samedi 30 août 2008

Rencontre



"Au fond le seul courage qui nous est demandé est de faire face à l'étrange, au merveilleux, à l'inexplicable que nous rencontrons."

R.M. Rilke

vendredi 29 août 2008

"Et l'écho résonne encore"



"Sur le pays des chimères
Notre vol s'est arrêté :
Conduis-nous en sûreté
Pour traverser ces bruyères,
Ces rocs, ce champ dévasté.

Vois ces arbres qui se pressent
Se froisser rapidement ;
Vois ces roches qui s'abaissent
Trembler dans leur fondement.
Partout le vent souffle et crie !

Dans ces rocs, avec furie,
Se mêlent fleuve et ruisseau ;
J'entends là le bruit de l'eau,
Si cher à la rêverie !
Les soupirs, les voeux flottants,
Ce qu'on plaint, ce qu'on adore...
Et l'écho résonne encore
Comme la voix des vieux temps"

Gérard de Nerval


Malgré son caractère désertique, l'île sur laquelle Don Penúl et Lancinante ont élus domicile se révèle extrêmement riche et fertile.
De nombreuses pistes restent à explorer et pourront faire l’objet de recherches ultérieures. Au niveau de notre histoire, il est bien trop tôt pour que des conclusions puissent être formulées, même avec la plus grande prudence.
Pour l'heure, Lancinante, en peine ébullition, peine à retenir ses élans profonds. Une danse timide et fougueuse réveille les fondements caverneux de son corps. Don Penúl, intrigué, curieux et sans trembler, ne manque pas d'y trouver grand intérêt.
- Ce que j'entends n'est rien face à ce que je vais entendre...

jeudi 28 août 2008

Jouet


- Pensez-vous, Lancinante, qu'il en soit différent avec vous-même? Le souffle qui vous anime n'est-il pas le même qui fait ce mouvoir ce que je tiens entre mes mains? Pour vous comme pour lui, cela ne dure qu'un temps dont nous sommes les jouets...

mardi 26 août 2008

Souffle et bris du temps



"Le silence, mis à mal, peine à trouver les mots qui guérissent."

Walid Neill


Lancinante, la mine renfrognée, ne s'enthousiasme pas au spectacle des emportements joyeux et enfantins de Don Penúl.
- Approchez Lancinante!
Que vous êtes bornée, regardez comme ce tissu est vivant! Il réagit au moindre des commandements et respire au gré du vent ! Il sait se jouer allègrement du poids de la raison.
- C'est à se demander à qui il obéit, Don Peñul. Le moindre courant courant d'air lui ferait rebrousser chemin et le souffle qui l'anime n'est pas le sien.
- Et qu'en est-il du votre ? Docte Lumière et monture au passage...
- De quoi parlez-vous ?
- Je parle de votre souffle.
- Eh bien, qu'a-t-il donc ce souffle qui est mien ?

lundi 25 août 2008

Gravité


- Regardez, Lancinante comme c'est magique. Cette chose est remplie de joie et de vie! C'est merveille que de la voir se déployer et se jouer de la gravité de notre monde.
Lancinante ne réagit pas...

dimanche 24 août 2008


"De quelle existence mise en pièces cette toile est le reflet?
Regardez-la qui danse et joue sans autre masque qu'elle même."

Walid Neill


Un petit souffle de vent fait se gonfler la triste dépouille. La toile vide s'anime et tisse d'élégantes arabesques. Don Penúl, d'abord surpris, puis ravi, se prend au jeu.
- Venez Lancinante ! Jouez avec nous !

samedi 23 août 2008

Un mince filet de lumière


"À quoi jouent-ils ?
Ils jouent au jeu de la porte qui joue,
celle qui laisse entrevoir un mince filet de lumière."

Walid Neill


Sur l'île déserte, Don Penúl a trouvé, échoué sur la plage une grande pièce de tissu rouge. Le jour se lève. Lentement, Don Penúl soulève l'étoffe et regarde son ombre projettée. Dans le ciel, le soleil chasse les étoiles attardées.


- De quel destin cette étoffe s'est-elle séparée ?
- De celui qui, comme vous aujourd'hui, hier la tenait en sa main, mon Maître.

Don Penúl tourne autour de son trésor. Un jeu s'annonce, difficile à éviter.

vendredi 22 août 2008

Absence


"L'absence évoque l'absence chez celui qui l'accueille."

Walid Neill


Sur l'île déserte, Don Penúl et Lancinante, sa monture et son guide, conversent. La nuit est tombée. Brusquement, Don Penúl se lève et jette une poignée de sable. Dans le ciel, le sable et les étoiles se confondent.


