samedi 30 avril 2016

30 avril 2016 (111)

Divine providence
 Épisode 111


 
Jamais je ne m'étais imaginé à quel point je m'étais attaché à ce petit être. Je me sentis devenir de plus en plus petit. Il me semblait que j'allais disparaître à jamais.

La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "Toutes mes résolutions sont inutiles;

je pensais hier tout ce que je pense aujourd'hui
et je fais aujourd'hui le contraire
de ce que je résolus hier."*

* Marie-Madeleine Pioche de La Vergne

vendredi 29 avril 2016

29 avril 2016 (110)

Divine providence
 Épisode 110


 
Quelque chose fit que je lâchais sa main. Immédiatement je fus emmené au loin.

La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "Il faut rire avant d'être heureux, de peur de mourir sans avoir ri."*


* Jean de La Bruyère

jeudi 28 avril 2016

28 avril 2016 (109)

Divine providence
 Épisode 109


 
Je ne pouvais qu'admirer le courage de ce petit être. Lui. si petit, tenait entre ses mains nos deux destins. Comprenant que l'obstination nous mènerait à l'abîme, je pris ma décision sans lui en parler...

La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "La fleur est le regard riant de la ruine."*

* Pierre Jean Jouve

mercredi 27 avril 2016

27avril 2016 (108)

Divine providence
 Épisode 108




 
Notre cœur battit très lorsque nous vîmes au loin surgir de l'horizon le château de mon protégé. Nous fîmes tout ce qui était en notre pouvoir pour nous en approcher. Nous y réussîmes partiellement quand une brusque saute de vent m'empêcha de me saisir de la plus haute tourelle. Mais mon compagnon réussit là où j'avais échoué... Nous fûmes suspendu dans le vide... le temps que notre destin se joue...


La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "Manquer de possible signifie que tout nous est devenu nécessité et banalité.."*


* Søren Aabye Kierkegaard

mardi 26 avril 2016

26 avril 2016 (107)

Divine providence
 Épisode 107




 
Nous résistâmes à la tentation de nous laisser aller au désespoir. Même lorsque je sus que je devrais me faire à l'idée de la perte de mon chapeau. Nous survolâmes maintes îles du même style que celles sur lesquelles je m'étais échoués. Cela me donna une idée sur la façon dont elles étaient groupées, ce qui, par la suite se révélera fort utile.

La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "Rien n'est plus précieux que le temps, il n'y a pas de plus grande générosité qu'à le perdre sans compter."*


* Marcel Jouhandau

lundi 25 avril 2016

25 avril 2016 (106)

Divine providence
 Épisode 106




–  La production, par elle-même, de la lumière d'une étoile ou de certains poissons ?
Que voulez-vous dire par là?
– La chose est relativement simple, mais difficile à comprendre...


 
La tempête nous emporta. Nous n'étions guère plus que poussière flottant au gré du vent.

La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "Qui a confiance en soi conduit les autres."*


* Julien Green

dimanche 24 avril 2016

24 avril 2016 (105)

Divine providence
 Épisode 105




– C'est un mystère , je vous l'accorde... Cependant il me semble qu'un peu de raison mettrait bon ordre à ce mystère. Nous pourrions considérer tout cela comme un simple exercice de logique. En premier, pour ce qui est de notre exemple et non d'un point de vue théologique, nous avons de l'obscurité. Cette obscurité se définit par le fait qu'elle n'est pas visible.
– Jusque là je vous suis...
– D'un autre côté, nous avons la lumière qui est le phénomène par lequel nous pouvons voir...
– Expliquez-moi cela!
– C'est très simple, sans lumière nous ne voyons rien...
– Ceci ne veut pas dire qu'il n'y a rien...
– C'est juste... que tout comme le poisson qui vit dans l'eau n'est pas l'eau, ce qui vit dans l'obscurité n'est pas l'obscurité... et qu'il faut qu'il y ait de la lumière pour le voir.
– Cependant cette lumière pourrait aussi bien éclairer l'obscurité que ce qui y vit ?
– C'est bien là que réside le mystère...
– Vous voulez parler des étoiles ?
– Non, ce dont j'aimerais vous parler, c'est du mystère de la production, par elle-même, de la lumière d'une étoile ou de certains poissons ?


