dimanche 31 mai 2009

- Vous croyez que ce n'est pas un cadeau, mais il se peut que vous vous trompiez. Certains d'entre nous rêvent d'entendre comme eux. Si vous saviez ce qu'ils sont capable de faire peut-être le désireriez vous aussi.
- Sans vouloir vous manquer de respect, je crois que ne suis pas à plaindre de ce côté là.
Nous ont-ils vu?
- Je n'en ai pas idée... et c'est notre chance. Je vous le répète ils ne sont pas en train de regarder. Ils se concentrent presque uniquement sur ce qui parvient à leurs oreilles. Et ces oreilles spécialement disposées leur donnent des aptitudes très spéciales.
- Lesquelles?
- Celles de voir et de construire des mondes dans la nuit.
- J'ai de la peine à comprendre...
- Il est difficile de s'imaginer ce que nous ne connaissons pas. La symétrie parfaite de nos organes limitent la perception de ce qui nous entoure et nous porte. La sensation que tout est forcément comme nous fait que nous ne pouvons considérer que ce qui nous ressemble. Ainsi nous sommes moins en danger.
- En danger de quoi?
- En danger de devoir changer, si peu que ce soit.
- Est-ce là l'objet de votre peur?
- Je n'ai pas peur. Pourquoi me demandez-vous cela?
- Je ne suis pas sûr du bien fondé et de la certitude de votre réponse. J'observe bien souvent de légères variations dans votre humeur qui se ressentent principalement dans les légers tremblements et les brusques changements de tonalités presque imperceptibles de votre voix.
- Décidément, je le répète, mais vous m'étonnez, ce que vous venez de décrire est un peu ce qui constitue le travail des Émissaires. Le fait qu'une de leurs oreilles soit placée plus haut que l'autre fait qu'ils peuvent capter les très légères différences et les variations dans les temps d'arrivée des ondes sonores, ce qui leur permet des les localiser et ainsi d'en faire des proies plus ou moins faciles.
- Pourquoi dites-vous des proies?
- Parce que ce sont des chasseurs.
- Pourrait-il nous arriver quelque chose de fâcheux s'ils connaissaient notre présence?
- Tout dépendrait de la sorte de pensée que cela produirait en nous-même et de l'état dans lequel ils seraient.
-Ont-ils des états d'âmes?

- Bien entendu, mais ces états influent peu sur leurs décisions.
- Alors que craignez-vous?
- Je ne peux pas vous le dire. Si, par mégarde, une part de ce que je vous dit était entendue, je crois que nous pourrions mettre fin à notre voyage et conséquemment à la mission que je suis en train d'accomplir.
- Pour ce qui est de mon entendement, je ne suis pas sûr que cela changerait grand-chose mais je suis surpris, j'étais presque certain que vous avez laissé tomber cette quête que vous aviez l'air de trouver vaine.

samedi 30 mai 2009


- Mais alors que craignez-vous?
- Je crains de ne pas être cru.
- De qui? De moi par exemple?
- Je crains que les idées que recueillent les Émissaires prennent racines dans mon esprit.
- Ce que vous dites est bien étrange...
- Vous voyez...
- Comment cela pourrait se faire et pourquoi dites-vous qu'ils recueillent des idées. Comment font-ils? Je vois bien qu'ils regardent au loin et je vois pour ainsi dire la même chose qu'eux et je ne vois rien qui ressemble à une idée.
- Cela fait trois questions. Vous en rendez-vous comptes? Pour commencer, avez-vous une idée de la forme à laquelle correspond une idée?
- Je croyais que c'était à moi de poser les questions et je vous signale, au passage, que vous aussi vous m'en posez deux d'un seul coup. Quant aux idées la réponse est aussi simple qu'impossible. Une idée peut prendre une infinité de formes.
- C'est pourquoi la tâche des Émissaires est si difficile. Ils doivent faire un choix parmi l'infinité des formes que peuvent prendre les idées, celles qui seraient susceptibles de retenir l'attention.
- Il n'y a pas de difficulté à cela. Celles que qui sont susceptibles de retenir l'attention se manifestent par elles-même! Ce n'est pas un travail compliqué.
- Vous avez raison, mais la difficulté n'est pas là.
- Où est-elle alors?
- Elle est dans le fait d'être capable de maintenir l'attention en éveil de telle manière qu'ils puissent capter le fugitif instant où elles se présentent.
- Vous m'étonnez, chacun sait qu'il en existent des quantité innombrables.
- C'est précisément là que réside le problème. La plupart de celles qui se présentent ne sont pas de vraies idées... Elles en ont la forme... mais dans la forme il n'y a rien. C'est pourquoi les Émissaires ne font pas confiance à ce qu'ils voient.
- Et à quoi font-ils confiance?
- Faire confiance n'est pas vraiment juste. Ils écoutent. C'est avec leurs oreilles qu'ils observent, si je puis dire cela ainsi. Les Émissaires sont choisis pour des raisons très particulières. Il ne s'agit pas de capacités qu'ils puissent acquérir. On les a ou on ne les a pas.
- Est-ce que ces particularités ont un rapport avec leurs oreilles?
- Vous brûlez... Ils ont effectivement tous de grandes oreilles, mais cela ne suffit pas.
- Il faut qu'ils sachent les orienter.
- C'est cela aussi, mais cela s'apprend sans difficulté. Non, il faut aussi que leurs oreilles soient décollées et que l'une des deux soit placée plus haute que l'autre.
- Ce n'est pas un cadeau...