- Depuis que nous sommes ici, je n'ai point dormi!
- Cela ne fait que peu de temps, mon Maître.
- Tout ce que nous disons est comme le sable qui coule entre mes doigts. J'ai beau essayer d'en compter les grains, je n'y arrive pas. Vous deviez être mon guide Lancinante, et vos paroles me perdent. Rien ne reste à la fin. Je ne reconnais plus rien et cette musique qui me charmait il y a peu, je ne l'entend plus. Où se cache le musicien que vous ne pouvez voir ? Il est peut-être là devant nous et nous ne savons le discerner, ni l'entendre. Laquelle de ces pierres en contient la mémoire ?
- Peu importe, Monsieur.
- Lancinante, vous avez raison, "peu" importe. Ce peu qui se rapproche tellement du rien contient tout.
- Il faut songer à partir.
- Non, nous ne partirons d'ici qu'à l'instant où je reverrai le visage porté par le vent.
- Quel est ce visage ?
- Celui que nous cherchons, Lancinante. Celui pour qui nous sommes partis. Celui qui nous appelle.
- Vous ne dormez pas, Don Penúl, mais vous rêvez.

jeudi 21 août 2008

Maintien


Don Penúl, perplexe devant la complexité de son compagnon, à demi-voix, ne cesse de s'étonner :
- Ai-je vu, de mes yeux vus, ce léger scintillement qui lui fit, je le crois, fermer subrepticement une de ses paupières ?
À haute voix :
- Lancinante, dois-je comprendre de ce clin d'œil, que vous n'êtes pas entièrement sérieuse ? Si ce devait être la cas, vous me libéreriez ainsi d'une part importante de mon obligation de maintien. Si je vous ai bien compris, cet œil, le votre, que j'ai vu se fermer, me rendait-il inexistant pour moitié ?

mercredi 20 août 2008

Tison sous la cendre



"En tout feu dormant, une flamme rêve. Vois les formes parsemées et mouvantes qui s'élèvent jusqu'au ciel!""

Lancinante


Lancinante, docte et placide ne s'émeut guère du questionnement incessant de son maître mais refuse de s'engager dans une querelle inextinguible. Elle essaie vainement de démêler le laborieux esprit de celui-ci.
- Il n'y a point de vérité qui se forme sur le monde, Don Penúl. Tout peut être vérité. La plus absurde des choses est réelle mais peut aussi ne pas exister. C'est le regard que vous portez sur elle qui la fait exister. Si vous me dites que ce que vous portez en vos mains fait partie de la vérité, je vous suis. Si vous me dites que cette chose vit indépendamment de vous, je ne vous suis plus.



- Mais, si vous me dites que, par mon regard, elle est réelle, comment cette chose peut-elle ne pas exister ? Suffit-il pour cela que je ne la regarde plus ?
- C'est exactement cela, Don Penúl.
- C'est absurde !
- Certes, c'est absurde, mais bien réel.

mardi 19 août 2008

Trop à l'étroit


- Aussi petit que cela soit, je ne peux croire que vous ne puissiez voir ce que je peux prendre dans ma main, chère Lancinante. Il se pourrait que cela soit la funeste conséquence d'un esprit trop à l'étroit et par là peu enclin à entrevoir se former une vérité différente sur le monde...

lundi 18 août 2008

Dans l'ombre du doute



"C'est dans l'ombre du doute que la vérité fleurit."

Walid Neill


Don Penúl peine à convaincre Lancinante de la présence de l'accordéoniste.
- Lancinante, je vous trouve obtuse ! Il ne se peut que vous ne voyiez ce qui, de toute évidence est là, bien vivant devant nous, et que mes yeux reconnaissent sans l'ombre d'un doute.
- Sans l'ombre d'un doute, je ne vois rien, Monsieur.

Don Penúl doute. Il ne doute pas de la présence, mais il a peur de ne pas comprendre ce que lui dit sa noble monture. Si celle-ci dit qu'elle ne peut "rien voir sans l'ombre d'un doute", cela signifie qu'elle a besoin d'un doute pour voir. Cette pensée entraîne que les choses ne peuvent exister s'il n'existe une possibilité que ce ne soit pas le cas.
- Lancinante, je te remercie, le doute dont tu parles s'est emparé de mon esprit ! C'est la preuve que ce que je dis est vrai.
- Monsieur, je doute que ce soit le cas. Car dans celui-ci, le doute n'existe pas : je ne vois rien.
- Cela ne se peut...

