mardi 31 juillet 2007

Antio Pavlos*


Je ne sais d'où vient le pont, ni où il mène, mais tous nous y marchons...

- "Sur quel rivage, écrit Francesco Sassetti, la Fortune nous fera accoster, je l'ignore, en voyant les bouleversements et périls où nous sommes et hors desquels "on" veuille nous conduire jusqu'au port du salut. Mais quel que soit mon sort, j'ordonne et j'exige, si vous voulez que je parte content, que vous ne refusiez sous aucun prétexte de revendiquer mon héritage, et même si je devais vous laisser plus de dettes que de bien, je veux que vous viviez et mouriez sous la même Fortune, parce qu'il me semble que tel est votre devoir. "
Marsile Ficin, pourrait lui répondre :
- "Il est bon de combattre la Fortune avec les armes de la patience et de la magnanimité; mieux de se retirer et de fuir une telle guerre, dans laquelle seul le plus petit nombre est victorieux, et ce au prix de fatigue d'esprit et de pénibles efforts. Le mieux est de faire la paix avec elle et de passer trêve en conformant votre volonté à la sienne et d'aller de bon coeur où elle nous envoie, afin qu'elle ne nous y envoie pas de force. Nous ferons tout cela si s'accordent en nous la patience, la sagesse et la volonté."


* "On passe sa vie à dire adieu à ceux qui partent, jusqu'au jour où l'on dit adieu à ceux qui restent."
Véra de Talleyrand-Périgord

lundi 30 juillet 2007

L'ouverture


C'est avec de grandes précautions que Marcel, l'ébullition de l'esprit à peine contenue, ouvre le grand livre. Celui grâce à qui, pense-t'il, l'ensemble des diverses communautés du monde pensant retrouvera un sens : celui de l'unité de toutes choses.

dimanche 29 juillet 2007

L'éternel recommencement


Ayant chargé le grand livre sur son dos, Marcel s'émerveille de le trouver si léger. C'est d'un pas sautillant qu'il couvre la distance qui le sépare de sa première épreuve.
- Il commence à faire chaud, trop chaud...
Il fait en sorte que le livre lui serve de parasol, cependant cela ne suffit pas.

Ordre et nécessité


Fort heureusement, notre héros, bien malgré lui, garde une partie de ses esprits. Dans sa poche droite se trouve l'objet réglementaire numéro 11 : une ficelle de 3,14 m. Le chaos n'est pas encore maître chez lui.

L'affrontement


Une ombre s'approche porteuse des plus obscures pensées.
- La lumière ne tardera pas à éclairer mes emportements et le désordre qui en découle !
Le fauteuil, figure emblématique de la fonction, est renversé...

samedi 28 juillet 2007

Efficacité redoutable


Dans un brusque mouvement incontrôlé mais avec une efficacité redoutable, il referma le livre tout en se tordant de telle façon qu'il s'y appuie de tout son poids.

Transcendance irrationnelle


Une voix se fit entendre qui lui fit faire un bond conséquent en arrière. Face à celui qu'il ne pouvait connaître, il eut un geste inattendu...

Soulèvement crânien


Ce jour, malgré la jeunesse relative de notre préposé, c'est de façon certaine qu'un nouveau phénomène est éprouvé. Ce ne sont pas seulement les plaques crâniennes en mouvement qui se soulèvent, mais la tête tout entière, entraînant au passage une grande partie du corps avant que celui-ci ne se fige, stupéfait, dans une position des moins orthodoxe.

Langage articulé


C'est dans une position des plus surprenante que notre haut fonctionnaire se met en devoir de comprendre ce qui ne peut s'appréhender sous les auspices d'un certain savoir. Ce savoir n'est pas de mise. La moindre des suspicions peut lui valoir sa place. Il s'agit de mettre, non ses oreilles, pourtant conséquentes et plutôt efficientes, mais son cerveau, directement en contact avec le phénomène inexpliqué. Cela permet à la moindre vibration, de quelque nature soit-elle, de mettre en vibration les différentes plaques osseuses de son crâne. Lesquelles plaques, en vibrant, donnent à la manière du chant des criquets, une sorte de mélodie envoûtante, dont le rythmes forment un langage articulé fort intéressant.
Malheureusement cette position a plusieurs désavantages. Outre celui précité, il est susceptible d'être confondu avec une certaine somnolence. En ce cas, le prévenu opte de plaider coupable. En effet la peine sera, de très loin, sans commune mesure, avec celles infligées à celui qui serait reconnu coupable d'un "certain savoir".