mardi 26 mai 2009

- Qui sont ces Émissaires? Est-ce qu'ils montent la garde?
- Rappelez-vous , si vous voulez des réponses satisfaisantes du point de l'ordre et de la chronologie, il ne faut poser qu'une question à la fois. Ce sont des hommes de notre cité qui ont été choisis et envoyés en mission par notre "Bienfaisant et quelques fois Bienheureux Bonpapa". Pour répondre à votre deuxième question, non, ils ne montent pas la garde. Ils se contentent d'observer et émettent des avis lorsqu'une demande leur est faite.

- Quelles sortes de demandes peut-on leur faire?
- Il n'y a pas de limites aux demandes qui peuvent leur être présentées. Il n'y a de limites que dans les réponses qu'ils peuvent donner.
Le principe qui les dirige et auquel ils sont soumis est que les questions qui sont posées contiennent plus que les réponses qu'ils donnent. Ainsi parlent-ils peu.
- Mais alors, pourquoi les craignez-vous?
- Ce ne sont pas les Émissaires que je crains.
- Pourquoi faut-il que vous me répondiez aussi succinctement et que je doive vous questionner sans relâche alors même que mes questions me semblent prévisibles?
- Vous ne m'avez pas écouté attentivement. Ce que je vous ai dit à propos des Émissaires est aussi valable pour moi.
- Seriez-vous un des leurs?
- Ce n'est pas ce que j'ai dit.

lundi 25 mai 2009


- Qui sont ces gens qui nous observent?
- Ce sont des Émissaires.

- Que font-ils?
- Ils nous attendent, je le crains.
- Pourquoi le craignez-vous?
- Parce qu'ils ne me disent rien qui vaille.

samedi 23 mai 2009


- Quelle que soit votre point de vue, je crois que vous vous trompez. Je vous l'ai déjà dit, j'ai des doutes et si je vous suis ce n'est pas par obéissance. Il se peut que ce soit pour savoir si l'existence de ces doutes a quelque fondement. Je suis de plus en plus certain que ce à quoi vous faites allusion n'existe guère que dans votre imagination.
- Etonnant. Vous m'étonnez constamment. Jamais je n'aurais soupçonné de telles pensées chez un être tel que vous. Le plus surprenant étant que, d'une certaine façon, étrange à mes sens, vos pensées rejoignent les miennes.
- Il se pourrait que ce soit le contraire!
- Je ne comprend pas.
- Il se pourrait que vos pensées rejoignent les miennes.
- C'est bien ce que je disais.
- Ne faites pas l'enfant et hissez-vous à mon niveau. Je vous suis inconnu...

vendredi 22 mai 2009

- Je dois vous dire que ce fut un choc pour moi que de sortir de l'espace protégé dans lequel je vivais. Je n'avais pas été vraiment formé pour cela. La vue de ce vaste monde qui s'ouvrait devant moi me paralysait. Le peu que j'avais pu en voir à travers certaines ouvertures n'avait pas suffi pour que je puisse m'en faire une réelle idée et surtout jamais je n'avais eu l'occasion de voir notre cité de l'extérieur.

mercredi 20 mai 2009

- Venez, il est temps de nous mettre en route.
- Où allons nous?
- Je vous l'ai déjà dit, vous le savez fort bien.
- Mon problème est que depuis lors un doute a germé dans mon esprit et ce qui me paraissait fort clair ne l'est plus maintenant. Il s'est mêlé à ma certitude, une idée toute autre qui lutte de manière incessante avec la première.
- Cessez de penser, suivez-moi et écoutez-moi. Je vous raconterai en cheminant.


