lundi 13 décembre 2021

L’individu…

 Platon, enfant, "trouvait du réconfort dans les mathématiques, qui stimulaient son esprit, l'attiraient et le vidaient de tout. Il entr'apercevait un genre de vérité. Il se rappelle avoir d'abord rencontré la division posée, qui était présentée dans un manuel comme pur procédé  – quelque chose à comprendre, du moins à faire. Mais il ne pouvait s'empêcher de se demander pourquoi l'opération marchait. Nous admettons beaucoup de choses, beaucoup de ce qui est admis par les autres, et l'on nous dit d'obéir et nous acceptons. Et nous devons accepter. Je n'ai pas le temps ou, en l’occurrence, la disposition pour pour établir que la Terre est fondamentalement sphérique, mais quand je vois la couche de l'horizon depuis un avion, je crois avoir perçu quelque chose qui est cohérent avec ce que l'on m'a dit être la vérité: que la planète est ronde comme une boule. Mais comment pouvons-nous savoir que nous acceptons une chose que nous ne devrions pas accepter, sans connaissance du pourquoi? En mathématique, le pourquoi est tout. Comment ou plutôt pourquoi ce procédé mécanique de division posée marchait-il - calculer combien de fois un nombre est inclus dans un autre, trouver le reste, puis le reporter? Pourquoi quelqu'un avait-il pensé que cela marcherait toujours? Que se passait-il?"*





Que se passe-t'il? Deux enfants de sept ans, ayant
"tout" et rien... ou les deux à la fois, dérivent d'une histoire à une autre sans jamais connaître les liens qui les attachent l'un à l'autre excepté le dialogue. Le jeu infini qui lient les signes, les lettres, les mots, les phrases aux infinies représentations qu'elles suscitent à l'infini sur un horizon qui tourne en rond.

– L'homme est-il une machine supérieure à celles qu'il crée ?
– Pour répondre à cette question, il faut évaluer la question qui précède... ou plutôt les questions...
– Lesquelles?
– L'homme est-il une machine? L'homme est-il le créateur des machines qu'il prétend inventer? L'homme est-il au service d'une machine? 
– Cela fait beaucoup pour des "petits enfants de sept ans" comme nous...
– Et ce d'autant plus que la liste des questions n'est de loin pas finie...
– Par exemple...
– Par exemple quand nous disons "l'homme" a inventé une machine, s'agit-il d'un homme en particulier, qui porte un nom qui l’identifie, ou de l'ensemble d'"êtres" que l'on appelle "homme?
– Qu'est-ce que cela change?
– C'est une question de justice... ou peut-être d'éthique... à plusieurs niveaux... et d'abord, pour le moins, que je sache l'individu n'est pas l'ensemble...
– Je ne vais pas vous étonner, à ce point, je n'y comprend rien...
– Voyez-vous. il est très compliqué d'être simple...
– Je ne vous le fais pas dire...
– Regardez cet homme, là-bas, au loin, debout sur sa barque!
– Vous changez habilement de sujet et moi je ne vois rien…
– Pas du tout… regardez bien… juste à l'endroit où l'étoile est tombée…
– Là où les nuages ressemblent à de la fumée?
– C'est cela. Et, par un curieux effet du hasard, si je puis dire, au-delà du cliché...: Il n'y a pas de fumée sans feu... 
– Nous voilà bien loin des machines....
– Et peut-être bien près d'un homme...
– Se pourrait-il qu'il soit une espèce de reste?
– Un reste reste issu d'une division... par exemple...



* À la lumière de ce que nous savons
Zia Haider Rahman
Christian Bourgeois  Éditeur 

 

 

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