mardi 31 janvier 2017

31 janvier 2017

« Winston semblait, non seulement avoir perdu le pouvoir de s’exprimer, mais avoir même oublié ce qu’il avait d’abord eu l’intention de dire. Depuis des semaines, il se préparait à ce moment et il ne lui était jamais venu à l’esprit que ce dont il aurait besoin, c’était de courage. Écrire était facile. Tout ce qu’il avait à faire, c’était transcrire l’interminable monologue ininterrompu
qui, littéralement depuis des années, se poursuivait dans son cerveau. En ce moment, cependant, même le monologue s’était arrêté. Par-dessus le marché, son ulcère variqueux commençait à le démanger d’une façon insupportable. Il n’osait pas le gratter car l’ulcère s’enflammait toujours lorsqu’il y touchait. Les secondes passaient. Winston n’était conscient que du vide de la page qui était devant lui, de la démangeaison de sa peau au-dessus de la cheville, du beuglement de la musique et de la légère ivresse provoquée par le gin.
Il se mit soudain à écrire, dans une véritable panique, imparfaitement conscient de ce qu’il couchait sur le papier. Minuscule quoique enfantine, son écriture montait et descendait sur la page, abandonnant, d’abord les majuscules, finalement même les points. »*


Platon, surgissant de l'eau parle aux petits chiens qui ont l'air eux aussi de naufragés. Juchés sur leurs colonnes ou sur les restes de celles-ci. Plus que jamais ils ne savent ce qu'ils font là.




– Soyons critiques, mes amis ! Ne prenez pas en grippe le mot critique... Pour vivre il faut choisir. Regardez qui arrive encore.
Alors d'où venez-vous Platon? Et d'où tenez-vous ce nom qui est le mien?



*Georges Orwell, 1984, ( 1948 )

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