- Voyez comme je suis plus rapide que vous. Cela me donne tout loisir de questionner. Pensez-vous que, lors de votre découverte, le temps que vous passiez à dégager ce pourquoi vous œuvriez l'influençait encore.
- Je ne comprends pas bien le sens de votre question.
- Pensez-vous que le fait de creuser modifiait la forme de ce que vous mettiez à jour?
- Immanquablement. Il arrivait souvent qu'un petit morceau, libéré de la pression de sa gangue de sable, tombe et se mêla à la montagne de sable que nous emmenions au loin.
- Pensez-vous que sans vous, cet œuf dont vous m'avez parlé, n'existerait pas.
- C'est effectivement ce que je pense.
- La forme de cet œuf est donc aussi la conséquence de vos pensée et de vos actes réunis.
- D'une certaine manière, mais dans les limites d'une faible proportion.
- À quoi pensiez-vous quand vous creusiez?
- Au début, je ne pensais à rien et puis, peu à peu je me suis mis à penser à ce que pouvait penser Anarchasis.
- Et que pensait-il de son côté ?
- À la même chose que moi.
- C'est-à-dire?
- À ce que je pensais.
- Vous aviez donc des pensées communes...
- Il se peut que l'on dise cela , mais je n'en suis pas si sûr.
- Pourquoi.
- Parce que l'on ne peut être certain que les pensées de quelqu'un soient précisément celles qu'il dit avoir.
- Aviez-vous des doutes sur vos propres pensées?
- Non.
- Parlez-moi un peu de cette colonne. Et puis, surtout, expliquez-moi pourquoi je me suis mis à penser que vous l'aviez , en quelque sorte, inventée. J'ai l'obscur sentiment que vous me cachez quelque chose.
- Vous avez raison. Mais n'en est-il pas toujours ainsi. Qui peut dire en un instant l'entier de ses pensées. Regardez avec quelle impatience vous exigez d'accéder à cet entier, indépendamment de sa grandeur.
- Je me dois de reconnaître une part de vérité dans ce que vous dites, mais cette part de vérité me dit aussi qu'elle en cache une autre et que ce fait ne me semble pas être fortuit.
- Bien, lorsqu'il a retrouvé la colonne, Anarchasis n'était pas seul...
- Vous étiez avec lui.
- Vous avez raison, mais si je me dois de vous exprimer mes sentiments d'admiration pour votre perspicacité, je dois aussi vous prévenir contre tout emportement qui ne ferait que freiner le récit. S'il existe nombre d'esprits tourmentés, difficiles à comprendre et plus encore à saisir, il n'en faisait pas partie. Anarchasis était un être simple et sa vie l'est aussi. La seule étrangeté qui puisse lui être attribuée est justement cette simplicité. Ainsi il ne me fut guère difficile de le retrouver dès le moment où je reçus l'ordre de le faire. Il suffisait de penser simplement, comme lui. À peine fermais-je les yeux que le flot de ses pensées jaillissait en moi comme une source limpide et lumineuse. Il me suffisait de suivre le courant et en quelques jours, sans grand effort, je l'avais trouvé. Mes pas me guidaient sans l'ombre d'une hésitation. Il était debout au milieu d'un cercle de pierres et regardait fixement le sol. Sans me jeter le moindre regard, il me dit:
- "C'est là. D'infinies richesses gisent ça et là, insoupçonnées et immobile. Emprisonnées dans les entrailles de la terre, leurs esprits puissants nous invitent à les rejoindre. Si chaque chose est à sa place, c'est ici qu'il nous faut creuser."
Vous imaginez quel était ma surprise. Je ne savais pas ce qu'il entendait par là, mais je me mis à creuser avec lui. Nous ne parlions pas. Le seul bruit que nous entendions était le bruissement du sable qui filait entre nos doigts et le souffle du vent. Il nous fallut plusieurs jours avant que le sommet de la colonne nous apparaisse. Nous nous gardions bien de la toucher. Nos mains creusaient à peu de distance et le sable se détachait de lui même. Si nous pouvions revoir les images accélérées de ce mouvement, nous verrions alors cette œuf gigantesque émerger littéralement de ce désert de sable. C'est peu dire que ce désert ressemblait à un mer sur laquelle nous marchions. Derrière nous une immense vague, objet de notre labeur sur laquelle le vent s'obstinait, nous regardait de plus en plus haut. Bientôt nous n'eûmes plus qu'elle pour tout horizon. Ce que nous dégagions il nous fallait le porter au delà de cette montagne qui menaçait, sous l'effet du vent et de sa grandeur, de s'effondrer sur nous et qu'ainsi nous rejoignions dans l'éternité ce que nous voulions libérer.

mardi 19 mai 2009


- Pourriez-vous me dire simplement ce que faisait Anarchasis ?
- Il était chargé de retrouver les fondations de notre cité.
- Comment le savez-vous?
- Notre "Bienaimé Souverain" me l'a dit lors de notre deuxième entretien.
- C'est pour cela que vous me parliez de telles profondeurs... et je suppose que c'est justement là que prennent appuis ces colonnes dont vous essayez de me faire part. Je commence à comprendre.
- Vous progressez. Dans peu de temps, je crois que nous pourrons nous mettre en marche.
- Et où irons-nous?
- Je crois que vous le savez déjà.
- Anarchasis a-t'il réussi dans sa mission?
- Oui, et même au-delà.
- Cet "haut-delà" est-il la cause de votre propre mission?
- Vous progressez vraiment.
- Voulez-vous me dire à quoi ressemblait cette colonne originale?
- Je veux veux bien, mais il faut que je vous dise que lorsque Anarchasis l'a découverte, il n'en restait qu'un bien petit vestige. Mais la particularité de ce vestige, usé par les catastrophes, les embruns,
les emprunts surtout et le temps, était sa forme suggestive...

lundi 18 mai 2009


- J’essaie de vous comprendre. Je crois et je crois même que je m’y efforce avec grande conviction. Mais il est vrai que je ne suis pas ce que vous êtes. Pardonnez-moi de vous le dire crument, mais il est vrai que les hommes me sont toujours apparus comme des êtres sournois et égoïstes. Malgré l'amour que je vous porte, vous êtes, il me semble, très soucieux de dissimuler vos croyances et plus encore cette vaniteuse et égoïste croyance en vous-mêmes. De plus, vous me parlez avec une hauteur de point de vue qui me semble peu compatible avec le but qu'il me semble que je puisse discerner au travers de vos confuses et hésitantes descriptions de ce que vous appelez "réalité". Mes exigences sont modestes. Si j'insiste avec force et conviction, c'est , en partie, pour vous-même. J'essaie, assez vainement pour le moment, de faire en sorte que vous mettiez un peu d'ordre dans vos pensées de telle manière que je puisse, puisque telle est ma destinée, vous accompagner pas-à-pas et pieds contre pieds. Quittez, pour l'instant, vos sombres pensées et dites- moi ce que sont ces colonnes qui y ont pris une telle place.