L'esprit de Don Penúl s'échauffe en même temps que le soleil monte à l'horizon.

dimanche 17 août 2008

"L'ordre est le plaisir de la raison"



"L'ordre est le plaisir de la raison : mais le désordre est le délice de l'imagination."

Paul Claudel



- Dites-moi, Lancinante, qui est cette personne jouant sur nos rivages? D'où vient-elle et où va-t-elle?
Nous n'avions point rendez-vous, à ce que je crois, et la place qu'elle occupe est justement celle où je projetais de reconstruire notre château.

Le ton de Don Penúl est redevenu normal: quelque peu compassé, ce qui ne manque pas de désarçonner encore une fois sa monture.
- Vous avez raison, Don Penúl.
Personne ne sait si elle répond à son maître ou si c'est là une simple constatation concernant son état mental. Interloqué mais digne, celui-ci lève faiblement l'oreille et le sourcil.
- Je ne suis pas sûr de bien vous comprendre et encore moins que ce soit à ma question que vous ayez répondu, ma chère. Je dois vous dire que je suis assez décontenancé par votre attitude si changeante. Si vous voulez que nous menions à bien notre mission il faudra faire montre d'un peu d'ordre et de contenance. Pour commencer, répondez-moi simplement: Qui est cette personne que nous avons devant nous ?
- Je ne puis vous répondre simplement parce que je ne sais pas qui est cette personne!
- Voilà pourtant une réponse simple. Trop simple cependant pour être honnête... Il se peut que dans cette simplicité ne se cache un certain penchant pour le mystère...
- Je n'ai aucun penchant pour ce que vous dites là. Méfiez-vous cependant, si j'en crois ce que je possède bien mieux que vous m'ordonne de me méfier.
- Pourquoi devrais-je en tous points être pareil que vous et me méfier de la première personne que je rencontre et quelle est donc cette chose que vous posséderiez mieux que moi ?
- Parce que tous mes sens me disent que ce n'est pas la première personne venue...

Don Penúl l'interrompt.
- Qui d'autre encore foule au pied mon royaume?
Le ton monte en même temps que la marée...

samedi 16 août 2008

Dansante couronne


"Au-dessus des eaux immobiles du Styx, dans l'endroit même où son eau est stagnante, où tout semble plongé dans l'engourdissement, s'élève un rocher fatal."

Thésée, Sénèque, Hercule furieux




"C'est qu'autre chose va venir. Faites silence :
Vous rompriez sinon le charme."

Prospéro, Shakespeare, La Tempête


- Entends-tu, Lancinante, cette plainte qui monte de la plaine ?
Lancinante entend mais ne peut répondre. Don Penúl a perdu l'esprit. Il s'embrouille et se perd dans les tourbillons du temps. Tant de changements en si peu de temps. Voilà maintenant que son maître la tutoie.
Dans un murmure qui se mêle au vent du large, se parlant à elle-même, elle répond :
- C'est le souffle des vagues qui se brisent. Chevauchant à l'infini la moindre vague, éphémère et scintillante couronne blanche, l'horizon sans cesse roule, se jette et meurt sur la plage...
- Que c'est beau, Lancinante, te voilà devenue poète et ton chant s'accorde si bien à cette musique qui nous vient de loin ! D'où te viennent ces mots inconnus que je ne puis par moi-même entendre, ni même penser et que je peine à prononcer ?

vendredi 15 août 2008

Haute valeur morale

Lancinante, fort surprise, n'en croit pas ses oreilles.
- Est-ce bien là ce Maître que j'ai choisi pour sa distinction et ses hautes valeurs morales ? Jamais je ne l'ai entendu parler de telle façon !
Un doute s'est installé.
- Se pourrait-il que ce ne soit pas la voix de mon Maître ?

jeudi 14 août 2008

Écho



"Salut à mon noble Seigneur ! Salut grand Maître !
Je viens faire ton bon plaisir. Me faudra-t-il
Voler, nager, plonger dans le feu, chevaucher
Les nues frisées ? À tes ordres irrésistibles,
Soumet Ariel et tous ses dons."

Shakespeare, La Tempête


- Entendez, Lancinante, cette voix qui vient à nous, bravant les flots et le vent !
- J'entends, Don Penúl. Mais ce ne sont point là paroles qui vous sont adressées. Elles furent autrefois prononcées en d'autre lieu et ce que vous entendez n'en est que le lointain écho...
- Sotré, armanèque, arrozote et sourcefouaille !

mercredi 13 août 2008

Ici-bas



"En cet instant, en d'autres lieux, nombreux sont ceux qu'une grandeur invisible guide dans les profondeurs invisibles de l'ombre de nos pas..."

