mardi 30 novembre 2010

Miroirs scintillants

-Prends garde à ta tête...
- Sire ce n'est pas sans raison que je vous raconte avec grande vérité ce qui ce matin s'est passé.

Après l'avoir analysé dans ses diverses parties sous la céleste et toilée voûte bleue, il est facilement perdu de trouver sa propre image dans le premier des miroirs scintillant dans sa pauvre main. Les seules personnes qui s'y reconnurent et de nous connus l'insérèrent volontiers dans un seul ouvrage impubliable il y a déjà si longtemps. La mémoire est mère de la trahison. Portrait de sa docte ambivalence, des indécisions de sa cour, des subtiles moyens de la pose, porte ouverte à de nombreuses évidences, ainsi que le sentiment d'une cohérence absolue entre les codes en vigueur pendant dans le temps ainsi dévoilé fait de cette œuvre un mystère à la façon gothique. Au fond de la crypte se nichent le savoir que les caches et les couches recèlent et que certains décèlent. Le moindre signe se déchiffre pour montrer ce que les propriétaires fonciers accompagnés de la grande cartographe, plus connue sous le doux nom de: "l'Inconnue", proposent à la vente, comme une évidence: du contexte. Bienséance, jouissance et parement en font tout ou partie. La moindre trace devient ainsi, par la grâce du très saint déchiffrement, presque, il ne s'en faut pas de beaucoup, parole d'évangéliste à la langue bien vivante et bien pendue pourléchant le devant et le derrière des ayant-droits.

lundi 29 novembre 2010

"Hors d'oeuvre...
Par Daniel Will

jeudi 25 novembre 2010

Fragile mémoire

-Prends garde à ta tête...
- Sire ce n'est pas sans raison que je vous raconte avec grande vérité ce qui ce matin s'est passé.
Perché sous la céleste voûte bleue, un peu perdu dans ses pensées, le Roi s'égare, incapable de trouver sa propre image dans l'un des miroirs scintillant qu'il tient d'une main nonchalante.
- Quelques rares personnes s'y reconnaissent et sont de nous connues, sire.
- La fragile mémoire est mère de la trahison.
- Ne soyez pas dupe, sire, entre le vide et le néant il y a comme gouffre où vous pourriez vous perdre.
- Explique-moi cela...
- Je vous dis, sire, que si vous vous attachez trop au vide que vous mettez en évidence, vous risquez fort de vous perdre.
- Où cela, je te prie?

mercredi 24 novembre 2010

À demi-fou demi-tour

- Venez, homme à demi fou. Sur ces pierres, nus pieds nous allons marcher. N'ayez crainte je suis là pour vous guider.
Incapable de résister, mes pieds sans mon accord se mirent à marcher. Autour de moi le tonnerre grondait mais je marchais sûrement accompagné par sa main. Si la terre se dérobait, de sa main je ne tombais.
Nous voyageâmes longuement. Noires mains sous les gants blancs. Au loin, sous les torches tremblantes, les princes "encordonnés" aux paumes brûlées dansent la longue valse des errants à la recherche de lanterne perdue.
- Il suffit! l'interrompt le roi. Tu n'as pas le droit d'insulter ma cour sous prétexte de m'éclairer.
- Je n'insulte personne sire et l'histoire n'est point finie...
- Alors finissez-en, puisque nous nous avons commencé.
_ Il y a, i
l est vrai, que nous sommes bien faibles, mais de nos jours, sans aucune ardeur, il n'est de foyer qui ne s'allume sans le moindre souffle qui l'active. Notre expédition, pour laquelle nous partîmes ne serait que promenade au long du soir si la moitié du chemin, toute d'ombres invisibles, ne la cachait.