- Vous m'étonnez, je dois vous le redire. Et puisque vous désirez si ardemment comprendre ce que sont ces colonnes, je vais m'efforcer de vous le faire comprendre. Mais d'abord, j'aimerai vous exprimer ma surprise de voir à quel point vous confondez ce que je vous raconte et la forme que "tout cela" peut avoir. Dans votre façon singulière de voir les choses, la noirceur des images correspondrait au voyage que j'ai fait et que je vous rapporte. Cela est faux, et si je vous parle de telles profondeurs, c'est justement que c'est là que prennent appuis ces colonnes dont vous entendez l'histoire.
« J’essaie de comprendre. Je crois que je m’efforce d’aimer.
Il est vrai que je ne suis pas ce qu’on appelle un optimiste.
L’optimisme m’est toujours apparu comme l’alibi sournois des égoïstes,
soucieux de dissimuler leur chronique satisfaction d’eux-mêmes.
Ils sont optimistes pour se dispenser d’avoir pitié des hommes, de leur malheur.»


Georges Bernanos, Les Grands Cimetières sous la lune
Librairie Plon, Paris, 1938, p. 24.

dimanche 17 mai 2009

samedi 16 mai 2009


- Dites- moi, que s'est-il passé au moment où vous avez aperçu votre Monarque ?
Il me semblait que vous m'aviez laissé entendre que vous aviez été arrêt
é.
- Je vous l'ai dit, ce que j'avais pris pour des sculptures se mit en mouvement et un instant plus tard, autour de moi, ne régnait plus que fureur et vociférations. Je ne voyais, pour ainsi dire, plus rien. Une chute vertigineuse nous emportait dans les profondeurs de notre cité. Je n'avais aucunement imaginé combien celle-ci eut pu m'apparaitre sous une forme des plus ruinée. Un amoncellement de gravats et de poussière où une lumière blafarde peinait à se frayer le moindre chemin.

Je n'étais pourtant pas au bout de surprenantes découvertes. Tenant au bout de son bras un long drapeau rouge, éclatant, le gardien m'est apparu.


Je n'eus que peu temps pour voir les bas fonds de ma chère cité. Avant que l'obscurité ne m'aveugle, j'ai pu à peine les distinguer.

vendredi 15 mai 2009


- Que sont ces colonnes sur lesquelles on peut voir toute cette agitation dont vous parlez?
- Ce sont précisément les constructions préférées des habitants de ma cité.
- D'où viennent-elles?
- Ce sont eux qui les construisent.
- Si je comprend bien, il se pourrait que chacun construise sa propre colonne...
- C'est exactement cela. Vous me surprenez. Comment l'avez-vous deviné?
- Je n'ai pas grand mérite. Depuis peu, en fait depuis que je vous ai rencontré, il me semble que la réalité à laquelle je m'étais attaché se fissure lentement.
- C'est justement ce qui s'est passé pour les colonnes de l'enceinte interdite...

jeudi 14 mai 2009


- Vous ne m'avez pas dit ce qui s'est passé lorsque vous avez aperçu votre Monarque à la fenêtre de ses appartements.

- Aujourd'hui encore, je suis ému lorsque j'y repense. Je croyais que j'étais seul dans l'enceinte interdite, mais lorsque la lumière de notre "Vénérable et Bienaimé Bonpapa" s'est répandue, je vis d'imperceptibles et furtifs mouvements qui animaient les colonnes alentours. Ce que j'avais pris pour des sculptures se mit en mouvement et un instant plus tard, autour de moi, ne régnait plus que fureur et vociférations.

mercredi 13 mai 2009


- Est-ce l'effet de la nuit? Je n'en crois pas mes yeux et j'ai beaucoup de peine à comprendre les images qui s'y forment!

mardi 12 mai 2009


-Alors, que vois-tu ?
- Je n'y vois bientôt plus rien, mais je les entends.
- Que disent-ils ?
- Ils parlent des plumes de leur "Illustre et vénérable Bonpapa". Ou plutôt d'une de ses plumes si j'en crois l'homme. Ce qui me surprend c'est plus la nuit s'installe et mieux j'entends. Ce qui me surprend encore plus, c'est que, finalement je ne vois pas moins bien qu'avant, au contraire. Je vois l'homme qui porte la plume dans ses mains. On dirait que les images se forment à partir de ce qu'ils disent. Comme si le monde n'était qu'un reflet. Le reflet de leur dialogue.

lundi 11 mai 2009


- Je suis ravi. En voilà une belle histoire. Pourquoi ne pas en raconter une autre et une autre encore au lieu de vous perdre dans des détails que, je dois vous l'avouer, me fatiguent un peu et que j'ai peine à relier.
- Voilà. Si je vous ai raconté cette histoire, c'est justement pour qu'un certain nombre d'éléments épars se réunissent et forment un tout indissociable sans que pour cela tout le monde ait à savoir qui ou ce qu'elle concernait. Et puis c'était à mon tour de vous dire ce que m'a raconté notre "Illustre Monarque" lorsque, finalement je l'ai rencontré.