 
Nous nous préparâmes au pire. Étant donné mes nouvelles responsabilités, je mis un point d'honneur à ne pas montrer ma peur. Tout se passa très vite sans qu'il fut possible de ne rien faire contre un mouvement qui n'était que fort peu celui de ma volonté.

La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "Le réalisme est en deçà de la réalité."*


* Eugène Ionesco

samedi 23 avril 2016

23 avril 2016 (104)

Divine providence
 Épisode 104




– ... et si il y a de la lumière, si petite soit-elle, il n'y aurait plus d'obscurité...
Ce qui est éclairé ou éclairable, ne serait plus l'obscurité...
C'est tout de même une sorte de mystère, ne trouvez-vous pas?


 
Comme vous pouvez l'imaginer, je ne sus que répondre. D'un seul coup je doutais de tout. De ma présence, de la sienne, de la réalité du monde dans lequel nous étions...
- Il n'y a qu'un seul monde et nous y sommes, me dit-elle.
Non seulement elle parlait mais encore lisait-elle dans mes pensées...
- Il faut que nous nous mettions à l'ouvrage.
Il fallait trouver un moyen de quitter cette île et retourner au château. Il n'était plus question de se laisser aller au gré des éléments... Nous n'eûmes pas le choix. Alors que nous nous étions mis en route pour trouver une issue, le temps se gâta à nouveau. Un grain d'une force sans égale se pointait à l'horizon...



La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "Abîmes, abîmes, abîmes. C'est là le monde.."*


* Victor Hugo

vendredi 22 avril 2016

22 avril (103)

Divine providence
 Épisode 103




– Il se pourrait que..., vous le savez bien,
lorsque vous regardez dans la nuit, dans toute cette obscurité il y a des milliards d'étoiles. Ainsi vous devriez être d'accord avec moi, il suffit d'ouvrir les yeux et nous la voyons dans la nuit...
– Vous faites bien peu de cas du fait de base qui est le suivant : l'obscurité se définit par le fait qu'elle est l'exact opposé de la lumière... or vous le savez aussi : pour voir quelque chose, quoi que ce soit, il faut de la lumière... et si il y a de la lumière, si petite soit-elle, il n'y a plus d'obscurité.

 

Je pris l'habitude de l'emmener avec moi. Nous étions sans cesse l'un avec l'autre. Sa présence m'était de plus en plus familière. Je me sentais moins seul. Je l'installais confortablement à côté de moi et nous contemplions l'infini sans modération. Un jour un mot sortit de ma bouche, puis un autre. Je me mis à lui parler. Sans espoir de réponse, bien entendu. C'est ce qui fit ma surprise quand, sans que je ne puisse douter, je l'entendis clairement qui me dit...
- "L'ennui est un des visages de la mort."*



La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "Aimez les choses à double sens, mais assurez-vous bien d'abord qu'elles ont un sens."**


* Julien Green

** Sacha Guitry

jeudi 21 avril 2016

21 avril

Divine providence
 Épisode 102





– Ainsi, seriez-vous d'accord pour dire que l'obscurité ne se voit pas?
En tous les cas, moi, quand je suis en face de ce que l'on nomme l'obscurité je ne vois rien...
– Il se pourrait que cela soit dû à un manque...
– À quelle sorte de manque faites -vous allusion ?
– Voyez-vous, pour moi...
– C'est le cas de le dire... mais continuez...
– Pour moi... ce n'est pas parce que rien n'est discernable qu'il n'y a rien. Il se pourrait que...
 