Apparition


Par le plus grand des hasards, dans un société qui ne fait plus guère de place pour ce genre de manifestation, alors même que l'employé en charge de ces affaires délicates, allait apposer le tampon "classé" qui mettrait un terme à ses propres souffrances ainsi qu'à celles des ses collègues du comité éthique pour la raison initiale et le bon sens extatique, la "CERISE" pour abréger, il se produisit un fait des plus inattendu et fort redouté : une apparition. Elle fut tout naturellement d'abord considérée comme douteuse.
- C'est le résultat d'une tache d'encre, au mieux une chiure de mouche mal interprétée !

vendredi 27 juillet 2007

Morale, éthique et tac


Les profondeurs, de même que les hauteurs de la société des ânes arboricoles restent en grande partie méconnues ou incomprises de la plupart des analystes, ceux-là mêmes qui sont consultés en tant que spécialistes du monde animal. Des études empiriques concernant les structures de cette société sont inexistantes tant dans sa terre d'origine que dans l'ensemble du monde civilisé. Elles pourraient pourtant fournir un cadre d'analyse qui fait souvent défaut à l'information de nature journalistique, voire scientifique en passant par tant autres, sur cet espèce, sa société, ses rites et sa constante adaptation à notre monde si changeant. Une connaissance scientifique du "même et de l'autre" acquise par une observation systématique de faits quantitatifs et surtout qualitatifs, concernant la réalité sociale de ce pays, dont l'importance ne cesse de croître sur le plan de la morale et de l'éthique, s'avère plus que jamais nécessaire. Une première tentative eut lieu*, il y a quelques mois de cela, qui ne fut guère couronnée de succès. Nous espérons que ce nouvel essai, enrichi de faits nouveaux et inédits, pourra contribuer, aussi modestement que ce soit, à l'évolution morale et matérielle de l'homme et de la société.

*

Comme un volcan


Quand, la plupart du temps involontairement, son cerveau se met en marche, lui aussi, c'est afin d'éviter l'explosion. Et même, plus certainement, l'implosion.
- Je n'ai que faire de ces pensées "molles" qui sans relâche arpentent le labyrinthe comme le feu arpente les viscères de la terre !
Depuis sa plus petite enfance, il conçoit son cerveau comme un volcan sans cesse en éveil dont il craint les séismes.

Message à l'intention de Brigitte et Sashka

jeudi 26 juillet 2007

Nuits de grande solitude


Au loin s'avance l’idée intéressante qu’après une première période qu'il considère paresseusement comme mineure, notre marin simple d’esprit, profondément attaché au sentiment sournois d’illégitimité, revient sur ses pas. Or, même la plus petite parcelle de conscience nous dit qu'il n'y a guère de traces du moindre pas du plus grand des marins sur la plus petite des étendues marines.
Dans ses nuits de grande solitude, se parlant à soi-même, il disait de lui, pauvre lecteur trop appliqué, paraphrasant Henri Michaux :
« Il voyageait énormément, très vite et très mal. (...)
Voyageant comme il faisait, même un manuel de géographie, ou un plan du métro parisien, devenait une nébuleuse.
Et s’il se mettait à voyager lentement, voulant “retenir” : néant ! C’était comme s’il regardait des pages blanches. Mais il pouvait très bien refaire le voyage, du moment que ce fût vite. On conçoit cela aisément. Il formait ainsi une nouvelle, une autre nébuleuse. Et la sympathie venant du souvenir agréable le soutenait aussitôt. »
Loin des horizons temporels, sa propre parole lui paraissait si belle qu'il en oubliait presque tout.
- Je ne peux me contenir à penser que le verbe lire puisse remplacer le verbe vivre et qu'à son tour le verbe voyager remplace le verbe lire...

mercredi 25 juillet 2007

La taverne de Hadès


La veille, le marin avait quitté, à regret, la taverne de Hadès. Il marchait sans but précis sur la terre rouge de son enfance. Une terre calcinée par des siècles de lumière écrasante. Lorsqu'il se réveille, tout a changé. Il lui semblait avoir grandi. Le vent du large fouette son visage. Il descend de son arbre. Tout là-bas, l'eau, nimbée de lumière, danse. Il ne tarde pas à comprendre: il ne discerne rien de nouveau dans ce monde instable.
- C'est au loin que se trouve mon chemin.

mardi 24 juillet 2007

Où vas-tu ?


Se pourrait-il qu'il parle de la même porte que moi ?
Le doute m'envahit, ce ne peut être un langage de marin.
- Qui es-tu marin ? D'où viens-tu ? Où vas-tu ?
Le marin n'entend rien, il marche.

