« La curiosité est typiquement un mot qui engendre un vieux malentendu. Il est grand temps d’en finir avec un préjugé ancien, conforté par toutes les religions, tous les puritanismes et tant de mythologies. Il faudrait ne pas ouvrir la boîte de Pandore, ne pas croquer la pomme? Mieux vaudrait rester enfermé dans une candide ignorance, dans le cocon de nos habitudes mentales, dans nos réflexes conditionnés?
La curiosité telle que je l’entend, c’est une vitalité intellectuelle et sensible, un sixième sens, une ouverture au monde et aux autres. Une empathie, ou un soin, conformément à l’étymologie du mot latin cura (littéralement "prendre soin").Ce n’est pas seulement une faculté cognitive, mais un sentiment existentiel et un remède à l’indifférence. De cette libido sciendi (désir de savoir) et donc du péché originel, Saint Augustin se défia. Il influença toute une lignée de penseurs, y compris des esprits libres comme Erasme et Montaigne. Bien sûr, on peut craindre une curiosité mauvaise -l’intrusion dans la vie d’autrui, l’indiscret, le goût malsain pour les spectacles obscènes. Mais il est aussi digne de s'intéresser à la vie des autres.»
Jean-Pierre Martin
– Où va l’être qui s’absente de la réalité?
– Encore faudrait-il qu’il en soit capable?
– Qu’est-ce que cela veut dire?
– Tout dépend de la définition que vous donnez à la réalité...
– Alors, selon vous, l’être qui rêve y resterait malgré tout ce que l’on peut dire de cette réalité?
– C’est cela.
– Alors, toujours selon vous, le rêve fait partie de la réalité ?
– Bien entendu. C’est même une évidence...
– Et cet être avec lequel vous dialoguez... que vous avez inventé... serait aussi réel ?
– Pas de doute à cela!
– C’est curieux tout de même...
– Pas plus que beaucoup, beaucoup d’autres choses dont personne ne doute jamais...
– Par exemple ?
– Le haut et le bas...
– Qu’ont-ils de si spécial ?
– Ce sont des notions très spéciales
– En quoi le sont-elles?
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