mardi 5 septembre 2017

Platon Perroquet, philosophe


"Je le disais bien, s'écria-t'il, pas plus d'arpenteur que sur ma main, un vulgaire vagabond qui raconte des histoires, et pis encore probablement."*




Pendant que Platon l'Ancien découvre les alentours d'une tour en qui, nous l'avons vu il n'a aucune confiance et qui lui apparait de plus en plus grande et lointaine, bien loin de là, Auguste Perroquet a brusquement changé de nom. Il s'appelle, le verbe pronominal prend ici tout son sens, Platon Perroquet, philosophe "plus ou moins autant qu'autres choses, titres, grades ou convenances".

 
Il converse, discourt, fait une espèce de très longue et intense confidence à Justin le Perroquet, fort surpris et décontenancé par le ton de Platon auquel il n'avait jusque là guère été habitué. Lui-même se surprend à répondre avec si peu d'à-propos qu'une sorte de crainte s'est emparé de lui: il sent bien qu'il n'est pas à la hauteur, du moins est-ce son sentiment. L'absence de son maître, à lui, n'a d'égale que la présence manifeste du maître de Platon dans son discours, ses mots, plus que cela, dans l'esprit même de ses dires.

– Eh bien, mon cher Justin, vous progressez. Pour la plupart, le gens dont parlons ne sont point des Narcisses comme je l'ai entendu de nombreuses fois à mon propos. Je dois ajouter que c'est même extrêmement blessant pour eux, comme pour moi. Voyez-vous, le moment arrive souvent au point où elles ne s'aiment point elle-mêmes. Il arrive aussi qu'elles soufrent du syndrome de l'imposteur.
Justin Perroquet se doit de sortir de son silence et ne trouve rien de mieux à dire:
– Du vide peut surgir n'importe quoi... Expliquez-moi cela.

La question est bien loin d'être innocente. Le piège qu'elle contient n'est pas des plus invisibles.


* Franz Kafka, Le château, folio 


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