dimanche 26 avril 2020

(26) C'était vous




Monsieur l'Écrivain

Comme un automate vous écrivez, comme automate je marchais... cherchant du regard ce fil que pendant un instant j’avais perdu. Et c’est là que j’ai su... Entendant ces lourds battements qui me vrillaient le bois dur de mon crâne, j ’ai su. J'ai su que c’était vous. Votre cœur, monsieur l’Écrivain... le saviez-vous? Vous ne me croyez pas... C’est votre cœur qui était là explosant sur le champ de bataille, sur la mer déchaînée juste avant le naufrage. Et mon bras auquel était encore attachée, presque désarticulée, une main pendante et déjà fortement décoloré, était là flottant dans l’acide qui vous rongeait... Je ne sais comment, la corde qui y était attachée, ce lien qui me faisait votre prisonnier, était là posée sur le rivage. Je n’eus qu’à la saisir du bras et de la main qui me restait.  Pour plus de sûreté Je l’attachais à ma taille. Ainsi je commençais de la ramener vers moi. Le plus dur était à venir, monsieur, il fallait maintenant s’en retourner connaissant le terrible secret... Celui que que vous refuserez de croire déjà je le savais... monsieur l’écrivain derrière le paravent, la mer est d’encre et la barque n’est guère plus grande qu’un bec d’oiseau, le nid est vide comme vous, simulacre de papier, seigneur et maître de l’illusion, monsieur l’écrivain, en qui je vis depuis lors. J’ai toujours une main attachée et j’ai encore l’espoir de m’en sortir, c’est pourquoi je m’active et les mouvements que j’initie sont devenus les vôtres...

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