Je repensais alors à cet homme, un marin sans doute, un sac sur l'épaule, que j'avais vu débarqué sur un ponton au milieu de nulle part. Pourquoi pensais-je à lui ? Je crus l'entendre :
- Après que vous cessiez de rêver de voyages, une certaine sorte d'impulsion continue encore pendant longtemps à se conformer au déroulement ludique de votre pensée. Et il arrive souvent que celle-ci finisse par envahir totalement votre réalité et finisse par forcer la porte étroite que vous vous efforcez de fermer.

- Étant donné l'impulsivité inconsciente de ma conscience, source de plaisir et de chagrin, je fus obligé d'admettre qu'il existait également des rapports entre la présence et l'immatérialité, d'une part, et "des états de stabilité et d'instabilité, d'autre part, et de me prévaloir de ces rapports en faveur de l'hypothèse, à savoir que tout mouvement psychophysique dépassant le seuil de la conscience est accompagné de plaisir pour autant qu'il se rapproche de la stabilité complète, au-delà d'une certaine limite, et est accompagné de déplaisir pour autant qu'il se rapproche de l'instabilité complète, toujours au-delà d'une certaine limite, une certaine zone d'indifférence esthétique existant entre les deux limites, qui peuvent être considérées comme les seuls qualificatifs du plaisir et du déplaisir"... »
Joignant le geste à la pensée, je hissais la lanterne au niveau de mon regard et me mis avec force, vigueur et sagesse à observer la beauté du phénomène.

Malgré le fait évident qu'une image se formait dans l'ombre de la lanterne, je n'arrivais pas à la distinguer très nettement. En cherchant à décrire et à expliquer ce que j'avais sous les yeux, j'en arrivais à formuler une hypothèse hautement spéculative:
... chaque présence possède en elle-même une sorte de lumière qui sans le vouloir fait de l'ombre à son tour...
Je ne visais pas à l'originalité et, par ailleurs, les raisons qui m'incitaient à mettre ce principe en question étaient tellement évidentes qu'il n'est guère possible, à l'instar de la lanterne, de ne pas les apercevoir.

lundi 23 juillet 2007


Alors, mal debout, jetant à l'astre lointain le sable doré de l'ombre du falot, résonnent en ce lieu de vagues échos de l'autre monde incertain, celui d'où il vient:
"Et vous conquistadors navigateurs anciens
Hollandais téméraires et corsaires malouins
Cherchant des Amériques vous ne cherchâtes rien
Que l'aventure de la Toison d'Or

Et vous les philosophes vous sages d'Orient
Alchimistes pointus et sorciers d'à présent
En cherchant la sagesse vous n'avez rien cherché
Que les secrets de la Toison d'Or

Et vous les empereurs roitelets ou serins
Vous les vrais Charlemagne vous les faux Charles Quint
En cherchant la puissance vous ne cherchâtes rien
Que les reflets de la Toison d'Or

Et vous preux chevaliers assoiffés de grandeur
Vous chasseurs de Saint-Graal d'oriflammes d'honneurs
Cherchant la victoire vous ne cherchâtes rien
Que le panache de la Toison d'Or

Et vous tous les poètes les rêveurs mal debout
Discoureurs de l'amour pour des cieux andalous
En écoutant vos muses n'avez rien chanté d'autre
Que le vieux rêve de la Toison d'Or

Et vous gens d'aujourd'hui d'aujourd'hui de demain
Vous balayeurs d'idoles de dieux de malins
Cherchant la vérité vous ne recherchez rien
Que la clarté de la Toison d'Or"*

*Jacques Brel "le Paladin"


- Les mots, peu à peu disparaissent. Je ne vous entend plus.
- L'ombre dans la lumière grandit et se met en mouvement.
- Je tremble que cette nouvelle figure ne soit que l'effet d'un hasard.
Les deux inconnus s'éloignent quant au dialogue, mais dans les faits sont toujours côte-à-côtes, composant un défaut de suite que l'académie ne saurait approuver, mais ne sait y remédier. L'un prend dans sa main un peu du sable de l'ombre qui scintille sourdement. Malgré ses efforts, ses mains ne peuvent l'empêcher de s'écouler.

dimanche 22 juillet 2007


Quant aux arrangements relatifs à notre histoire, je sais bien qu'il n'est plus possible que nous restions ainsi en promiscuité, maintenant que notre passage est effectué. Je vous propose de nous donner partage du temps, de la moitié des mots et des images à chacun.
- J'aurais aimer vous accompagner plus longtemps.
- Mais vous sentirez que cela nous est impossible.
- Si vous considérez ce que le moindre pas peut coûter, et qu'avec un pas de côté, nous ne pourrions, sans la plus stricte observance, retrouver sens à notre passage. De plus, sans une rapide décision, nous resterions encore trop longtemps sans aller plus avant. Regardez, le soleil est au zénith et fait de l'ombre à ma lanterne.
- Je ne ressens aucune différence. Comment pouvez-vous être sûr que nous sommes de l'autre côté ?
- Cela n'a aucune importance.
- Mais encore...
- Notre désir et le silence des mots nous y font accéder.

