vendredi 14 décembre 2007

Un sommet

De même qu'un montagnard atteignant un sommet qu'il a depuis longtemps désiré, grâce à l'expérience et aux aptitudes personnelles de Sophia et Rosa, dont le rôle n'a pas encore été présenté, je ressentais des sensations et des impressions très diverses parmi lesquelles la joie dominait. Nous avions réussi à capter l'attention de Julius. Peu importe que le ciel fut alourdi de sombres nuages porteurs certainement de mauvais présages. Sortant de l'ombre, les formes floues de sombres uniformes qui marchaient vers nous ne pouvaient pas être autre que la conséquence de l'apparition publique un peu scandaleuse de mes deux compagnes. Il faut dire qu'en ce temps-là leur présence n'était guère tolérée qu'à l'église, dans la chaleur du foyer ou au bordel. Nous ne nous attardâmes point et sans demander notre dû nous filâmes "ventres à terre"ce qui fit bien rire mes deux protégées. Ainsi c’est dans la joie et la joyeuse reconnaissance que nous avons pu constater avec quel sérieux nous avions su nous y prendre.
Constatant combien la dangereuse liberté que nous nous attribuions et la promesse d'une arrestation prochaine n’influençait en aucune manière le sentiment de se sentir étroitement uni, bien au contraire,
 Rosa, fière de l'accomplissement de notre tâche et qui ne manquait pas d'humour gaillard sourit en prononçant sa conclusion :
- Notre tâche n'est pas achevée et si notre travail a produit un fruit dans lequel je me réjouis de mordre à pleine dent, nous devons veiller à ne pas nous endormir en cédant à l'engourdissement de la joie qui ne peut être que passagère!
C'est alors que je compris combien Rosa, sous des apparences légères, était, en faits et en gestes, tout à fait porteuse d'une idée puissante qui me la fit découvrir comme un guide sûr auquel je me promis de rester fidèle.
- Bandons nos arcs et visons, dans la mesure de nos possibilités, au coeur des profondeurs de nos espoirs les plus fous !
Il est vrai que Rosa était surprenante, cette dernière réplique à laquelle je devrais consacrer un peu de temps pour bien la comprendre eût pu être attribuée à un âne, mais ce fut bien elle qui la prononça de farouche et fière manière.

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