lundi 14 octobre 2024

 

« Où maintenant? Quand maintenant? Qui maintenant ? Sans me le demander. Dire je. Sans le penser. Appeler ça des questions, des hypothèses. Aller de l'avant, appeler ça aller, appeler ça de l'avant.
Se peut-il qu'un jour, premier pas va, j'y sois simplement resté, où, au lieu de sortir, selon une vieille habitude, passer jour et nuit aussi loin que possible de chez moi, ce n'était pas loin. Cela a pu commencer ainsi. Je ne me poserai plus de question. On croit seulement se reposer, afin de mieux agir par la suite, ou sans arrière-pensée, et voilà qu'en très peu de temps on est dans l'impossibilité de plus jamais rien faire. Peu importe comment cela s'est produit. Cela, dire cela, sans savoir quoi. Peut-être n'ai-je fait qu'entériner un vieil état de fait. Mais je n'ai rien fait. J'ai l'air de parler, ce n'est pas moi, de moi, ce n'est pas de moi. Ces quelques généralisations pour commencer. Comment taire, comment vais-je taire, que dois-je faire, dans la situation ou je suis, comment procéder? Par pure aporie ou bien par affirmations et négations infirmées au fur et à mesure, ou tôt ou tard. Cela d'une façon générale. Il doit y avoir d'autres biais. Sinon ce serait à désespérer de tout. Mais c'est à désespérer de tout. À remarquer, avant d'aller plus loin, de l'avant, que je dis aporie sans savoir ce que ça veut dire. Peut-on être éphectique autrement qu'à son insu ? Je ne sais pas. Les oui et non, c'est autre chose, ils me reviendront à mesure que je progresserai, et la façon de chier dessus, tôt ou tard, comme un oiseau, sans en oublier un seul. On dit ça. Le fait semble être, si dans la situation où je suis on peut parler de faits, non seulement que je vais avoir à parler de choses dont je ne peux parler, mais encore, ce qui est encore plus intéressant, que je, ce qui est encore plus intéressant, que je, je ne sais plus, ça ne fait rien. Cependant je suis obligé de parler. Je ne me tairai jamais.»

Mircea Cartarescu, Solénoïde, Points
 



C’était il y a fort longtemps, mais cela est sans importance… cette nuit-là je fis un rêve inquiétant… Je marchais en plein ciel… Lorsque je me réveillais, tout avait changé. Il me semblait que j'avais grandi et que le monde s'éloignait. Le vent des sommets fouettait mon visage. Tout en bas, l'eau, nimbée de lumière, dansait. Je mis longtemps avant de commencer à comprendre. Au début, ce fut extrêmement difficile de discerner le moindre détail ou le plus petit repère de ce que je voyais comme un nouveau monde. C’était, au sens strict, épouvantable. Rien n'était stable. Je tanguais constamment. La lumière dansante me rendait malade. Le peu que je voyais était trouble. J'avais le mal de mer.





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