mardi 5 février 2019

(5) Une sorte de défi

« Le jeu n’est-il pas le symbole du futile (ce sont d’abord les enfants qui jouent), de l’« ici et du maintenant» (la partie se joue sur un terrain délimité par des lignes et dans un temps imparti), de l’invention?*»
Ne répondons pas trop vite et suivons Turing dans son cheminement. Son point de départ est le jeu de taquin. Il s’agit d’un jeu qui, dit-il, "a été mis en vente en de nombreux endroits (. . . ) et a sans doute été vu par la plupart des lecteurs". Cette phrase à l’apparence anodine précise bien que Turing ne parle pas d’une abstraction mathématique mais d’un morceau de matière. Le cas du taquin a cet avantage que c’est un jeu facile à modéliser, c’est-à-dire que le déroulement du jeu est facilement décrit dans le langage mathématique.
Partant d’un état dans lequel les cases sont désordonnées, le défi consiste à ordonner les cases en les faisant coulisser dans un espace vide. Le problème qui se pose est de savoir si l’on peut gagner à ce jeu solitaire en partant de n’importe quelle configuration de départ. De prime abord, l’idée que le jeu possède une portée ontologique semble déconcertante. En effet, le jeu ne représente-t-il pas justement ce qui n’engage que de façon limitée et temporaire? Certes, il y a bien des jeux d’argent ou d’honneur qui engagent la vie même des joueurs, mais "mourir" dans un jeu est le plus souvent synonyme de "perdre" et sitôt mort, la seule chose qui reste à faire est de rejouer. »




Cinq-cents-unième rapport de Don Carotte
Extrait du petit cahier Vert


 Tout le monde sait que tout le monde rêve, mais personne ne peut dire quand...


*Les règles ont une part d’arbitraire

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