- Me voilà bien surpris. Je pensais que vous alliez être surpris, jugé et puni pour votre conduite téméraire à laquelle, je le répète, je n'ai rien compris.

- Patience , je vais tout vous raconter si vous m'en laisser le temps. Mais il m'a semblé nécessaire d'éclairer cette histoire par une source qui puisse vous surprendre et vous fasse, par ce moyen, reconsidérer les mêmes phénomènes, mais sous un jour nouveau.

- Dites-moi comment est cet "Ilustre et Bonpapa Monarque".


- C'est un homme en tous points semblable à moi-même mais qui la particularité de porter une tête naturellement couronnée et qui possède, dans le dos, de très longues plumes qu'il manipule avec grande adresse. Lorsque je l'ai vu la première fois, il était assis sur un trône juché en équilibre sur le sommet d'un œuf gigantesque posé sur le petit bout. Il tenait à la main gauche un sceptre dont je ne parvins pas à connaître s'il s'agissait d'un vrai serpent à deux têtes ou d'un ornement sculpté dans une branche souple tant le mouvement de l'ensemble était constant.
Ne croyez surtout pas que notre "Bienveillant et Doux Bonpapa" ait été déséquilibré ou agité. Il ne faisait que "réagir" à ma présence.

dimanche 10 mai 2009

C'était il y a quelques jours. Ils restent présents dans mes pensées comme des images miroitantes, apparaissant et disparaissant au gré du vent. Ce matin-là, comme souvent, je suis allé promené mon chien. Nous sommes allés rendre visite aux chevaux d'une ferme voisine, à moins d'un kilomètre d'ici. Le ciel était gris. Pourtant, ce gris n'était pas triste. Il enveloppait plus qu'il ne menaçait. Une grisaille plutôt sombre mais dans laquelle les couleurs pompent un peu de lumière qui les nourrissent. Au loin les oreilles des chevaux sont depuis longtemps dressées. Ils regardent placidement venir à eux ces formes d'un autre monde. Le monde qui est au-delà de l'enclos. Arrivé à la barrière, le chien cesse de virevolter et s'assied à mes pieds. La mère et son petit s'éloignent sans hâte jusqu'à ce qu'une distance suffisante se soit établie.


La mère s'est postée devant, la tête bien haute, les narines frémissantes, les oreilles pointées vers nous et ne bouge plus. Le poulain, légèrement en retrait nous regarde aussi, mais avec un peu moins de sérieux. Nous sommes immobiles, mais ce n'est pas une immobilité figée. Je prends garde à mes mouvements, je fais en sorte qu'ils soient naturels et qu'ils s'inscrivent dans une suite prévisibles dans laquelle tout surprise est exclue, mais je ne cesse pas de bouger, ni de respirer. Nous existons. Je sais aussi que je ne suis pas le principal objet de leur curiosité. C'est le chien qui les intéresse d'abord.
La jument a repris le cours normal des chose. Elle broute calmement en marchant avec lenteur. Le poulain la suit sans s'éloigner d'elle. Il nous regarde par intermittence pendant que sa mère feint de nous ignorer. Leur marche les éloigne de nous. J'attends sans impatience.


Brusquement le poulain se met à galoper. Un galop puissant, une chorégraphie brute et brève qui se termine abruptement par une volte-face en forme de ruade.


Puis, aussi rapidement qu'il s'était élancé, il reste planté sur ses quatre pattes trop grandes pour lui et encore tremblantes de l'effort fourni, inconnu jusqu'alors.
J'admire l'ordonnance et l'éclat de son pelage. Un brun rouge foncé à l'éclat sauvage qui s'assombrit en un noir profond à chacune de ses extrémités. Lui, semble surpris, regarde et hume ses jambes indécises. Le galop reprend, plus long. Il tourne autour de sa mère qui se prend au jeu. Ils viennent dans ma direction. La mère accélère et dévie la trajectoire. Le sol tremble. Je sens mon cœur qui bat. Ils s'éloignent à nouveau.

Le poulain, à nouveau tremblant s'agenouille et se couche. Au milieu des herbes à demi-hautes, sa tête tourne sur elle-même. Il regarde avec patience et une intense curiosité toutes ces herbes qu'à coté sa mère est en train de manger. Il renifle, s'imprègne et mémorise sans peine ce qu'il croit ne pas connaître encore. Un petit rayon de soleil s'est frayé un chemin jusqu'à nous.

