mercredi 18 octobre 2017

Une ombre blanche


"Nos destins nous mènent, et la première heure de notre naissance a réglé tout le temps qui nous reste à vivre. Une cause dépend d’une autre cause ; un ordre de choses éternel détermine la vie privée et la vie publique. C’est pourquoi il faut tout supporter avec courage; c’est que rien ne survient par hasard, comme nous le croyons; tout vient à son heure ; avant le temps a été décidé ce qui te réjouit ou te fait pleurer; et bien que la vie de chaque homme se colore en apparence de grandes variétés qui les distinguent, le tout se résume au même point: passagers, nous avons reçu des biens passagers. Pourquoi donc s’indigner ainsi ?"*


À la longue, rien ne résiste plus à cette subtile teinture de l'esprit qu'est la vraie modestie. Celle qui ne ne sait pas elle-même... et se moque continuellement de la notion de destin...








C'est la nuit. Le ciel menace... Un monde limité, à la fois vide, baroque et lointain. Pinocchio l'Autre, plus tout-à-fait enfant, se promène et rêve:
Une immense ombre blanche passe comme un fantôme et traverse toute l'étendue du ciel. Au cœur d'un orage, sous le voile blanc quelqu’un marche sur un pont mais n’avance pas. Il croise le regard d'une femme dont il ne sait rien. Beaucoup plus tard, il apprendra quel est son nom... Le souvenir de cette scène, à son tour, après bien d'autres,  disparait dans un temps très court, à peine quelques jours. Ce n'est qu'à l'âge des premiers émois qu'il a commencé de se souvenir de cette ombre blanche... dès lors elle lui paru indispensable, "parce que j'en avais pris l'habitude"... Chaque fois qu'il y pensait, il savait pouvoir s'appuyer contre elle, pure fantasme, mais dont la longévité contrastait si fort avec sa présence fugitive et sa réalité des plus douteuses. 



* Sénèque, De la providence



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