mardi 23 novembre 2010

Invisible dame

- Je crains fort de vous paraître prétentieux, mais je n’en ai guère besoin, ma dame invisible. Il se pourrait aussi qu’ainsi je vous prête quelque utilité. Mon âme insoumise se prêtera à ce nouveau jeu si votre engagements se révèle pur et sans tache.
- Seigneur Fou, il n’est point fol celui qui en moi se mire. il n’est point fol celui qui de mon regard j’embrasse.
Le roi:
- Fou, sans vouloir te contrarier, je vois que tu as trouvé ta moitié.
- Mon Bon Homme Roi, ne vous moquez pas de moi. Rien de ce que je vous ai conté n’est l’objet de la moindre contrariété. Je vous saurai gré de bien vouloir m’écouter.
La petite voix de la dame se fit pressante:
- Prenez ma main, je vous prie mon Fol Ami, et venez avec moi.
Le fou, se retournant:
- Je vous l’avoue, mon Bon Roi Bonhomme, je suis comme aveuglé. Une douce lumière fait corps autour de moi qui m’empêche de saisir. Si je ne suis mort je reviendrai.

lundi 22 novembre 2010

Hommage

La petite voix reprend sans y être invitée:
- Il n'est point aisé de comprendre et n'est point guéri celui qui de son portrait se satisfait pleinement.
- Madame, je ne suis qu'un fou, pas un malade! J'aimerai que de mon rang vous respectiez l'usage . Il n'est que le roi qui puisse de moi faire l'image si ce n'est l'hommage. Je ne puis sans crainte vous prêter mon oreille.
- Calmez vous, mon plaisant fou. Je ne peux oublier que c'est de vous que m'est venue ma fortune. Sans vous je ne serais rien et pour cela je vous fait une promesse.
- Madame, je ne comprends rien à ce galimatias, mais dites quand même ce qui, peut-être, me ravira.
- Monsieur le fou,apprenez qu'il n'est point possible de s'observer quand vous êtes l'observé et l'observant. Il faudrait pour cela faire un petit pas de côté puis survoler sa propre morte une fois puis deux fois et en fin se réveiller comme ce matin vous vous êtes levé. Je vous promet que je pourrais, sans forfanterie et surtout sans arrogance, si vous me le permettiez, vous soutenir dans votre humilité.

dimanche 21 novembre 2010

Aveuglement

- Vous avez de l'audace, voix que j'entends et que je ne puis voir. Que votre désir rejoigne le mien qu'il puisse enfin répondre de vous comme de moi. Faites votre présence plus présente si vous voulez de moi avoir plus ample connaissance. Je ne vous dois rien et mon engagement ne concerne que moi, mais il de ces choses que l'on ne comprend point qui nous pousse...
- Vous m'entendez, j'en suis fort aise. Mais croyez-vous vraiment que j'existe?
- Je dois le croire puisque je vous entends.
Un silence inquiétant se prolonge longuement. La petite voix sourit. N'y tenant plus le fou s'emporte:
- Pourquoi souriez-vous? Je vous ai, je l'avoue, imaginé plutôt jolie, mais le temps passe qui porte en lui ruine et mélancolie.
Silence.
- Comment le savez-vous?
- Je ne suis point aveugle madame...
Un doute l'envahit et l'oppresse. Le voilà dans de beaux draps. Il aurait été plus malin de ne rien dire.
Long silence pendant lequel il murmure pour lui-même:
- Suis-je devenu vraiment fou? Je parle avec une voix sans visage et qui pourtant me dévisage et commence à faire de moi un portrait sans respect que je ne puis accepter.

samedi 20 novembre 2010

Céleste paix

- Mon bon ami, dites toujours et craignez de me mentir ou de me confondre. Apprenez que si l'objet de mon courroux ne vaut plus grand chose et que la tristesse me gagne, je ne puis faire des conventions qui nous lient. Parlez sans honte et sans crainte, si votre cœur est pur et votre âme sereine, il ne peut rien vous arriver de fâcheux.
- Qu'il soit fait selon vos désirs, Sir. Ainsi ce matin, je vous le disais, me suis levé l'esprit tout guilleret tout occupé à mon engagement. Je ne puis vous cacher la joie que cet état fit naître en moi. Je marchais de long en large l'esprit tout occupé de cette juste cause quand tout-à-coup, brusquement je m'arrêtais. Une petite voix, inconnue de mes esprits, me tint à peu de choses ce langage:
- Qu'est-ce donc que cet engagement dont tu prétends jouir sans encombre?
- Foi d'homme sire, je n'aimais pas, je vous l'avoue, cette petite voix. Mais, si vous me passez l'expression, impossible de l'envoyer paître. Après tout elle n'avait pas tort et finalement, elle posait la même question qu'en secret je me posais. Pourtant je trouvais qu'elle prenait un peu trop ses aises en me questionnant sans ménagement. De plus, elle ne se montrait guère discrète. Après tout c'est de mon engagement qu'il est question. Et puis, surtout, elle avait rompu la céleste paix dans laquelle je m'étais levé et avec laquelle je me préparai à venir vous visiter.