À l'extrémité de chaque brin d'herbe et de chaque feuille une petite goutte de rosée s'est formée qui scintille de mille feux. Mille regards en lesquels le ciel s'est refermé et dans lesquels il peut se voir. Miroirs de perles dansantes, galaxies infinies apparaissent et disparaissent en un instant. Le petit cheval s'est relevé et galope à nouveau en des cercles ouverts et fermés. Très vite fatigué et légèrement tremblant, il se presse contre le flanc gris léger, presque blanc, de sa mère. Il s'appuie sur le ventre chaud, sa tête se tend et cherche à rejoindre le pis nourrissant. La jument, dans un geste parfait, contracte sa puissante jambe postérieure et l'avance dans le même temps que son poulain avance son museau. Surpris et docile, il devra attendre et relève la tête. Alors la jument fait un mouvement inverse, sans cesser de brouter, elle recule avec précision son train arrière, plante fermement son sabot dans la terre, laissant libre le passage par lequel le nouveau-né vient se rassasier.
Heureux le cavalier qui saura retrouver l'aisance, la puissance subtile et la douce fermeté de ces gestes conciliants.
Nous repartons heureux. Moi, pour ce que j'ai vu et mon chien pour ce qu'elle voit. Elle reprend ses folles gambades et folâtre dans un monde qui m'échappe. Derrière nous les oreilles se redressent.

samedi 9 mai 2009


- J'étais presque certain d'être le seul à observer le halo de lumière qui émanait de sa chambre si ce n'est de lui-même. Je l'imaginais, méditant pour le bien de notre Haute et belle cité. Cette situation avait fait naître en moi une sorte de lien personnel entre lui et moi. Je savais fort bien que ce que je faisais était proscrit. Aucun de nous n'avait le droit de jeter un regard sur la vie privée de "Notre Grand et Sage Bonpapa". À cette pensée, je fus pris par un sentiment confus où se mêlait la honte et la curiosité, je baissais le regard. Cependant je crois qu'à ce moment-là, malgré l'interdit qui taraudait mon esprit, je ne pouvais m'empêcher de souhaiter ardemment qu'il parut à sa fenêtre. Conscient du danger qu'il y avait de rester où j'étais, je me mis à contourner le palais et j'arrivais bientôt face à la façade située au Levant. Au loin, déjà, quelques oiseaux chantaient. Le jour n'allait pas tarder à se montrer.
Quand je regardais à nouveau en direction de ses appartements, je vis une ombre qui regardait par la fenêtre.
Mon vœux était exaucé. J'étais ému de partager un peu de l'intimité de ce grand personnage et je me mis à trembler. Je ne sais pourquoi, il me semblait incarner une solitude que je croyais être le seul à posséder. J'eus l'audace de penser que nous nous ressemblions. Ce qui était absurde tant nous étions différents de corps et surtout de fonction.
J'eus très vite la certitude qu'il me voyait, lui aussi. Mais très, j'eus le sentiment qu'il n'était pas le seul à m'avoir vu.

- Dites-moi, une petite chose me perturbe et m'empêche d'être tout entier consacré à mon récit. Il me semble, si j'en crois ma mémoire, qu'il fut un temps où vous étiez trois à m'avoir rejoint et je ne les vois plus.
- Vous me surprenez encore, Anarchasis. Je ne sais pas de qui vous parlez, mais redonnez force et vigueur à votre mémoire et expliquez-moi ce que construisent toutes ces personnes qui habitent votre cité.
- De fait, je me rend compte qu'il m'est difficile de le formuler. Il faudrait , pour que cela soit compréhensible que je vous explique ce qu'ils devraient construire.
- Et non ce qu'ils construisent vraiment, c'est cela?
- On peut dire que c'est en partie cela. Mais ne vous leurrez pas, quelque soit l'angle par lequel nous allons envisager la chose, elle se montrera plus complexe que vous ne l'imaginez.
- Je suis bien obligé de le savoir et il me tarde d'y voir plus clair.
- Voilà, je vous ai dit que nous étions un peuple de constructeurs. C'était bien vite dit et extrêmement réducteur. Pour commencer, je ne suis pas sûr qu'il est possible de dire que nous sommes un peuple.
- Il serait préférable de parler de famille si j'en crois le titre que vous attribuez à votre roi.
- Il n'est pas un roi.

vendredi 8 mai 2009



- Je crois que nous avons fait le bon choix, avait dit notre "Bon, Loyal, Puissant et Bienaimé Bonpapa".
- Je n'avais aucune idée de ce qu'il voulait dire par ces mots, mais je tremblais moins. Du coup mes mouvements se firent moins désordonnés et la plume, comme mue par sa propre volonté, vint se poser délicatement sur mes deux mains tendues. Quelque chose dans son regard me disait que nous allions faire cause commune. Quelle serait cette cause, je n'en savais encore rien du tout. Curieusement cela ne m'inquiétait pas le moins du monde.
- Je vois que vous avez fait connaissance, dit notre "Perspicace et Plaisant Souverain Bonpapa".
- C'est à peine si je l'entendais. Mes yeux étaient rivés à cet œil que je tenais entre mes bras. Exactement comme je te tiens maintenant.
- Vous allez trop vite, Anarchasis. Je vraiment pas compris ce que font le habitants de votre cité. Vous m'avez dit qu'ils construisaient beaucoup, mais je n'ai pas compris ce qu'ils construisaient.
- Nous sommes un peuple de constructeurs et notre belle cité d'En-haut s'élève constamment grâce à cela. Le problème, conséquemment au changement qui est intervenu dans le psychisme de ses habitants, est que dans le même temps qu'elle s'élève, elle s'effondre.
- Je ne comprends pas.
- Je le comprend. Il ne faut pas oublier que cette belle et vertigineuse cité a pour fondation lointaine un endroit tel que celui sur lequel nous sommes assis tous les deux.
- Vous plaisantez.
- Nullement. De ce fait, il en découle qu'un soin particulier doit être accordé à nos fondations. Or du fait même de son élévation, la plupart des gens ignorent totalement ce que je viens de vous dire. Quand, par un hasard des plus inconstant ils en apprennent quelques bribes, ils n'en croient rien et continuent l'œuvre de leur vie sans y prêter attention.
- Comment l'avez-vous connu ?
- Par le plus grand des hasards. Ma fonction consiste à répertorier, à dater, consigner et donner sens aux œuvres de mes concitoyens.
- Vaste programme...
- Ne soyez pas si futile, vous ne savez encore pas grand-chose.


