Cher Joachim
Ne soyez pas trop surpris par le fait que je vous envoie encore une lettre par la voie dont vous disais pourtant hier encore qu'elle n'était plus sûre. Le fait est que je n'en suis plus du tout certain et que je vous dois de vous communiquer ce qui est, je le crois, de la plus haute importance. Je ne voyage plus la nuit et comme vous pouvez l'imaginer cela me manque. J'étais, et je suis encore, sur la place des Ensablés, mais alors qu'hier j'étais persuadé que je l'étais à titre de prévenu, je sais aujourd'hui, de façon certaine que ce n'est qu'à titre de témoin que je suis ici. Je vous avoue que je m'en sens infiniment mieux et c'est avec le sourire que je vais reprendre ce que j'ai dû trop longuement interrompre ces derniers temps. Attablé au bureau rouge où chacun est invité à donner ses impressions par écrit avant de paraître devant le "Conseil", je vis venir à moi deux gardiens. Je ne sais pourquoi, alors même que la base même de notre éducation est notre infinie capacité au silence, qu'au moment même où je les vis se diriger vers moi j'ouvris grand la bouche et ce qui se déversa à mon insu je ne le reconnaissais pas du tout. Sous l'œil impassible des gardiens une étrange mélopée aux accent bizarres sortaient assez mélodieusement sans que je n'eus pour cela aucun effort à produire. Inutile de vous dire que je n'y comprenais rien du tout. Cela ne ressemblait en rien à ce que je vous ai déjà conté à propos du mélange entre pensées et paroles qui leur fit penser qu'il m'arrivait, à moi aussi, de "parler en langues".
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