mercredi 27 mai 2020

(27) Sans s’inquiéter






Avec effarement, l'enfant Lune voit Pinocchio, l'Autre, littéralement se décomposer à mesure qu'il raconte. On eut dit que le fait de dire défaisait les liens entre les choses de son récit en même temps que les parties de lui-même... Sans s’inquiéter de son effacement progressif il poursuit.

– Tout comme moi certains mots étranges se dispersent dans le bois mort. Gisante forêt grandissante en laquelle tout se reconstruit. Ils révèlent une vérité inattendue liée aux images et aux créatures de l'obscurité. Secrètement, lorsque le temps d’une lune est épuisé, les arbres se connectent et collectent des volcans. Lentement la sève monte. L'arbre se transforme et, de temps à autre, fleurit. Des fleurs comme des oreilles ou des tisons. L’arbre est à l’écoute, il se donne à voir, pendant qu’en son intime son écorce craquelle et puis se fend. Percé de toutes parts, l’arbre s’étend et vers le ciel se penche. De temps à autre, s’arrachant à leurs maux, certains rameaux s'allument et disparaissent. Cette nuit-là, sans se faire voir, un arbre voisin a pris la fuite. Déraciné sans bruit, il a sauté dans les nuages. Mots étranges. Très loin, on entend un son. Pour certains c’est comme un craquement et pour d’autres comme une longue plainte. À peine vous comprenez sa signification… elle disparaît. En secret l’arbre poursuit sa mue. 

Aucun commentaire: