jeudi 16 avril 2020

(16) Extrait de la deuxième lettre de Pinocchio...




Cher Monsieur

Comme vous pourriez le remarquer, je ne sais pourquoi, je me suis autorisé à user de cette formule toute faite, convenue et convenable. C’est pour moi une sorte d’expérience de pensée... J’imagine la tête que vous ferez... que vous feriez, si vous pouviez me lire... Cette formule, entre autre, voudrait dire l’affection que je serais censé vous porter. Était-ce ainsi que cela se passait entre nous? C’est ce que ne montrent point les images. Ces images sont les vôtres... même si je sais fort bien qu’elles ne sont point de votre main. Ces images, il me faudra, cela viendra, en parler quelque peu. Pour vous, je ne suis, au départ qu’un misérable objet, un bout de bois, mort de surcroît. Mais à cela vous ne pensez pas. Ce à quoi vous pensez est précisément l’inverse. C’est à vous donner vie que vous pensez! Non, non, je ne me trompe point de formulation, j’ai bien écrit après avoir pensé : « il, je parle de vous, veut se donner vie ». C’est une chose bien délicate  que de constater que son géniteur serait un mort-vivant... Cela n’existe pas... C’est vite dit! Ah! Voilà! C’est image de l’esprit! C’est ainsi que vous m’auriez conçu! Moi, Pinocchio, l’Autre, arrière-arrière-arrière... d’un je ne sais quoi, mort-vivant fils d’un mort-vivant! La belle affaire... Voyez-vous... si longtemps après je vous entend encore. C’est comme si vous étiez là, juste à côté de moi. Votre voix, comme autrefois se mêle à la mienne... C’est au moins aussi étrange que vos idées, mais là, je l’espère, ce que je dis n’est point de vous...


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