Don Penúl


- Sommes-nous donc condamnés à un éternel retour, Don Penúl?
Il me semble que ne devriez pas mépriser cette vie ici-bas pour rêver à un ailleurs au-delà...
Il me semble aussi que cet au-delà qui vous fait tant rêver est tout aussi bas que ce sable d'où nous étions partis et où nous sommes revenus.

Don Penúl n'entend rien. Il dort d'un sommeil agité par de bien obscures pensées et flotte comme un roi sur l'étendue d'un royaume qu'il croit sien. Pour lui le voyage continue. Figure de proue échouée, il parle d'une humanité plus haute et plus grande: vaste féerie tragique et grotesque qui grave sur son visage le masque du fou.

mardi 12 août 2008

"Vents chaut"



"Vents chaut, conseil, pleurs &timidité
De nuict au lict assailly sans les armes,
D’oppression grande calamité,
L’epithalame conuerty pleurs &larmes."

Nostradamus


Les vagues de la mer se mélangent furieusement aux nues qui se déchirent. Le vacarme des flots surpasse les cavalcades du ciel.
Le vent soulève le sable de la plage et forme une colonne sans fin qui relie le vaste haut et la basse terre. Lancinante s'agite.
- Tous cette mémoire m'aveugle et ne nous empêchera pas de disparaître, Don Penúl. Je n'y vois plus rien...

lundi 11 août 2008

Signe


Une colonne de sable s'élève, signe manifeste de la colère du ciel pour les uns et signe de miséricorde pour les autres, qui ne donne guère le choix ni même le temps de réfléchir.
Faute de terrains fertiles où pourrait se porter avec vaillance l'épée du verbe flamboyant, nos deux héros, bien malgré eux, se laissent porter vers un ailleurs dont ils ne savent s'il vaudrait mieux qu'il diffère en substance ou que tout soit finalement pareil mais remis dans l'ordre qui prévaut à l'origine.

dimanche 10 août 2008

"Il n’y a point de fin à multiplier les livres"



"Nombreux sont ceux qui, par le monde, à l'affut du moindre de ses frémissements et soucieux d'en être les hôtes, courtisent sans fin cette maladie incurable, dont le nom soigne d'un même élan doctes et ignares, et qui se prononce comme une interrogation : espoir !"

Lancinante


-Regardez Don Penúl, l'horizon se soulève!
Dans un instant nous serons submergés!
- Que cela se fasse! En cela réside tous nos espoirs, chère Lancinante.
Il y a peu , ici même se tenaient Prospero et sa fille Miranda. Qui sait si nous ne pourrions tendre si bien l'oreille que nous l'entendions.
- Comment avez-vous eu connaissance de cela?
- Je vous l'ai dit tout à l'heure, le sable qui nous porte est la mémoire de tous les mondes. Chaque grain est comme un livre.



samedi 9 août 2008

Le poids des mots



"- C'est sous le poids des mots que s'effondrent les plus beaux châteaux!"

Lancinante

vendredi 8 août 2008

Grains de sable



"Grain qui roule rejoint la houle..."

Lancinante


- Chère Lancinante, il en est de nos pensées et de nos paroles comme ce château de sable qui s'effondre. Chacun de ces petits grains de sable contient plus de mémoire que nous deux réunis et si parfois, ils acceptent d'être réunis, ce ne sera que pour un temps limité.

jeudi 7 août 2008

Vacillants repères


"Je ne peux taire que ce que je sais..."

Walid Neill


Lancinante peine à comprendre son maître. Avec bienveillance et beaucoup de patience elle tente de relier ce qu'elle connaît au monde de Don Penúl.
- Don Penúl, où voulez-vous en venir ? Je dois vous dire que je me sens un peu perdue.
- C'est précisément là que je veux en venir, chère Lancinante. Dans cette zone où l'esprit n'a plus que de très infimes et vacillants repères. C'est là que se trouve notre seule chance de vivre une véritable aventure. Si cela vous semble dangereux, légèrement décousu ou même en dehors du sens commun de l'existence, c'est que nous sommes sur la bonne voie...

mercredi 6 août 2008

Plein ciel


- Je veux qu'en plein ciel se dévoile enfin ce qui ne peut s'entendre !


