lundi 3 avril 2017

3 avril 2017

« ... la cogitation n’a pas pour objet, comme l’intellection, des notions universelles. Si elle procède d’une puissance organique, en situation, c’est à du particulier seulement qu’elle accède : telle chose, telle autre, placée dans tel contexte, vêtue de ces déterminations-là. Mais quelles choses ? Non pas directement les êtres concrets du monde externe, dont l’appréhension relève du sentir, mais ce qui, dans le corps animé, résulte de la sensation de ces êtres, leurs traces, leurs empreintes stockées, autrement dit des images, ou mieux : des fantasmes. C’est cela qu’on doit faire saillir. La cogitation n’est pas l’effet terminal de l’intellect, mais un produit de l’imagination sous-jacente, un acte subjectif du pouvoir des imagines ou, pris comme synonymes, des phantasmata. Elle ne consiste pas à concevoir, ni à « penser », vaguement. L’équation médiévale à raviver est autrement précise, et en un sens, spectaculaire. Je cogite veut dire : je fantasme.»*




Le mystère ne se dit qu'à demi-mots. Platon le Petit le sait mieux que quiconque puisque ses mots se perdent dans le labyrinthe de son esprit et que ce qui parait au grand jour, l’aboiement, n'en sera qu'une ombre lointaine et c'est bien une sorte de mystère qui se passe quand son intention est comprise... et que les infinies possibilités d'échanges féconds entre les langues ne restent pas de pures fantasmes.
Si les fantasmes sont légions ils appartiennent aussi, flottant le plus souvent de façon inconsciente: à leurs corps défendant, à ceux qui pensent être raisonnables.

Ce que pensait Platon longtemps auparavant, dans son engagement résolu sur le chemin de l'utile et de ce qu'il nomme la promesse de l'être:

– C'est notre devoir de les traquer, de ramener les rêveurs sur les rives du réel et de leurs rappeler leurs devoirs...

C'est ainsi que Platon avait été celui qui aujourd'hui le pourchasse. 
Et c'est ainsi que sa pensée s'est retrouvée à l'exacte opposé de celle d'autrefois: 

– C'est notre devoir de retrouver les racines de ce qui nous forme tout en de laissant, comme une plante, la langue se développer avec esprit, ardeur et nouveauté...

Platon s'étonne, ou plutôt s'émerveille du mystère de mutations..:

– La raison ne serait-elle pas le plus grand des fantasmes?



* Je fantasme, Jean-Baptiste Brenet, éditions Verdier

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