samedi 5 mai 2018

En éveil

 
"La plus grande des vertus pourrait être de ne pas cesser de cerner un mystère, le mystère du monde. Cela se dit:
« Il arrive un jour, dans toutes les histoires, où il est de nécessité impérieuse que les mystères s’éclaircissent»,
mais à cela s'ajoute aussitôt, venu d'on ne sait où:
« Percer un mystère n’est pas le supprimer en tant que mystère.»
Au contraire, peut-on penser, en approfondissant un mystère on intensifie son caractère mystérieux."



Vous avez raison, mais la difficulté n'est pas là.
– Où est-elle alors?

Elle est dans le fait d'être capable de maintenir l'attention en éveil de telle manière qu'ils puissent capter le fugitif instant où elles se présentent.
– Vous m'étonnez, chacun sait qu'il en existe des quantité innombrables.

C'est précisément là que réside le problème. La plupart de celles qui se présentent ne sont pas de vraies idées... Elles en ont la forme... mais dans la forme il n'y a rien. C'est pourquoi les Émissaires ne font pas confiance à ce qu'ils voient.
– Et à quoi font-ils confiance?

Faire confiance n'est pas vraiment juste. Ils écoutent. C'est avec leurs oreilles qu'ils observent, si je puis dire cela ainsi. Les Émissaires sont choisis pour des raisons très particulières. Il ne s'agit pas de capacités qu'ils puissent acquérir. On les a ou on ne les a pas.
– Est-ce que ces particularités ont un rapport avec leurs oreilles?

Vous brûlez... Ils ont effectivement tous de grandes oreilles, mais cela ne suffit pas.
– Il faut qu'ils sachent les orienter.
 

– C'est cela aussi, mais cela s'apprend sans difficulté. Non, il faut aussi que leurs oreilles soient décollées et que l'une des deux soit placée plus haute que l'autre.
– Ce n'est pas un cadeau...



Ce petit texte est une adaptation de:
Trois approches philosophiques de la musique
la phénoménologie, le pythagorisme et la philosophie du langage

Jean-Claude Piguet Professeur à l’Université de Lausanne

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