lundi 19 décembre 2016

Qui pourrait voir...

« Pourquoi ne pouvons-nous demeurer enfermés en nous? Pourquoi poursuivons-nous l’expression et la forme, cherchant à nous vider de tout contenu, à organiser un processus chaotique et rebelle? Ne serait-il pas plus fécond de nous abandonner à notre fluidité intérieure, sans souci d’objectivation, nous bornant à jouir de tous nos bouillonnements, de toutes nos agitations intimes ? Des vécus multiples et différenciés fusionneraient ainsi pour engendrer une effervescence des plus fécondes, semblable à un raz de marée ou un paroxysme musical. Être plein de soi, non dans le sens de l’orgueil, mais de la richesse, être travaillé par une infinité intérieure et une tension extrême, cela signifie vivre intensément, jusqu’à se sentir mourir de vivre. Si rare est ce sentiment, et si étrange, que nous devrions le vivre avec des cris. Je sens que je devrais mourir de vivre et me demande s’il y a un sens à en rechercher l’explication. Lorsque le passé de l’âme palpite en vous dans une tension infinie, lorsqu’une présence totale actualise des expériences enfouies, qu’un rythme perd son équilibre et son uniformité, alors la mort vous arrache des cimes de la vie, sans qu’on éprouve devant elle cette terreur qui en accompagne la douloureuse obsession. Sentiment analogue à celui des amants lorsque, au comble du bonheur, surgit devant eux, fugitivement mais intensément, l’image de la mort, ou lorsque, aux moments d’incertitude, émerge, dans un amour naissant, la prémonition de la fin ou de l’abandon.» 

Emil Cioran, Sur les cimes du désespoir
1934, trad. André Vornicrevue par Christiane Frémont, dans Œuvres, (Quarto Gallimard, 1995) p.19


La roche se fissure, s'écartèle, se décompose
et se reforme, à la merci des vagues
suspendues en anathèmes
à l'assaut des temps immémoriaux
et, en plein déséquilibre, cèdent le plus souvent à la tentation d'exister
avant de se retourner contre elles-mêmes,
faisant face au secret des origines...


Qui pourrait voir... et même savoir... que Platon vit à l'intérieur chaotique d'une mâchoire de pierre qui ressemble à s'y méprendre à la gueule d'une baleine. Il est fort curieux, ce que Platon ne peut savoir, qu'a certains moments, un halo de lumière provienne de l'intérieur de cette caverne à demi entrouverte par moments.
S'il le savait, pas plus que quiconque, il ne saurait dire d'où elle provient. Loin d'être gagné par le désespoir, cependant, il n'est pas à la fête et en lui grandit l'envie de redevenir le daemon qu'il était et plus encore le petit chien insouciant qu'il était.

– Comment saisir le sens de ces transformations? Je ne suis guère outillé pour comprendre ces "dialogues de fantoches". Il faudrait de longues et ardues études pour y accéder et je n'y suis guère préparé. Tant pis, cela restera donc une sorte d'intérêt qui ne coute pas grand chose puisque "cela se fait" tout seul.

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