- Dans la cadre de mes fonctions, j'avais accès à des passages, tenus secrets, qui menaient dans l'enceinte du "Saint Dessein". C'est là que réside notre "Bon et Vénéré Omnipotent".


jeudi 7 mai 2009

Je me suis mis à la rédaction des Vies pour rendre service aux autres ; mais si par la suite, j'y ai persévéré et même avec complaisance, c'était dans mon intérêt. L'histoire me présente, comme en un miroir, les vertus des grands hommes, auxquelles je m'efforce de conformer ma vie pour l'embellir. Accueillir à tour de rôle chacun de ces modèles et lui donner l'hospitalité de l'histoire, n'est-ce pas l'équivalant d'une liaison intime ? On peut ainsi contempler leur grandeur et apprécier leurs qualités en prenant dans leur activité, pour arriver à les bien saisir, les traits les plus importants et les plus beaux.
- Hélas, hélas quel sujet plus grand que celui-ci pourrais-tu trouver ?
Et aussi, quoi de plus efficace pour redresser le caractère ? Car si Démocrite affirme que qu'il nous faut souhaiter d'avoir des images heureuses et de recevoir de l'atmosphère les représentations les mieux adaptées à notre naturel et les meilleures, au lieu de des visions mauvaises et sinistres, la théorie qu'il introduit ainsi dans la philosophie est fausse et conduit à des superstitions infinies ; nous, au contraire, par notre commerce avec l'histoire et l'habitude de l'écrire, nous nous rendons capable de recevoir toujours dans notre âme le souvenir des hommes les meilleurs et les plus illustres.

Plutarque, Vie de Timoleon



- Anarchasis, pourquoi sommes-nous ici à converser plutôt que de marcher à la recherche de votre ami?
- De qui parlez-vous ?
- De celui que vous recherchez.
- Ce n'est pas mon ami.
- Ah ! Ainsi j'avais raison, vous poursuivez quelqu'un. Qui est-il?
- Un homme illustre et peut-être le meilleur des hommes.
- Pourquoi s'est-il enfui et pourquoi le recherchez-vous ?
- Parce que j'aimerai lui poser une question.
- Vous ne répondez qu'à la moitié de la question.
- Il serait plus juste de dire qu'il ne s'agit pas d'une mais de deux questions.
- Alors, la réponse à la deuxième.
- C'est la même.
- D'où venez-vous ?
- Qui ? Moi ou lui ?
- Vous d'abord.
- Je viens de la cité d'En-Haut.