Quand serons passé de l'autre côté ?
- Nous y sommes.
-Quand cela s'est-il passé ?
-Quand vous l'avez décidé.

samedi 21 juillet 2007


- J'hésite à quitter cette ombre pour cette lumière que je ne peux connaître. Je ressens ses effets et non ce qu'elle est.
- Mais ce pas personne ne veut le faire. Il faut que quelque chose le pousse à le faire.
- Votre parole est changée.
- La parole échangée, voulez-vous dire ?

vendredi 20 juillet 2007


- Je vous parle de notre histoire.
- L'histoire se déroule et ne nous appartient pas.
- Rien ne nous appartient.
- Excepté nous.

- À quoi pensez-vous maintenant ?
- Je me demande si nous ne risquons pas de nous retrouver à l'origine d'un mouvement qui pourrait nous échapper.
- Tout nous échappe constamment.
- Tout nous échappe et l'histoire reprend le dessus...
- De quelle histoire parlez-vous ?

- Au fond, je ne me souviens pas que vous m'ayez dit qui vous étiez.
- Je ne suis pas sûr que vous le vouliez.
- Cela me parait évident.
- Pourquoi alors, ne me l'avez-vous jusqu'à ce jour point demandé.
- Je n'y ai pas pensé.
- À quoi pensiez-vous?
- Finalement je pense très peu.

jeudi 19 juillet 2007


- Pas plus que vous...
- Comme il vous plaira.
- Je ne suis pas sûr que cela me plaise...
- Je ne crois pas que cela soit nécessaire.

- C'est bien là ce que je crains... Ne me laisser pas tomber ! Quand me rejoindrez-vous ?
- Tout de suite après.
- Êtes-vous en train de me manipuler ?
- Pas plus que vous.

mercredi 18 juillet 2007

lundi 9 juillet 2007


"Alors le sable retrouvera sa lumière pailletée, suspendue dans un temps lointain qu'elle dissémine pour toujours. Elle éclairera dans nos regards ce qui ressemble à des enfants sur la plage"...

- Et pourquoi donc ?
- Cessez de poser sans cesse des questions et préparez-vous à agir plus que de parler.
- Que dois-je faire ?
- Ce que vous pensez.
- Je ne sais que penser, pensa-t'il, contribuant par cette pensée à l'embarras de l'ensemble de sa pensée.
Pris par le bras et entraîné vers l'extrémité de la porte, il se laisse porter.
- Laissez-vous aller, il ne vous reste qu'un tout petit geste à faire et vous serez de l'autre côté. J'ai observé avec attention, rien n'est là qui ne soit à craindre.
- C'est précisément cette absence que je crains. Comment saurais-je que je suis de l'autre côté ?
- Je ne le sais pas. Tout y est semblable à ce que vous connaissez déjà et pourtant il se peut que tout vous apparaisse comme étant nouveau.

- Vous ne me tranquillisez guère.
- Ce n'est point mon intention.
- Quel est votre intention ?
- Je ne sais si je peux vous le dire.

dimanche 8 juillet 2007

- Je ne peux être tenu responsable de votre folie. Vous pourriez apprendre beaucoup d'elle.
- Que pourrais-je apprendre de la folie ?
- Plus que de raison...

Si l’erreur vit de la vérité, la vérité vit sa vie sans se soucier de l'erreur.
- Mais moi je ne veux pas devenir fou.
La vérité de l’erreur est erreur elle-même.
- Peut-être est-il déjà trop tard.
- Pourquoi dites-vous cela ? Alors même que vous savez très bien que ces paroles me rendent fou.

samedi 7 juillet 2007


- Je le sais.
- Comment pouvez-vous être sûr que ce voyage a eu lieu ?
- Je ne la saurais jamais et cela m'importe peu.
- N'avez-vous pas peur de devenir fou ?
- La question pourrait être inversée.
- Vous êtes fou !
- À votre façon d'envisager le monde, sûrement.
- Regardez, on dirait que l'eau se retire !

