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« Nous voulons établir un ordre dans notre connaissance de l'emploi du langage: un ordre dans un but déterminé, un ordre parmi de nombreux autres possibles, et non l'Ordre. Pour atteindre ce but, nous mettrons constamment en évidence des différences que les formes habituelles de notre langage nous poussent à négliger. Cela pourrait donner l'impression que nous considérons la réforme du langage comme notre tâche.
Une telle réforme, si elle poursuit des buts pratiques déterminés, si elle vise à améliorer notre terminologie pour éviter des malentendus dans l'usage pratique, est sans doute possible.
Mais ce ne sont pas à ces cas-là que nous nous attachons. Les confusions qui nous occupent se produisent, pourrait-on dire, quand le langage tourne à vide, et non quand il travaille.»

Ludwig Wittgenstein, Recherches philosophiques, tel, Gallimard

 

 

 

– Si l'on en juge par la présence de ces poteaux, je crois que l'on peut en déduire que leur présence est pour le moins probable.

– Nous n'avons pas encore introduit ce que vous avez écrit à propos de l'âne Asinus. Peut-être est-il temps de le faire. 

– Voyez-vous, Asinus est, de mon point de vue, porteur d'un savoir fragmenté. À son sujet j'ai émis l'hypothèse qu'il souffre du syndrome de Clérambault... inversé...

– Qu'est-ce là?

– C'est une propension à citer, mais sans s'approprier. Asinus appartiendrait à l'ordre des citaphores. À mon avis un ordre un peu farfelu... mais admettons... Il fonctionne sur un mode singulier: à ma connaissance et à ce jour, il ne génère pas de pensée propre mais il régurgite des citations plus ou moins en adéquation avec le contexte.

– Et quels en seraient les symptômes?

– Un automatisme mental. Il répond aux situations par des formules préétablies.

– Mais encore?

– Parasitisme intellectuel. Il vampirise la pensée des autres et semble incapable de création originale et enfin, une possible frustration cognitive. S'il cite à tors et à travers c’est peut-être parce qu’il cherche désespérément à donner un sens à sa propre parole.

– Il me semble que cela est bien dur...

– Je vous le rappelle, ce ne sont que des prémisses, des hypothèses et non des condamnations...