"Had we but world enough and time..."*

Andrew Marvell


Don Penúl, spectaculairement et tout aussi vainement, s'active à la construction de son château.
- Don Penúl, j'essaie en vain de vous dire que la voix que vous entendiez et entendez à l'instant est mienne !
- J'entends bien Lancinante, mais je ne suis pas sûr que vous me compreniez. Je sais fort bien que la voix qui fait trembler mes oreilles, si légèrement que ce soit, et qui anime mes pensées, passe par vous. Ce qui me pose question, c'est: comment ces mots que vous prononcez vous sont-ils venus à l'esprit ? Ne les entendez-vous pas avant de les prononcer ? Si c'est le cas, on pourrait dire que vous ne soyez qu'un relai. On pourrait alors dire qu'ils ne viennent pas seulement du néant de votre être, mais aussi de plus loin que vous. Dans ce cas, cette voix, bien qu'issue de vos entrailles, n'est pas entièrement vôtre.
Lancinante, sans hâte, comprenant qu'il sera impossible de lui faire entendre raison, tente de détourner l'attention de son maître.
- Don Penúl il n'est point de château qui puisse atteindre les limites du ciel !
- Vous vous trompez Lancinante, montez avec moi en haut de cette tour où murmurent et chuchotent les anges...

lundi 4 août 2008

Voix de passage


Tout en parlant, Don Penúl s'est mis à jouer dans le sable, retrouvant progressivement les plaisirs oubliés de l'enfance. Sans s'en douter le moins du monde, il obéit à la voix.
Lancinante, un peu émue:
- Don Penúl, cette voix était la mienne !
- Je ne suis donc pas fou, vous aussi, vous l'avez entendue ?
- Je l'ai entendue, certes, mais parce que c'est la mienne.
- Lancinante, vous avez beau vouloir en être le possesseur, cette voix n'a fait que passer et qui sait combien à cette heure sont ceux qui l'ont entendue et qui comme vous pensent la détenir...
- Don Penúl, nous sommes seuls sur cette île ! Personne ne peut nous entendre!

dimanche 3 août 2008

Extrêmité


Don Penúl reprend son récit à l'endroit précis où un questionnement intempestif l'en avait chassé.
- Accroché à votre extrêmité que vous me tendiez obligeamment, une voix, je vous le disais, a traversé mes oreilles. Ce qu'elle me disait, je ne le comprenais pas :
« Don Penúl, retrouvez vos esprits! Et au besoin, cher Maître, façonnez-en de nouveaux! Réifiez! Le matériau ne manque pas...»
...et je ne le comprends pas encore.
Tout en parlant, Don Penúl s'est mis à jouer dans le sable, retrouvant progressivement les plaisirs oubliés de l'enfance. Sans s'en douter le moins du monde, il obéit à la voix.

samedi 2 août 2008

Sable


- C'est justement de ce sable que j'aimerais que vous m'entreteniez...
- Il porte la mémoire de ce qui fut autrefois.
- Serait-ce de nous que vous parlez comme si nous n'étions plus?
- Je ne vous parle pas seulement de nous, je vous parle aussi du monde et de son infini qui vous porte.
- Lancinante, je ne vous comprends pas. Vous ne répondez pas entièrement à mes questions. Sans cesse une autre question naît de vos réponses. Ainsi nous parlions du sable sur lequel nous sommes assis loin de tout et subitement vous me parlez comme si ce tout était là sous notre cul et qu'en plus vous me suggérez que nous appartiendrions au passé. Dois-je entendre par là que nous ne sommes plus?
- Don Penúl, vous manquez d'ordre et de rigueur. Tout à l'heure vous me parliez d'une voix "descendue du ciel" que vous auriez entendu et puis subitement vous vous êtes interrompu. Maintenant qu'un peu de notre fatigue a disparu, voulez-vous reprendre votre récit?

vendredi 1 août 2008

L'or de nos rêves


Allongés sur la plage, Lancinante et Don Penúl, chacun selon ses qualités, peinent à se remettre sur pieds. Don Penúl se réveille à peine :
- Il faut que je vous dise, Lancinante, que tout à l'heure, alors que vous me sauviez d'une fatale noyade, j'entendis des voix. Ou plutôt une voix venue du ciel. Cette voix, douce à mes oreilles, me parlait de choses et d'idées que je ne connaissais pas. Je me demande, et par suite je vous demande s'il se peut que vous puissiez, tout en restant discret, sur ce point m'éclairer ?
- Dites toujours, Don Penúl, comme vous pouvez le constater, nous sommes seuls et si le scintillement qui nous entoure nous transporte dans une voie aux apparences célestes, ce n'est qu'un effet de la fatigue de nos sens. Nous ne sommes que pauvres hères revenus d'un long voyage, allongés sur la plage et l'or de nos rêves n'est que sable brûlant.