samedi 1 décembre 2018

(1) Par l’œil ou...


 « L'idée du destin devait naître une des premières chez les peuples anciens, à la vue de cette nature dont ils subissaient la tyrannie sans avoir pu la soumettre elle-même, par la science, aux lois de la pensée. Dans leur ignorance des règles particulières qui relient entre eux les phénomènes, ils se contentaient de placer à l'origine des choses une force unique et universelle.»

Alfred Fouillée, La liberté et le déterminisme, 1872


Quatre-cents-septième rapport de Don Carotte
Extrait du Grand Cahier Bleu


Quand, par l’œil ou l'oreille, je repense à certains événements du passé, dans l’immédiat il me semble toujours qu’une part importante s’est échappée et je me retrouve très vite avec les mains vides... Ce n’est que plus tard que je me rend  compte de l’échec et de la vanité de toute tentative de résumer parfaitement, en quelques mots, la plus banale des actions ou d’une histoire. Cela pourrait venir du fait que les mots ne disent rien par eux-mêmes mais servent en groupe à en susciter d’autres ou, mieux encore, à réveiller des sensations qui y sont liées. Ce seraient alors ces sensations, reliées aux mots par hasard, et non les mots porteurs, qui mettraient en route les moteurs provisoires de l’histoire qui se raconte. Provisoire car bientôt il peut arriver qu’elles soient relayées par d’autres sensations suscitées chez le lecteur, qui sont de nature parfaitement indépendantes de celles de celui qui écrit et qui, malgré tout, peuvent être concomitantes... Il s’ensuit que l’histoire, loin d’être écrite à l’avance, peut être protéiforme, pour peu que le lecteur ne soit fait prisonnier...

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