mercredi 26 juillet 2017

L'Abysse (2)






Platon se souvient des histoires qu'on lui a raconté et qui ont bercé son enfance. Il se souvient surtout de celle de "L'Abysse". Du fait d'avoir déjà beaucoup vécu en peu de temps, "L'Abysse", bateau de construction récente, ressemble déjà à ces bateaux qui traîne le long des quais, abandonnés, presqu'en ruine et dont on voit qu'ils sont des rescapés de discrets, voir invisibles, naufrages.




Qui peut savoir ce qui se cache derrière les rochers polis
par les vagues se jetant furieusement à l'assaut de la jetée?


De fait, ces bateaux sont gardés par des hommes en armes. Certes ce sont des armes de pacotille et tout le monde fait semblant, mais tout de même... La mission des surveillants est de faire en sorte que le silence règne pour que puissent s'accomplir les vœux de chacun et surtout pour que le travail puisse se faire bien à l'abri des regards... Justement tout est affaire de regards... et d'entendements...
Le surveillant a les yeux et les oreilles grandes ouvertes pour le ciel mal peint du plafond. Plafond où avait pris place un pauvre ciel. Il s'en échappait, quand il ne pleuvait pas, quelques poussières qui tombaient, scintillaient et scintillent encore dans l’eau frissonnante.


Dans un verre à moitié ou deux fois trop grand, le premier de ces surveillants voit l’image et sa voix se casser. D’un lent et long mouvement il fait tournoyer le liquide et dans la vague qui se forme voit la tempête arriver. Il accorde la parole et dans le temps se dissolvent les cycles et les pensées. Chacun, en son grade et qualités, gravit les marches une à une, salue ce qu’il va détruire, dit l’introït d’abord, le prêche ensuite. Il est entraîné par le rythme de sa propre voix qui le porte. Quand il a dit, il rend la parole et reprend son chemin. Chaque voix dans la balance se pose et tout est compté. Au fil du droit et en l’absence de toute beauté, le poids du nombre, puissance passagère, l’emporte.


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