vendredi 19 novembre 2010

" La toise du savant..."

"La toise du savant et les vertiges du fou."*

Un passant vint à passer qui comme un fou se mit à hurler. Un discours trop hardi qui leur fit perdre la tête. Et puisque l'ennemi est là, hélas, pourquoi ne pas la lui couper une bonne fois.
- Nous devons, quoiqu'il ait pu en dire, nous demander si ce qui en nous s'agite n'est point bonne cause! se dit à lui-même le peuple bien-né.
- Autant de mal-séance nuit, de jour aussi! Et c'est aussi malchance que de porter, malgré nous, celui qui aurait assurément rêvé d'endosser nos rêves les plus fous.
Il ne faut qu'au dehors n'apparaisse ce qui au-dedans doit rester.
- Savants et savantes, prenez les devant et assurerons nos arrières. Ne laissons point ce fou occuper impunément nos si belles artères. Que le sang coule et que la vie se répande dans notre noble cité...
Et ce qui fut dit fut fait. Fort fait.


* Théorie de la démarche
Honoré de Balzac

Festoiement & autres miettes

L'heure serait au chapitre des plaisirs. Les mains se perdent et cherchent en tâtonnant les monts et les gorges de ces terres inconnues en diversifiant les poses. Flamboyantes manipulations et rudes implantations se succèdent au rythme langoureux des plaintes et des souffles qui se disputent les faveurs du silence. La vie à la cour ne peut être étalée sans rémission. Dans le crâne de l'artiste, son pinceau, fièrement dressé, obture la fuite qui mène à son cerveau. Le maigre plumet flotte piteusement au dessus de la mêlée. Sur la page adjacente l'histoire se raconte.
- De bon matin me suis levé. Me vint à l'idée la chose suivante: Qu'en est-il vraiment de mon engagement? Quel meilleur sentiment pour un commencement? Me voilà pleinement ragaillardi par une quête infinie. De pas pas je vais rejoindre sans délai ce souverain avec qui je festoie mais que je ne connais guère plus que le quignon de pain rabougri qui me sert de déjeuner.
- Sire , je vais vous dire sans médire ce que je sais. Il n'est point de lumière sans contrepartie, ainsi je vous prie de faire preuve de patience quand cette obscure partie pour un instant vous sera présentée. Il n' y a aucun doute pour qu'après quelque durée, de lassitude elle ne s'en aille.

jeudi 18 novembre 2010

Portrait en errance

Du fait, improbable mais cependant avéré, de sa mauvaise conduite, il n'est guère plus aisé de retrouver le moindre portrait qui soit de lui qu'il n'est facile de se reconnaître en sa propre image au levant. Le seul qui nous soit parvenu et qui puisse nous être connu, et connut de nous seulement, serait inséré dans un ouvrage publié autrefois pour l'agrément de notre bon, trop bon, roi. Il est, aujourd'hui, lui aussi, comme tant d'autres, lamentablement échoué sur un lit de rose à l'odeur enivrante de poussière dansante sous une sobre tenture couleur d'azur fané. L'impénétrable danse soulève, charme et chahute l'imagination. Les regards se posent, se soulèvent et balayent les strates irritées de la patience. Caresses langoureuses et coup de main n'y feront rien. L'image et son regard échappe à l'émotive capture. Sous se diverses couches accumulées, retouchées, abîmées, repeintes en autant d'hommages que de palimpsestes monstrueux et équivoques, ce portrait dans son ambivalence, son indécision et son sens de la rupture, porte témoignage très clairement du sentiment de cohérence absolue entre les codes en vigueur à ce moment-là, la très sainte mais hardie imagination de l'auteur et sa barbare complexité. La connaissance des parties cachées, l'ampleur des détails de l'individu montre que ces terres inconnues ont dû accompagner les maîtres cartographes empourprés au sein même du cadre ordonné par la bienséance, voire l'exacte proportion entre les parties cardinales du couchant et les parties orientales du levant. Ces maîtres inconnus de la bienséance sont partagés entre l'ordre qui doit accompagner l'inspecteur dans les parties intimes, l'élévation spirituelle et la vivacité de l'esprit qui préside à leurs ouvrages. Drame du dévoilement qui ne peut que les mener à l'abattoir d'abord puis à l'oubli.

