samedi 17 décembre 2016

Comme une étoile dans le ciel



– C'est quand il s'agit de s'en sortir
qu'il faut parfois savoir y entrer...

Le doute a fait son chemin dans l'esprit tout neuf de Platon, seul face aux éléments contre lesquels il ne peut rien, il regrette un peu le temps ou il n'était qu'un petit chien, une sorte de démon – ou de daemon – dont la signification ne le préoccupait point le moins du monde. Comment et pourquoi s'interroger sur le sens des mots au moment même où il va disparaitre?
Et pourtant ce fut plus fort que lui. La vision d'une seule étoile lui sembla beaucoup plus vivante que cette gueule béante et grinçante se refermant sur lui, fit rejaillir toute une mémoire. C'était comme si, en lui, une mémoire inconnue était profondément enfouie.

– Au moment même où j'allais mourir s'était produit comme une nouvelle naissance.

Jamais Platon n'avait franchi aussi allègrement le mur épais de ses émotions. Ce n'était plus une vague psalmodie ou un vacillant discours qu'il s’adressait à lui-même, non, c'était une claire et distincte voix que jusque là il n'avait jamais entendue.


– "Parle, ô grande et vénérable tête... si tu ne portes pas de barbe, tu parais ça et là blanchie de mousse, parle, puissante tête et livre-nous le secret qui est en toi!"*

 L'exaltation n'était pas encore à son comble, mais elle était déjà suffisante pour qu'un monde nouveau, encore un, s'établisse dans la tête de Platon. Personne n'aurait pu dire s'il s'adressait à la tête de pierre qui maintenant le retenait prisonnier ou à l'étoile qui lui paraissait semblable à un œil ouvert dans l'immensité d'un ciel dont il ne pouvait percevoir que la plus  infime des parties.



* Moby Dick, Melville, chapitre LXX

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