dimanche 18 décembre 2016

Platon délire



– "On dit que les murs ont des oreilles, maintenant ils ont aussi une voix."*


Pour la première fois de sa vie d'homme, dans un jardin qu'il croit secret, Platon se sent perdu... un peu, quand même. Recroquevillé sur lui-même, il joint les deux mains, et, "malgré les remontrances de sa raison, il se décida à rentrer en lui comme il en était sorti"**. Pénétrant en lui-même, comme pour la première fois, il écoute le son lointain d'une voix. Cette étrange faculté, qui, jusque là, semblait ne répondre à aucune de ses aspirations, ne laissa pas de le contrarier un peu:

– Peu importe que je sois regardé ou entendu. Peu importe ce qu'ils penseront, avant que la porte ne se ferme  je veux en moi fixer ce regard venu de si loin. J'en suis sûr, c'est de lui que viendra le salut dont je ne fais que rêver... Combien de fois déjà suis-je passé sans que jamais il ne fut éclairé?

On peut s'en douter, Platon délire. Était-ce la voix de l'étoile ou la sienne? Personne ne peut le dire... Était-ce le résultat précoce d'un très récent surmenage? Il y a peu, de tels mots n'eussent pu être déclamés sans qu'un éclat de rire, ou du moins un sourire, en certains cas presque par inadvertance, n'en fasse éclater le doucereux glacis du miroir de la mort.


*    Le passe muraille, film de Dante Desarthe adapté de la nouvelle de Marcel Aymé
**  Le passe muraille, Marcel Aymé

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