Pour comprendre ce qui va suivre, et auquel la scène classique et absurde que nous venons de raconter dans un précédent message, eut pu servir d’introduction, quelques mots d’explication, encore sont nécessaires, qui malheureusement ne peuvent être qu'insuffisants. La raison pourtant en est simple, ce qui va suivre, action ou récit, ou peut-être les deux, ne peuvent être prédits. C'est là leurs véritables natures et la preuve même qu'ils sont vivants.
– Dites-moi, cher Platon, entre deux oscillations, seriez-vous devenu fou?
– Je ne crois pas qu'il y ait assez de temps entre deux oscillations pour devenir fou... c'est un long processus qui demande beaucoup d'adaptations successives, une sorte de continuité qui contiendrait, malgré les apparences, les fêlures et les ruptures, une sorte de logique...
– C'est inévitable...
– Difficile de prétendre cela...
D'une certaine façon, il se pourrait bien que Damon en sache plus long sur Platon ou sur les nuages, que lui-même.
– Si nous en restons aux certitudes, il est clair que rien de ce qui va arriver ne peut être autre dès le moment où l'on dit qu'elles vont vont arriver et si, à ce moment, nous nous en allons, rien de ce qui arrive ne portera la marque ou la moindres trace réelle de notre passage. Et cette histoire restera pétrifiée sur la page avec cet air doublement immobile qu’ont les choses immobiles quand elles veulent bouger sans la permission de qui les regardent.
* Les Fils de la Vierge, Julio Cortázar
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