dimanche 5 mars 2017

Écriture


Platon, sans réfléchir, pour le moment, attribue cette question à Damon, c'est ce que, faute de mieux ou par paresse, suppose Platon, demande:
– Êtes-vous obligé d'écrire...

Ce qui est pour le moins une question hasardeuse et peu compréhensible, je parle de l'attribution de l'acte d'écrire, non de la question sans la ponctuation... ou du moins celle qui est attendue. Il faut se souvenir, l'image est là pour cela, des conditions dans lesquelles la question est posée. Cela fait, il devrait être évident que d'écriture, il n'y a pas... pour eux...


Dans une discussion normale, et pour cause, personne ne voit le point d'interrogation. Ce qui fait qu'une question soit posée et ressentie comme telle, c'est l'intonation. Elle s'entend. L'intonation est un mouvement avec lequel chacun joue comme d'un instrument de musique. Les gammes de ses expressions sont presque infinies. Elle peut être aussi infiniment subtile, presque inaudible et pourtant sans cet intonation rien ne serait dit... ou alors dit de manière unilatérale, sans que l'appel ait lieu.

– Êtes-vous obligé d'écrire...

L'intonation de cette phrase portée par une voix qu'il attribuait à Damon posait un petit problème. Non que ce problème empêcha Platon de penser. Non, au contraire, cela l'obligeait à réfléchir. Ainsi à la question initiale s'était ajouté toute une série d'autres questions, venues d'elles-même, qui n'en dépendait pas directement. C'était une sorte de merveille. Merveille parce que ces questions:
À qui appartient cette voix qu'il entend? et toutes les autres, personne ne sait d'où elles viennent, d'où elles sortent, comment et pourquoi elles se sont formées...

– Comment entend-il cette voix? Par quel chemin tortueux de son corps cette chose que l'on nomme parole a-t-'elle accès à cette partie de son cerveau qu'il ne connait pas, et que cela produise une chose qu'il considère comme banale: une question s'est posée là et elle suscite, elle met en route un processus qui dans le meilleur des cas donne une réponse.
Platon, nous l'avons dit, accorde* cette voix à Damon qui s'est habitué à cela. Chaque fois que Platon lui adresse la parole, il réagit, le plus souvent par un regard. C'est de cette réaction que Platon s'occupe. L'air de rien, il interprète ce que le chien, qui n'est pas un chien, mais un daemon, interprète avant lui. Il y a quelque  chose qui s'est installé entre eux qui est de l'ordre de la relation, mais est-ce du langage? 


* accorde, encore une chose qu'il faudrait approfondir... comment les voix s'accordent-t'elles?

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