« Dans L'interprétation des rêves, en 1900, ces phénomènes d'altérations, de métamorphoses et d'inactualités auront été observés à longueur de pages. La scène de rêve, écrit Freud à un moment, «est en mesure de passer souverainement outre aux distances dans le temps et l'espace». Elle est aussi «libre de droits de douane» qu'elle est inactuelle au regard de la chronologie. Le rêve est donc un anachronisme, dit Freud: «indépendant du cours du temps», et cela parce qu'il sait remonter, déplacer ou condenser les morceaux d'histoires, par exemple en « comprimant en un très court laps de temps beaucoup plus de Le temps est donc bien là: mais comme cristal, comme nœud, comme brèche, comme tourbillon, comme feu d'artifice, que sais-je encore — comme image en tout cas. Il défie les ordres chronologiques de la succession, et c'est à ce titre qu'il est à penser comme un temps inactuel. Le «rapprochement dans le temps», par exemple, devient ici «corrélation dans les choses» que remonte, au sens du photomontage surréaliste ou politique, la scène de rêve. Ou bien «la succession dans le temps peut être inversée», bouleversant du coup toutes les relations causales et instaurant l'étrangeté anachronique d'un «il y aura une fois» ou bien d'une «épiphanie de l'après-demain».»
Georges Didi-Huberman, Imaginer recommencer, Les éditions de minuit, p.63-64
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