mercredi 3 juillet 2024

Illusion

 

« Le statut de l'image, déjà, fait difficulté. Elle se veut un second objet pareil au premier, son modèle. Mais l'objet n'a pas, dans l'image, son pareil. Il est réel dans le monde et l'image ne l'est pas. Mais, répond l'interlocuteur, «c'est réellement qu'elle est ressemblante. Elle est donc, d'une certaine façon ». D'où la conclusion inévitable et paradoxale:

«Ce que nous appelons image est donc réellement un irréel non être » (littéralement: est donc un non-étant sans réalité)*

Étrange entrelacs d'être et de non-être, la constitution de l'image nous laisse interdits devant ce qu'elle postule: l'être de l'irréel, la réalité de l'imaginaire.
Or le simulacre élève le paradoxe au second degré. L'image fait ressemblant, le simulacre fait semblant. Il n'offre avec un quelconque étant du monde aucune ressemblance réelle, qu'on puisse dire être fausse.
Comment dès lors accuser le simulateur de fausseté... si le faux n'existe pas. Voilà l'inattaquable alibi de l'insaisissable sophiste. Il ne peut être pris en flagrant délit de tromperie, au moment même qu'il nous abuse.
Aussi Platon l'appelle-t-il magicien, faiseur de prestiges, illusionniste. Mais si ce que l'illusionniste simule n'est pas réellement vrai ni faux, c'est bien réellement pourtant qu'il nous fascine.»

Henri Maldiney, L’art, l’éclair de l’être, Cerf, p. 180-181
* Platon, Sophiste, 234b
 
 

 
– Voulez-vous me dire à qui s’adresse Auguste?
– Je n’en sais pas plus que vous… mais il se pourrait, c’est certain ne hypothèse que j’ai esquissé il y a peu, il se pourrait qu’Auguste se parle… à lui-même…
– Vous voulez dire qu’il parle tout seul!
– Je ne le crois pas… Regardez bien… il est loin d’être seul… celui à qui il parle est un autre… 
– Suggéreriez-vous que…
– Ce n’est pas une suggestion… mais une constatation…
– Ou alors… une illusion…
– Une illusion qu’il construit patiemment… 

 




Chroniques d'Auguste, où l’on découvre qu’il est de profonds secrets bien réels  et des apparences trompeuses, difficilement discernables… 
 
Aux tempêtes, catastrophes, naufrages, incendies, famine, festins ou destins déjoués, nous ne vous demandons pas d’y croire mais juste de faire semblant. Ayez, comme nous, foi en votre patience et en votre sagesse. Il arrivera toujours un moment où, dans un parallélisme saisissant ou même aveuglant, l'un passera pour l'autre...

 

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