samedi 7 octobre 2023

Lecteur

 


La littérature (…) travaille dans les interstices de la science: elle est toujours en retard ou en avance sur elle (…), ne dit pas qu’elle sait quelque chose, mais qu’elle sait de quelque chose; ou mieux: qu’elle en sait quelque chose – qu’elle en sait long sur les hommes.
Parce qu’elle met en scène le langage, au lieu de simplement l’utiliser, elle engrène le savoir dans le rouage de la réflexivité infinie…

Roland Barthes, Leçons





– Pourtant si je considère ce qu'il nous arrive de répéter, il est continuellement, ardemment même, poursuivi par ce qu'il appelle  parole poétique...

– .... par ce qu'il appelle  parole poétique?
– C'est-à-dire évocatrice, la seule à même d’épouser au plus près le sujet dans son authentique singularité  réfléchir au double sens de certains mots... de certaines expressions.
– Mais alors, qu'en est-il de notre vécu personnel et subjectif?
– Nous ne serions que cela si, au-delà de toute contrainte, n'émergeait, paradoxalement, quelque chose comme un arché.
– Ce n'est pas possible...
– Pourquoi cela?
– Parce que l'arché est un début...
 – Et alors?
– Un début n'émerge point au milieu d'une histoire!
– Et pourquoi pas? Je crois que c'est précisément ce que notre maître voudrait faire émerger... perdant sa boussole intérieure quelque chose de mystérieux, fertile d'inconnu... rempli de liens tissés à travers le temps et de débuts à foison, pouvant émerger à l'improviste par le simple fait des entrecroisements, des imbrications ou des entrechoquements... issus de la quête paradoxale de l’auteur se défaisant, mais en même temps se reconstituant à travers les métaphores (transport) de l'écriture et le dessin... devient une présence…
– N'a-t'il pas peur de se perdre?
– Au contraire, c'est ce qu'il désire...
– Au hasard des mots et des images?
– Et surtout de l'interprétation qui peut en être faite...
– Son interprétation?
– Non, surtout l'interprétation du lecteur... lecteur qu'il est... lui aussi...
 

 

 

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