- Où est-ce ?
- Très loin d'ici, près de Là-bas.
- À quoi ressemble-t'elle ?
- À tout et à rien.
- Et lui ?
- Il vient d'Ici.
- Je ne comprend pas.
- C'est normal. Vous ne pouvez comprendre.
- Dites-moi quand même.
- Il se peut que cela soit long.
- Je vous en prie.
- Pour commencer, il faut vous imaginer que le monde dans lequel nous vivions ne ressemble en rien à celui dans lequel nous nous sommes rencontré.
- Vous parlez de lui et de vous ou de vous et de nous.
- Des deux. mais ne m'interrompez pas sans cesse. Notre ville est sacrée ou du moins considérée comme telle par ses habitants. Elle est en constante construction. Chaque jour chacun contribue à sa construction. Ainsi elle devrait s'étendre de plus plus en plus.
- Pourquoi n'est-ce pas le cas ?
- La ou plutôt les raisons en sont fort simples. Par un concours de circonstances malheureuse, une part du psychisme de ses habitants s'est transformée et qui, au fil du temps, a donné lieu à une sorte de malformation physique qui fit qu'ils perdirent certaines capacités pour en acquérir d'autres, fort néfastes. Pour comble de malheur cette disgrâce s'est transmise de génération en génération de telle sorte qu'elle est, aujourd'hui, considérée comme normale.
- Je brûle de savoir laquelle...
- Plus tard, laissez-moi vous dire l'essentiel pour votre compréhension. À la suite de certains événements de plus en plus éloignés de toute conformité aux usages en vigueur dans notre belle communauté, il fallut que le Grand Conseil se résolut à créer une fonction nouvelle qui devait aider à corriger ce qui pouvait l'être encore. Et c'est sur moi que le choix s'est porté pour exercer cette fonction.
- Vous ne m'avez pas encore dit quelle est cette fonction.
- Je fus nommé "Maître Fouettard".
- Vous voulez rire !
- Pas le moins du monde, mais vous m'étonnez.
- Pourquoi cela ?
- Parce que votre intuition est plus grande que ce que je croyais. Il se trouve que justement, nombre de nos fidèles, suite aux déformations dont je vous parlais tout-à-l'heure, se mirent à se prendre au jeu et se mirent à construire de plus en plus, avec un sérieux et un enthousiasme inimaginable. Ils construisaient avec une force et une abnégation telles, qu'en très peu de temps, ils avaient atteint une hauteur vertigineuse. Cependant ils avaient oubliés que notre ville avait été fondée au-dessus d'un marécage.
- Tout ne m'explique en rien le pourquoi de votre titre si bizarre.
- Il faut vous dire que notre "Grand Bon Souverain" qui nous gouverne avec régularité et justice porte dans son dos de grandes ailes formées de plumes innombrables et très longues qu'il peine à porter. Au bout de chacune de ces plumes un œil brillant vous regarde de telle manière que chacun de nous se met à trembler.
Je reçus, en tremblant et avec grande émotion, une de ses plumes qu'il avait arrachée de ses propres mains devant moi. À son invitation, je tendis mes deux mains en baissant la tête. J'osais à peine la toucher. Légère et soyeuse la plume ne fit que m'effleurer et s'envola joyeusement au-dessus de nos tête. Stupéfaites dans un premier, toutes les personnes présentes, oubliant peu à peu le cérémonial de rigueur dans ces cas-là, se mirent à gesticuler en tous pour tenter de recueillir cette plume que tous, dans un même sentiment, estimaient qu'elle ne devait point toucher le sol considéré comme impur. Tous ces mouvements n'eurent que deux conséquences, ils encourageaient le vol de la plume par les courants d'air qu'ils généraient et, chose plus surprenante, ils firent sourire notre Maître vénéré.
- C'est un bon présage, dit-il.

mercredi 6 mai 2009

Ainsi tout ce que la fréquentation du monde nous présente de vil, de méchant ou de grossier,
nous l'écartons et le repoussons en détournant notre pensée bienveillante et digne
vers les plus beaux des exemples.


Plutarque, Vie de Timoleon


- Et quels sont ces exemples ?

mardi 5 mai 2009

lundi 4 mai 2009





dimanche 3 mai 2009

"Le monde des brumes et du brouhaha"
(95)



« Un discours ayant persuadé un esprit
contraint cet esprit qu'il a persuadé
à croire en ce qui est dit et à accepter ce qui est fait »


Gorgias

- Pourquoi l'homme trace-t'il un cercle autour de lui-même ?
- Je ne saurais le dire et vous me faites peur...
- Cesse de trembler et répond sans crainte. Est-ce que l'homme est seul ?

- Non.
- Qui l'accompagne ?
- Deux ou trois de nos pareils.
- Que veux-tu dire par là ?
- Il a auprès de lui deux ou trois êtres semblables à nous-même.
- Ont-ils fait alliance ?
- Je ne saurai le dire. Je ne sais comprendre, je ne sais que voir et entendre.
- Sont-ce là des êtres qui nous ressemblent de loin ou...

- Ils ne nous ressemblent pas . Ils sont vraiment comme nous-mêmes. S'il existe des différences entre eux et nous, ces différences n'excèdent pas celles qu'il y a entre chacun d'entre nous et chacun des autres.
- Quels genres de relations ont-ils avec l'homme ?
- Ils le regardent avec une admiration sans borne.
- Que dit l'homme ?
- Je ne le comprends pas.
- Veux-tu dire que tu entends ce qu'il dit et que tu ne le comprends pas ou n'entends-tu rien du tout ?
- J'entends quelque chose que je ne comprend pas.
- Est-ce là l'effet de la distance ou plus encore ?
- C'est plus encore.

samedi 2 mai 2009

"Le monde des brumes et du brouhaha"
(94)


- Que fait l'homme ?
- Il promène son bâton dans l'eau.
- Regarde mieux ! Il doit avoir une raison pour faire cela.
- Vous avez raison, il trace un cercle tout autour de lui...

vendredi 1 mai 2009

"Le monde des brumes et du brouhaha" (93)

Si, par un heureux hasard, on trouve enfin un système plus vrai et plus probable, qu'importe de savoir en quoi tous les autres sont défectueux ?


M. Bergier, Préface à "L'origine des dieux du paganisme "(1767)



- Je vois au-delà de l'horizon, mes frères. Que c'est beau de là-haut!
- Cesse de rêver et parle utilement que tous puissent comprendre !
- Nous nous trompions, le soleil ne se jette pas dans l'eau. Il continue sa cours bien plus loin que nous ne le pensions et les vagues qui nous parviennent ne sont point le résultat de son immersion.
- Mais encore...
- Je vois une tache floue qui se déplace lentement dans la lumière aveuglante. Je crois que c'est l'homme.
- Ne te moque pas de nous ! N'oublie surtout pas que ta position dépend de la notre. Réfléchi à ce qui t'arriverait si la plus légère défaillance arrivait à l'un de nous...