'eus à peine le temps de rêver que déjà la réalité nous avait rattrapé. Sans qu'aucun de nous n'ait eu le temps de réagir, une flèche, tombée du ciel vint se planter au milieu de nous. Deux secondes plus tôt, c'était en plein cœur que je la recevais... Je devais ma vie à la crainte que j'avais éprouvée face au geste de mon maître.

9 juillet 2016 (179)

Divine providence

 Épisode 179

Illusion continue son récit.
Je profite de la stupéfaction de mon maître pour rêver encore un peu. Oui, j'ai une vraie nature de chien. J'aime les odeurs, toutes les odeurs. J'ai un compagnon, un chien, un vrai qui ne fait pas que me renifler.
Nos deux mondes se chevauchent... Quant à moi, il me plait de superposer les deux...

8 juillet 2016 (178)

Divine providence

 Épisode 178

Et puis, simultanément j'avais vu cette image qui allait me poursuivre... Se pourrait-il que cette petite bête eut des pensées et des aspirations qui ne correspondent pas avec celles que j'avais ? 
Brusquement son image devint une espèce de menace... en tous cas c'est l'effet que cela me fit...

7 juillet 2016 (177)

Divine providence

 Épisode 177

Je ne sais si le froid joua son rôle ou si, plus certainement j’eus peur, mais je changeais de couleur. J'avais esquissé un geste vers Illusion, sentant qu'elle avait besoin de réconfort. Mais elle avait grogné et avait elle-même esquissé le geste de me mordre.

6 juillet 2016 (176)

Divine providence

 Épisode 176

– "Pourquoi n'aurais-je pas eu des désirs, des passions comme n'importe quel homme ?"* Il y a dans la vie de chacun une part d'ombre qui lui est personnelle où il n’accède que selon certains rituels particuliers. Pour moi, cette poupée en est une clef magistrale. J'avais de la peine à retrouver des couleurs présentables...

* Jonathan Littel, Les Bienveillantes

5 juillet 2016 (175)

Divine providence

 Épisode 175

Illusion se mit à raconter.
– Quand vous avanciez sur le ponton vers ce bateau si beau, j'eus la sensation intime d'un danger. Une voix m'appelait de très loin. Je n'eus d'autre alternative que de suivre cet appel. C'était comme une force nouvelle à laquelle je ne pouvais résister. J'avais enterré la poupée qui m'avait valu ce choc épouvantable sur une petite île que vous ne connaissiez pas...
Elle avait baissé la tête, n'osant me regarder. Je n'en menais pas large et décidais de me taire en regardant fixement le ponton.
– Je n'eus aucune difficulté à la retrouver. Quand je la déterrais, son odeur me fit baver. J'étais comme dans un état second. J'eus toutes les peines du monde à me retenir de la dévorer...

4 juillet 2016 (174)

Divine providence

 Épisode 174

Bien que le froid, peu à peu nous envahit, nous écoutâmes ce qu'elle avait à nous dire. Tout en l'écoutant, je la regardais. Elle ne semblait pas souffrir du froid, ce que je mis sur le compte du fait qu'elle portait fourrure, tout de même, mais sa position dans l'espace me donnait à réfléchir...

3 juillet 2016 (173)

Divine providence

 Épisode 173

Derrière nous, notre île n'avait pas encore été recouverte... C'était étrange... Illusion arrivait au triple galop.

2 juillet 2016 (172)

Divine providence

 Épisode 172

Le ciel avait changé au point que nous avions légèrement froid. L'enfant, surpris me montra l'île voisine. Elle était recouverte de neige. Bien que cela fut de saison, il était naturel qu'il fut surpris...

1 juillet 2016 (171)

Divine providence

 Épisode 171

Nous étions pétrifiés, nous ne vîmes pas partir la flèche. Le bateau tous feux éteints, s'éloignait déjà... 

...quand l'enfant, souriant, nous pris par la main. Nous étions étrangement calmes. Personne ne posa de questions. En silence nous admirions ce si grand bateau qui disparaissait dans la nuit. Je sentais bien que ce nous venions de vivre était comme un commencement ou une fin...