jeudi 8 août 2024

Souffle

 
« Pour la clarté du propos, il importe de définir le terme de “fiction» tel que nous l'utilisons ici: le terme latin de fictio est emprunté à la rhétorique par Jean de Garlande pour désigner les figures de la représentation comme la prosopopée, mais, à cause de la réflexion des philosophes et des théologiens sur les res fictae, la notion de fiction devient à la Renaissance un concept métaphysique qui s'exprime d'abord en français par le verbe feindre, ou par l'adjectif feint. Le substantif “fiction” commence toutefois à traduire ce qu'Horace appelle les res fictae dans l'Art Poétique: chez son traducteur Jacques Peletier du Mans, la notion de fiction représente le résultat du mélange de choses vraies et fausses que le poète s'autorise. Dans le domaine littéraire, nous considérons comme “fiction” l'ensemble des genres recouverts par ce qu'on appelait alors “histoire” feinte, les genres dramatiques comme les “fictions poétiques” (inventions mythologiques que la poésie lyrique pouvait utiliser). Ainsi le roman, la nouvelle (même quand elle prétend s'inspirer d'un fait réel), l'épopée et le théâtre en relèvent, car ils s'opposent d'une part au mode d'énonciation lyrique, d'autre part au vrai de l'histoire attestée ou du traité. Le processus de fiction qui sous-tend ces genres correspond à celui de la mimésis aristotélicienne, en relation avec la puissance de représentation innée que possède l'esprit humain. Il est à l'origine de ces genres littéraires, mais ce feindre, pour les philosophes insensibles au plaisir de la fiction, n'est ni une proposition valide, ni un objet de la réalité, et se révèle donc potentiellement dangereux.»

Marie-Luce Demonet, La censure de la fiction et ses fondements philosophiques 





Depuis longtemps les vents se sont levés. Ils tournent sans cesse et emportent la moindre trace d’un hypothétique chemin. Les marins fictifs aux mains calleuses rament et s’essoufflent. Le souffle sera plus court encore et la sensation de vertige toujours plus fortes dans les hautes altitudes où ils semblent vouloir s’aventurer… Ils vont devoir choisir: trouver en eux une foi et des ressources jusqu'ici invisibles pour réécrire leur destin, ou quitter leurs jeux tristement, avec le sentiment de ne jamais les avoir réellement commencés. Pour ceux qui vivent probablement leur dernière aventure 
 
 


 

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