vendredi 24 avril 2020

(24) C’est là


« En ce sens, on peut dire que l’image enveloppe un certain néant. Son objet n’est pas un simple portrait, il s’affirme: mais en s’affirmant il se détruit. Si vive, si touchante, si forte que soit une image, elle donne son objet comme n’étant pas.»

Jean-Paul Sartre, L'imaginaire, Gallimard 


Extrait d'une lettre de Pinocchio, l'Autre, à son créateur

Monsieur l'Écrivain

Il régnait dans ces profondeurs, malgré les embruns et la puanteur, une lumière qui semblait être produite par elles-mêmes…
Combien de temps pourrait durer ce voyage? Je ne le sais. Aujourd'hui encore, bien des années après, il me semble parfois y être encore... Ce voyage maudit que je fis à votre place, monsieur l’Écrivain, ce terrible voyage dont les souvenirs persistent à jamais dans les tréfonds de votre âme, monsieur l’Écrivain, voyage damné pendant lequel à chaque instant, si je perdais de vue ce que j’y venais chercher, je sentais la mort m'envelopper... Non seulement je le croyais mais il n’était pas nécessaire d’y croire, au moindre relâchement elle m'embrassait et je commençais de mourir... la mort était là, suintant par tous les pores de cette chair intérieure... Mon souffle se faisait brûlant, mon cœur s’affolait et brusquement s’arrêtait pendant que ma tête explosait... du moins j'en avais la sensation pendant que résonnaient les coups sourds  du cœur de la bête. Comme un automate je marchais... je cherchais du regard ce fil qu’un instant j’avais perdu. Et c’est là que j’ai su...





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