lundi 26 février 2018

Le fonds n'a qu'à suivre


" Il s'étonna du son de sa propre voix, assuré et affirmatif– comme lorsqu'il disait  la messe, autrefois. Il n'avait pas oublié l'astuce. Briser le silence sans nécessairement se servir de mots dotés d'une signification. Créer une émotion, quelque chose de si vague et insaisissable que, au lieu d'un individu singulier, il fallait une foule entière pour soutenir l'inconsistance. La fameuse religio– un lien entre les hommes face au gouffre de l'absurde. Et toujours quelqu'un, un joueur de flûte magique, un gardien des formules, pour mener les danses."

Le peuple de bois, Emanuele Trevi, Actes Sud




Pinocchio le sent bien. Il y a, portés sur lui, des regards invisibles qui lui pèsent. Il entend les pensées qui accompagnent les regards:


– Je suis le gardien, non pas celui des formules et surtout pas celui des mots secrets, mais celui de la forme. Rien n'est plus important que la forme. Le fonds n'a qu'à suivre...

C'est ainsi que, contrairement à ce que pense le Surveillant*, Pinocchio entend d'abord ce qu'il va voir.


Fernand le Surveillant ressemble énormément à l'inspecteur Machin, tout droit sorti du film Ma Loute de Bruno Dumont, qui lui semble être sorti tout droit d'un album de Tintin, tant il ressemble à Dupont qu'il ne faut point confondre avec Dupond. Mais, étrangement, notre Surveillant ressemble plus encore à..., pas seulement parce qu'il porte le même prénom: Fernand, pure coïncidence, mais parce que les circonvolutions de son cerveau font que les circonlocutions de son langage ont aussi une ressemblance frappante avec le côté dansant de sa démarche. On est happé par le mouvement. On s'attend à tous moments à une chute qui ne vient jamais au moment où l'on devrait s'y attendre jusqu'à ce que tout retombe à plat.

– À plat, c'est le mot... dit Fernand qui, par pur hasard, a tout entendu...  

Comme chacun peut l'imaginer, Fernand ne passe pas les plats, il les attire à lui et met toute son intelligence à faire disparaître ce qui en gâche les formes tout en les analysant dans les moindres détails pour ensuite les rendre plus propre que jamais pendant que lui, en toute innocence, digère "noblement"– c'est-dire dans une une sorte de somnolence qui le rend presque somnambule. Scènes quasi obscènes que nous ne relaterons pas... C'est ainsi que Fernand le Surveillant aiguise son appétit, comme il dit.


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