J'hésitais fortement. Il me paraissait complètement déplacé d'utiliser le terme de mourir ou de mort à son égard. J'avais peur de me comporter comme un enfant. Comme je me posais ces questions, et, dans le même temps, je réfléchissais à réparer la déchirure de son bras ainsi que celle qui mettait son cœur à nu, son bras bougea. Un imperceptible mouvement que je mis sous l'influence du fait que je la manipulais. Le fait se renouvela. Je n'arrivais pas à me débarrasser d'un sentiment étrange et troublant. La raison me disait qu'elle ne pouvait bouger et pourtant je voyais sa main se tendre vers moi plus que le mouvement que je faisais ne pouvait provoquer.

La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "Dans les périodes dites heureuses, seules les réponses semblent vivantes."*


* Maurice Blanchot

mardi 19 avril 2016

Divine Providence- 20 avril 2016 (101)


Divine providence
 Épisode 100





– Dites.moi. Votre Maître vous a-t'il déjà parlé de l'obscurité?
– En quelque sorte, oui...
– Et vous plairait-il que nous en parlions?
–Il faudrait pour cela que nous mettions d'accord pour accorder aux mots la même valeur.
Au moins pour le temps de cette discussion...
 

Bien que j'en sois certain, je contrôlais avec soin que le petit lambeau de tissus que j'avais ramené des profondeurs coïncidait avec la déchire qui se voyait sur son bras gauche. Le doute n'était guère permis. Ce petit être avait fait le même voyage que moi. Cela créait des liens. Et puis je lui avais tiré dessus... J'étais peut-être la cause de sa...

La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "Il faut ne donner que la moitié de son esprit à ce que l'on croit, et en réserver l'autre moitié pour le contraire..."*


* Fontenelle

Divine Providence- 19 avril 2016 (100)


Divine providence
 Épisode 100


– Comme, sans doute, me le dirait mon maître, si je le voyais encore :
"Il ne suffit pas que le tocsin de la raison résonne dans tout l'univers..."
Je crois bien que ce qu'il voulait dire m'échappe encore... mais je peux imaginer qu'il dirait cela pour "réveiller les consciences" et faire prendre garde au fait que le plus beau des masques ne recouvre jamais entièrement la bêtise et l'ignorance.



 
Malgré moi, malgré tout, j'eus envie de rire. Toute cette histoire pour une poupée. Tous ces risques pour une marionnette... Je riais et je fulminais. Tout de même, je la pris entre mes bras. Était-ce ce geste qui éveilla en moi d'autres sentiments ou était-ce le regard que je croyais discerner dans son visage?

La très véridique histoire du colonel Ortho

Aux éditions "Dans l'espoir de mériter le ciel en faisant de la terre un enfer."*

* Lord Byron

lundi 18 avril 2016

Divine providence – ( 99 ) 18 avril 2016

Divine providence
 Épisode 99

 
– Comme me le disait mon maître: "Le tocsin de la raison résonne dans tout l'univers..."
Je crois bien qu'il voulait dire qu'il devrait résonner...
Or, nous autres, pauvres, misérables et mésestimés perroquets, ne sommes-nous pas des êtres de raison... nous aussi...?
mais... que venons-nous faire ici... dans une histoire qui me parait, au premier abord, assez étrange et semblant aussi parfaitement dénuée de sens?



 
Ainsi me revint en mémoire ce que m'avait répondu le Colonel à ma deuxième question :
– Tu le reconnaîtras sans peine, il me ressemble traits pour traits. Je l'ai conçu à mon image...
Je ne pouvais alors imaginer que ce fut une simple poupée de chiffon...
C'est alors que je me rappelais la vision que j'avais eue sur la vague. Elle avait une réalité plus crue encore que ce que j'avais entre les mains



La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "Il n'est qu'une espérance. Elle revient d'exil." *


* Paul Fort

dimanche 17 avril 2016

– Demain, je reviens...

17 avril 2016 (98)

Divine providence
 Épisode 98


Passé les premiers instants de stupéfaction,
le commissaire finit par se rendre à l'évidence...
Dans cette couronne de lumière gisait un corps... 
– Se pourrait-il que ce soit lui ?..



