mardi 13 octobre 2015

13 octobre (61) Question de sable

Épisode 61


Cher Joachim
En relisant notre correspondance, il m'a semblé, avec une certaine évidence tout de même, que je ne mettais pas assez l'accent sur la vie présente. Il se pourrait que si, par le plus grand des hasards, quelqu'un avait la possibilité de lire le contenu de ces lettres, il pourrait penser que nous vivons  dans une sorte de nostalgie un peu désuète et désincarnée. Il se tromperait lourdement... Comment pourrait-il se douter que le moindre vol d'un oiseau au-dessus de ma tête a plus d'importance pour moi que la masse d'archives que nous avons, vous et moi, rédigé du temps, non pas de notre splendeur, mais du temps de la splendeur du mouvement que nous avions initié... enfin... que nous croyions avoir initié... et qui, je le crois et le crains, a du, bien après notre départ, s’effondrer comme un château de sable...



Lancinante
 – C'est justement de ce sable que j'aimerais que vous m'entreteniez...Don Penúl
 – Il porte la mémoire de ce qui fut autrefois.
Lancinante
 – Serait-ce de nous que vous parlez comme si nous n'étions plus?
Don Penúl
 – Je ne vous parle pas seulement de nous, je vous parle aussi du monde et de son infini qui vous porte. D'ailleurs, chère Lancinante, je ne vous comprends pas. Vous ne répondez pas entièrement à mes questions. Sans cesse une autre question naît de mes réponses. Ainsi nous parlions du sable sur lequel nous sommes assis loin de tout et subitement vous me parlez comme si ce tout était là sous notre cul et qu'en plus vous me suggérez que nous appartiendrions au passé. Dois-je entendre par là que nous ne sommes plus?
Lancinante

– Don Penúl, vous manquez d'ordre et de rigueur. Tout à l'heure vous me parliez d'une voix "descendue du ciel" que vous auriez entendue et puis subitement vous vous êtes interrompu. Maintenant qu'un peu de notre fatigue a disparu, voulez-vous reprendre votre récit?

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