La foi est mère de l’idéal.
- Voulez-vous dire que si nous parvenions tous deux de l'autre côté, nous pourrions nous y rejoindre.
- Oui.
- Comment saurais-je si nous avons vraiment passé la porte ?
- Vous ne le saurez jamais.
- Mais alors comment pouvez-vous me dire que vous y êtes déjà allé ?

vendredi 6 juillet 2007

- Qu'y-a-t'il dans ces profondeurs ?
- Rien que nous ne connaissions déjà.

- Et comment cette porte s'ouvre-t'elle ?
- Il faut que des profondeurs surgisse une vague assez puissante pour que notre monde se retourne.

Sous ses pieds, une porte


 

– Je ne pourrai comprendre que si vous m'expliquiez avec un peu plus de détails. Pour commencer, où se trouve cette porte ?
– Elle est là, sous vos pieds.
– Voulez-vous dire que ce sur quoi nous vivons est une porte ?
– Oui.
- C'est impossible.
- Et pourquoi ?
- Parce qu'il est impossible de passer à deux. Le passage ne peut se faire que seul.

jeudi 5 juillet 2007


- La mémoire n'est pas formée que de mots et de pensées, mais aussi de gestes et d'émotions. Réveillez-vous ! Tout ce qui naît,n’apparaît qu’en vertu d’une hypothèse venue de son fond individuel et doit être pensé avant lui.
- Pensez-vous que nous pourrions tous deux passer la porte de cette chambre noire ?

- La mémoire accumule patiemment dans tous les recoins de notre corps le désir d’être partout chez soi.
- Vous voulez dire que, par exemple, dans mon petit doigt se trouverait une partie de mon histoire qui pourrait être la clef de mon bonheur ? Mais j'ai beau l'approcher de mon oreille, je ne l'entends pas.

- Comment pourrions nous savoir tout ce que nous sommes et l'embrasser d'un seul regard ? Comment pourrions rassembler dans une seule et unique image tous les gestes et les regards dont nous sommes, dès notre naissance, les acteurs autant que les spectateurs. Quel est le lieu de cette mémoire ?
- Se pourrait-il que ce soit cette porte que vous me dites avoir traversé ?

mercredi 4 juillet 2007


- Je ne crois pas que vous n'y voyiez rien partout ou nulle part . Je ne crois plus que nous puissions savoir l'entier de ce que nous faisons. Pour commencer, souvenons-nous qu'au fond de nous-même subsiste une petite part de l'homme que nous avons été. Nous ne sommes pas ce que nous sommes de toute éternité et à jamais... À tout moment nous pourrions redevenir ce que nous avons longtemps été.

- Je me demandais si vous m'aviez vu faire ce voyage. Si vous aussi, vous n'aviez pas traversé cette porte dont je vous ai parlé.
- Comment aurais-je fait cela alors que je n'y vois rien ?

- L'autre salon où je suis entré était aussi sombre que vous me le représentez aujourd'hui. Il m'était impossible d'y rien voir. Mes yeux, alors se sont fermés et miracle je vis alors, ou je crus voir. Ma main, comme la votre se tendit vers un verre posé sur une petite table de verre, elle aussi, et le corps froid s'est collé contre ma paume. J'étais ému lorsque vous me racontiez ce que moi-même j'avais vécu. On eut dit que le récit venait de moi.

mardi 3 juillet 2007


- Me demandez-vous si vous et moi sommes identiques ou si nous avons des particularités communes ?
- Pourquoi répondez-vous à ma question par une de vos questions ?
- Parce que je suis comme vous. J'éclaire mon passé à la lumière de ce que vous me présentez.

lundi 2 juillet 2007


- Lentement, les liens se défont et la chambre noire reprend ses droits. Cependant les images continuent de défiler comme si je les voyais. D'ailleurs je les vois. Je ne sais si d'autres les voient, mais moi je sais que je les vois. Je ne suis juste pas sûr que vous vous puissiez les voir de la même manière que moi. Dites-moi, vous qui semblez me voir, est-ce que je vous ressemble ?

dimanche 1 juillet 2007


Proximité et distanciation : les deux approches se séparent et se rejoignent.
- Il m'arrive aussi de croire que je vois. Alors, quand ma main se tend vers le verre que je désire boire et que par miracle, son ventre froid se colle à la paume de ma main, je vois cette lumière frétillante plutôt que tremblante dont vous me parliez tantôt et qui tombe du ciel.

La force s’incitant elle-même, se vivifie entièrement.
- Vous ne pourrez jamais en être certain. Je m'emploie à cela du mieux que je puisse le faire.
- Et pourquoi cela ?
- Pour mon bien-être et le votre, il vaut mieux que vous ne puissiez être sûr de rien. D'ailleurs, moi-même, je ne le suis point.