lundi 17 février 2025


 

Ils recommencent non pas comme on répète un geste, mais comme on entre à nouveau dans un fleuve dont le courant a tout emporté. Ils ramassent ce qui traîne, redressent ce qui vacille, s’accordent aux rythmes du vent et aux failles du sol. Leur chapiteau renaît d’un entrelacement de planches et de cordages, leurs mains réassemblent la pierre, sans plan et sans modèle, avec cette spontanéité qui précède l’idée même de construire. Chaque pierre posée, chaque poutre levée n’a d’autre nécessité que celle du moment. Rien ne pèse encore du poids de l’intention, rien ne fige l’élan en structure. Ils ne cherchent pas à nommer ce qu’ils font, ni à lui assigner un sens. L’ouvrage grandit à mesure qu’ils le parcourent, indifférent à sa propre finalité. Ce qu’ils construisent n’a ni origine ni destination ; il est seulement ce qui doit être fait, ici et maintenant. Le vent balaiera encore, la lave coulera peut-être, la mer, inlassable, rongera les contours. Mais cela n’a aucune importance. Demain, si tout s’effondre, ils recommenceront. Non pas par obstination, ni par espoir de durer, mais parce que c’est ainsi qu’ils avancent, en remettant chaque jour le monde à neuf... sans qu'ils le sachent vraiment...

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