Ce fut une émotion très intense que de retrouver... l'image identique à celle que j'avais rêvée. Malheureusement tout semblait indiquer qu'un drame avait eu lieu... Et que je sois, pour son malheur et le mien, à l'origine de ce drame. La flèche qui plantée dans sa poitrine était bien celle que j'avais expédiée dans le ciel à sa recherche...



La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "Assurons-nous bien du fait

avant de nous inquiéter de la cause."*

* Bernard le Bovier de Fontenelle

samedi 16 avril 2016

16 avril 2016 (97)

Divine providence
 Épisode 97




Le commissaire est toujours à la recherche du Colonel Ortho...
Mais en chemin, innombrables sont les occasions de se perdre

Une dernière vague se chargea de me remettre les pieds sur terre. Je me relevais péniblement...



Au-dessus de moi, quelque chose attirait mon attention. Une touffe d'herbes incongrue sur ces îles rocheuses se balançaient dans le vent. Elles étaient éclairées par la lumière dorée d'une lune improbable. On eut dit une couronne...


La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "Je puis douter de la réalité de tout,

mais pas de la réalité de mon doute."*

* André Gide

vendredi 15 avril 2016

15 avril 2016 (96)

Divine providence
 Épisode 96




Le commissaire est emporté. Face à l'inconnu il continue d'expérimenter
des sensations qui lui sont en permanence inconnues
et qui pourtant le ravissent et qui l'inquiètent aussi...

Le lancinant fracas du ciel se calma. J'arrivais sur une autre île, sain et sauf. Elle était presque parfaitement identique à celle que j'avais quitté. J'étais surpris par une telle ressemblance. Je me demandais à quoi je pouvais m'accrocher pour être sûr que ma mémoire ne me jouait pas un tour de plus...


La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions
"Toute chose naît pour périr,
Et tout ce qui périt retourne
Pour une autre fois refleurir."*


* François de Sales

jeudi 14 avril 2016

14 avril (95)

Divine providence
 Épisode 95




Le commissaire fait face à l'inconnu et continue d'expérimenter
des sensations qui lui sont inconnues, qui le ravissent et qui l'inquiètent aussi...

Ces sensations se transformèrent en image. J'avais devant moi le Colonel. Il était allongé dans l'herbe... Je ne voyais que son costume, mais l'image était très nette. Beaucoup plus nette que lors de notre face-à-face dont par ailleurs je ne me souvenais de rien précisément. Quelque chose d'imperceptible liée aux sensations que j'éprouvais dans l'instant me disait que j'étais dans le vrai. Celui qui était devant mes yeux était le Colonel. Il était allongé dans l'herbe... J'étais certain que c'était lui. L'image, bien qu'incomplète était très nette, beaucoup plus nette que lors de notre face-à-face, mais elle disparut aussitôt. Je luttais pour la faire revenir, mais en vain.


La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "Soyez patient avec tout le monde,

mais surtout avec vous-même."*

* François de Sales

mercredi 13 avril 2016

13 avril (94)

Divine providence
 Épisode 94




Le commissaire expérimente des sensations
qui lui sont inconnues et qui le ravissent...

– L'expérience aidant, je commençais à me sentir à l'aise. Très brièvement, il m'arrivait de pouvoir me tenir sur mes deux pieds et d'avoir la sensation inouïe de diriger la vague...

La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "Trop haut, c'est l'impossible; trop bas ce sont les feuilles mortes. La vie n'est pas là; regardez directement devant vous, à hauteur d'hommes, et vous la verrez!"*


* Eugène Fromentin

mardi 12 avril 2016

12 avril (93)

Divine providence
 Épisode 93




Si le commissaire n'avait pas été aussi occupé à chercher son équilibre dans l'obscurité et les fracas du ciel, il eut pu voir un bien curieux spectacle...

