– Si vous aviez sous les yeux le premier des carnets de Platon l’Ancien, vous y apprendriez que la principale de idées qui lui sont venues à l'esprit est celle de société.
– C’est étrange…et de quand date le carnet?
– Si le carnet n'est pas daté, un certain nombre de recoupement permettent de considérer que si il écrit dans un âge que l'on peut qualifier de mûr, ce dont il parle s'est passé dans un temps assez lointain, celui de son enfance, et même de sa petite enfance.
– De plus en plus étrange…
– Voyez-vous, cher Justin, Platon l'Ancien, loin de toute agitation, tout comme moi, chacun à sa manière, lit et rédige du mieux qu'il puisse… mais…
– … mais..?
– Mais je peine à imaginer ce qu’il écrit…
– Voyez-vous, cher Justin, nous tous lecteurs avons de la peine à imaginer ce qui est écrit…
– N’est-ce pas là une sorte de paradoxe?
– Tout au plus une confusion…
– Laquelle?
– D’un côté notre imagination déborde, nous raconte des histoires… et nous fait nous éloigner de ce qui est véritablement écrit…
– Et de l’autre?
– De l’autre côté notre imagination peine à suivre ce qui est…
– Que voulez-vous dire par là?
– Je veux dire par là que Platon l'Ancien, loin de toute agitation, tout comme moi, chacun à sa manière, lit et rédige du mieux qu'il puisse… mais ce qu’il écrit n’est pas là… ce sont comme des souvenirs qui prennent formes… ce sont ces formes qui sont présentes et non ce qu’elles ont été et ce sur quoi elles ont eu de l’influence…
– Comment savoir ce qui a été vraiment?
– C’est… probablement… quasiment impossible… tout ce que nous savons et vivons n’est que signes…
– Mais… pardonnez-moi…nous ne sommes point des cygnes…
– Je parlais de signes…
– Dites-m’en un peu plus.
– Pour cela je dois faire référence à Gilles Deleuze…
– Faites, je vous en prie.
– Il dit que le signe mondain apparaît comme ayant remplacé une action ou une pensée.
– Continuez…
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