dimanche 14 novembre 2010

Entrouverte

Du fait d'une conduite des plus hasardeuses, que l'on pourrait presque sans risque qualifier de «mauvaise conduite», il n'est guère plus aisé de retrouver le moindre portrait qu'il n'est plus facile de trouver sa propre image au premier instant. Le seul qui nous soit connu, encore faut-il relativiser, connut de nous seulement, est inséré dans un ouvrage publié autrefois pour l'agrément du maître. La porte entrouverte laisse passer un minuscule rai de lumière aussi tranchante qu'aveuglante. Aujourd'hui est échoué sur un lit de poussière dansante sous une sobre tenture couleur d'azur légèrement fané. Un courant courant d'air, fruit de notre présence, soulève une petite colonne, léger tourbillon impénétrable, danse secrète où les mots et les os s'entrechoquent, se brisent et disparaissent en se mêlant à la poussière dans laquelle ils continuent de danser dans la grande ronde presque immobiles aux yeux pressés. Le charme réveille demain et chahute l'imagination. Bientôt la porte se referme, la lumière s'éteint et la poussière apaisée se rendort. C'est passé...

vendredi 12 novembre 2010

L'appel de la vérité

Le fou ne sait résister longuement aux appels incessants de la vérité.
- Je ne puis m'empêcher de dire ce qui doit être dit. Je n'ai de respect que pour ce qui est vraiment et non à ce qui ne peut s'entendre qu'avec l'aide de la croyance.

Vraiment

Il n’y a plus de différence, aux yeux de nos instances supérieures, entre lui et nous, à moins qu’il n'ait disparu à jamais. Ayant conscience de cette possibilité, nous devons nous demander à notre tour comment et pourquoi ses horizons ont pu changé de telle manière qu’il soit sorti aussi hardiment de nos us et coutumes si bien ordonnés de notre si noble et vénérable pensée.
- Pourquoi me redites-vous cela ? Vous savez très bien que ces paroles peuvent me rendre fou.
- Vous le savez déjà, vous aussi je ne peux être tenu responsable de votre folie. Encore une fois, vous pourriez apprendre beaucoup d'elle.
- Vous ne m'avez jamais vraiment dit comment...
- Parce que je n'étais pas sûr que vous le vouliez "vraiment".
- À la fin de tout espace particulier commence, pour celui qui s'y intéresse, un nouvel espace qu'il délimite en le créant...
- Je ne vous suis pas.
- Je ne vous demande pas de m'y suivre
- Que me demandez-vous alors?
- Je vous demande simplement de m'écouter.
- Je vous avoue que cela m'est difficile.

jeudi 11 novembre 2010

Sombre nuit

À l'ombre des arbres qui les ont vu naître, "quelques-uns" dont je suis, se promènent sous les yeux de ceux qui les verront mourir.

Ils s'émerveillent de tant de possibles. Aussi loin que leurs corps les transportent, dans cet insaisissable présent où se posent leurs regards, se mettent à vivre une infinité de présences et d'innombrables histoires dans lesquelles ils prennent place.

Nous ne savons qui de nous regarde ou qui est regardé...


"Jamais le passé ne se constituerait, s'il ne coexistait avec le présent ..."

G. Deleuze