La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "Pour bien mentir il faut beaucoup de sincérité!"*


* Jean Giono

lundi 11 avril 2016

11 avril (92)

Divine providence
 Épisode 92




Agitant ses deux mains et son corps tout entier, il refuse de se laisser submerger.
- Je suis comme un poisson hors de l'eau, battant des ailes comme un oiseau.
Sachant qu'il ne peut s'envoler, ignorant tout de son destin, il ne peut que se laisser porter.



La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "L'ignorant a des ailes d'aigle et des yeux de chouette."*

* Georges Herbert

dimanche 10 avril 2016

10 avril (91)

Divine providence
 Épisode 91




Le ciel, d'un seul coup, s'était assombri. Une vague gigantesque, lentement se forme.
Le commissaire est emporté en toute lucidité. Pas un instant, malgré l'obscurité, il ne doute.




La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "Je me suis mis d'accord avec moi-même, ce qui est bien la plus grande victoire que nous puissions remporter sur l'impossible."*


* Eugène Fromentin

samedi 9 avril 2016

9 mars (90)

Divine providence
 Épisode 90




Le ciel, d'un seul coup, s'assombrit. Une vague gigantesque, lentement se forme qui emporte le commissaire.

La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "En peu de temps parfois on fait bien du chemin."*

* Molière

vendredi 8 avril 2016

8 mars (89)

Divine providence
 Épisode 89





Cette fois la cible ne sera pas manquée. C'est en plein coeur que la flèche est plantée.


La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "De quelque manière qu'on s'y prenne on s'y prend toujours mal."*

* Sigmund Freud


jeudi 7 avril 2016

7 avril (88)

Divine providence
 Épisode 88





La flèche partit bien au-delà de ce que je pouvais imaginer.


La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "Tout finit afin que tout recommence, tout meurt afin que tout vive."*

* Jean-Henri Fabre

7 avril (87)

Divine providence
 Épisode 87




Ne me fiant qu'à mon instinct, laissant les vents orienter mes mouvements, sans réfléchir, je laissais la flèche se détacher par elle-même.



La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "Le temps ne s'occupe pas de réaliser nos espérances; il fait son oeuvre et s'envole."*

* Euripide

mercredi 6 avril 2016

6 avril (86)

Divine providence
 Épisode 86



Alors même que j'étais accroupis dans la position idoine, sans même que j'eusse à réfléchir, je sus ce que je devais faire. Sans plus attendre il fallait retrouver la trace de celui que le Colonel m'avait chargé de retrouver. J'étais soulagé. Je me souvenais dès lors de notre étonnant face-à-face. À ma grande surprise il m'avait déclaré sans ambages avoir un fils dont personne ne pouvait connaître le secret.
- On me l'a pris, manière impure et idoine corruption. Cela fait ombrage à mon humeur au point même que je songe à me retirer de la cour, et même du château...
Le Colonel, même de loin, sans qu'aucun détail ne puisse se voir, faisait peine à voir ou alors était-ce caché dans les replis de sa voix.
- Il faut que vous le retrouviez !
Il avait relevé la tête et ce faisant sa voix s'était raffermie au point que je me mis à tressaillir.
- Comment pourrais-je le reconnaître si personne ne l'a jamais vu ?
J'évitais de poser des questions trop directes. Je tressaillais toujours. Il me regardait, j'en étais sûr. L'ombre diffuse semblait se propager vers moi. J'espérais qu'il m'en dise plus sans que j'aie à le questionner. Je n'avais à ma disposition que trois questions et j'en avais déjà posé une sans obtenir de réponse.



"Ton affaire, c'est de jouer correctement
le personnage qui t'a été confié;
quant à le choisir,
c'est celle d'un autre."*

Sans perdre le fil de ma pensée, je me remis à l'ouvrage. Le temps pressait. Si je voulais profiter de la trace encore sensible que ma mémoire venait de tracer dans l'histoire, il me fallait agir vite. Tout peut en si peu de temps s'effacer... de plus, les vents me paraissaient favorables. Sans hésiter j'attachais à la flèche un morceau du tissus bleu que j'avais recueilli.

