vendredi 13 mars 2015

Tombé du ciel

Les carnets d'Auguste (13)


- C'est cela, vous êtes donc tombé du ciel et dans quelques instants vous allez me dire  que vous êtes l'image du père. Vous allez me parler du concile de Nicée où l'image fut mise  en accusation. Du fait que la vraie image est celle du fils, puisque "celui qui voit le fils voit  le père"… et puis quoi encore? Personne ne croit plus en ces élucubrations…
- Votre nihilisme est le fait de considérer que l'être ne viendrait de rien. C'est une sorte de  krach. Tout ce à quoi on faisait crédit s’écroule. Tout ce à quoi on ajoutait foi et tout ce qu'on  imaginait disparait. Par exemple, on ne croit plus aux images. Nous sommes la civilisation  de l'image… et à ces images nous ne croyons plus. Rien de plus facile à maquiller qu'une  image. Mais de quoi parlons nous, de quelle image parlons nous. De celle qui est vôtre:
de votre image? De l'image de votre société? Dont vous faites partie et dont vous êtes  censé être le représentant en adoptant ses coutumes, le comportement qu'elle désire, et  les signes qu'elle essaie d'imposer selon ce qu'elle appelle des temps immémoriaux ou de  façon plus simple: la tradition. Êtes-vous l'image conforme de ce que la société à laquelle  vous appartenez attend de vous?
- Ahhhh! Là on peut dire que vous vous dévoilez. Vous commencez par me traiter de nihiliste  et pour finir, je crois que le nihiliste c'est vous!
- Vous croyez… La croyance est-elle un savoir comme un autre?
- Une personne censée sait bien qu'il ne peut pas y avoir de confusion entre savoir et croire.
- Et pourtant cette équivalence me semble envisageable dès le moment où croire ne vise  pas à être considéré autrement que comme un moyen de partager: croire serait une sorte  de savoir. C'est ce que font les athées ou les agnostiques quand ils disent ne pas croire  en Dieu. Mais qu'en est-il de leurs croyances quand ils disent croire en l'humanité et au  progrès de celle-ci? Qu’en est-il de la croyance en la réalisation d’un commun accord?
Il faudrait alors avoir le courage de mettre sur la table la difficile question de savoir (ou de  croire) qui est le père quand tous se disent frères.
Un silence s'installe.


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