La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "Nous saurons qui nous sommes quand nous verrons ce que nous avons fait."**

* Épictète
** Drieu la Rochelle

mardi 5 avril 2016

5 avril (85)

Divine providence
 Épisode 85




En trois secondes je rejetais ce qu'il me semblait avoir mis une éternité à avaler. La satisfaction fut de courte durée. La flamme que j'avalais alors montrait trop clairement que j'étais mort. Ce feu qui me consommait ne pouvait appartenir qu'à Hadès. J'écartais les flammes et retenais mon souffle, tout prêt a découvrir Minos...
... Lentement je remis ma tête sur mes épaules. Ce n'était qu'une égratignure de rien du tout. Mais la vue du sang avait fait son effet. Je redescendis sur terre et retrouvais la mémoire en même temps que la flèche. Elle était plantée dans le sol et non au travers de ma gorge.






"Or, tout dernièrement, m'étant trouvé sur le point de faire le dernier couac! j'ai songé à rechercher la clef du festin ancien, où je reprendrais peut-être appétit."*

J'avais retrouvé mes esprits en même temps que l'objet de ma quête. Je le tenais entre mes mains. J'avais peur pourtant. J'étais bien loin de tout et surtout du héros que j'aurais aimé incarner. Incarné je l'étais et mon ventre demandait son dû que la peur lui disputait. La peur gagnait. En vitesse je me mis à la recherche d'un endroit tranquille pour m'en décharger, tout autant que les monstres qui me dévoraient les entrailles...

La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "Ce n'est pas en tournant le dos aux choses qu'on leur fait face."**


** Pierre Dac

lundi 4 avril 2016

4 avril (84)

Divine providence
 Épisode 84




Je ne recherchais guère la gloire, je voulais juste rester en vie. À la même vitesse que la flèche tombait une boule énorme montait en moi... En vain j'essayais de ne plus penser...



"Plus leur bêtise grandit, plus ils ont de mémoire !"*

Il eut fallu que j'inspire à la façon d'un nouveau-né ou que je pousse un long cri d'agonie, mais ce fut impossible. La boule était montée. Impossible de l'arrêter. Je dois vous le dire... je gerbais... mais à la grandiose façon des baleines.


La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "Ce n'est pas en tournant le dos aux choses qu'on leur fait face."*


* Pierre Dac
** Colonel Ortho

samedi 2 avril 2016

2 avril (83)

Divine providence
 Épisode 83



À peine avais-je un peu recouvré mes esprits que je fus à nouveau pétrifié. La flèche qui m'avait emmené était montée plus haut que moi dans le ciel, ce qui explique qu'elle arrivât plus tard, fondait sur moi. Le tout petit mouvement que je fis pour me saisir du chiffon bleu m'avait involontairement involontairement détaché d'elle. Je ne faisais plus corps avec elle. Et me voilà impuissant face à elle qui au loin, je la voyais venir, sans pouvoir me mouvoir ...


 "Je ne pense jamais, cela me fatigue;
ou, si je pense, je ne pense à rien."**

Je ne recherchais guère la gloire, je voulais juste rester en vie. À la même vitesse que la flèche tombait une boule énorme montait en moi... En vain j'essayais de ne plus penser...


La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire."*

* Corneille
** Georges Courteline

vendredi 1 avril 2016

1 avril (82)

Divine providence
 Épisode 82


La corde avec laquelle j'avais lié mon destin se défit en quittant les entrailles de la mer. La flèche, plus légère et plus pénétrante, monta bien plus que moi dans le ciel.



Au moment même où je me saisis du chiffon je pris l'eau à plein poumons. Après un choc formidable mon corps tout entier, comme une éponge, semblait se répandre dans la mer pendant que j'avais la très étrange impression que mon esprit poursuivait sa route, emmenée par la flèche, inconscient. Comment je me retrouvais sur cette île, incapable du moindre mouvement, je ne le sais.

La très véridique histoire du colonel Ortho
Aux éditions "L'imaginaire est ce qui tend à devenir réel."*


* André Breton