dimanche 12 novembre 2017

De mystérieux courants


" Les rayons des quatre étoiles saintes
ourlaient si bien de lumière son visage
que je le voyais comme face au soleil.
« Qui êtes-vous qui remontant le fleuve aveugle
avez fui la prison éternelle?»

Dante, La divine comédie

Pinocchio, l'Autre, est épuisé, après avoir repêché sans relâche des dizaines de petits corps disloqués que la mer charrie. Pour l'instant, il dort.
De mystérieux courants traversent la baie et puis semblent monter vers le ciel. Un instant il repense à ces derniers instants qu'il a vécu non loin de là, avec Nounours et Al.



Si l'on en croit Alias d'Alias, Al pour les intimes, grâce à ses bons soins, Nounours serait, grâce à lui, sur le chemin de l'humanisation. C'est lui qui nous le communique dans ses écrits qui seuls font référence. Il est intéressant de noter, toujours selon Al, que:

– "Nounours était passé par deux stades différents, non pas subitement comme je ne pouvais le constater alors, mais lentement, presque imperceptiblement. Je n'étais qu'un enfant et je ne savais pas à quel point j'étais perturbé. Je ne pensais tout simplement pas. Comme tous les enfant qui se réfugient dans les bras de «leurs Nounours», à leur insu, je lui avais donné statut de mère de substitution, et puis, le temps ayant passé, il était passé à celui, inversé, de fils. J'étais devenu père en manifestant à son égard, cette autorité terrorisante qui pesait sur moi."

Il la dévie et la déporte sur Nounours. Il refuse désormais de le considérer comme autre chose que sa créature et renforce l'image idéalisée de sa Maman en lui refusant toute représentation. Certes, tout cela n'est pas dit et ce pourrait être simple chimère, mais c'est précisément ce qui figure dans les cahiers d'Alias, lorsque le temps étant venu, bien des dizaines d'années plus tard, il écrira ces mots terribles:
– Comment en étais-je arrivé à cela?



Pinocchio, de son côté, voit ses mains arrachées et ne sait que faire. Plus que jamais, il se rend compte que son destin n'est pas et n'a jamais été entre ses mains... Pourra-t'il un jour comprendre ce qui mène ces enfants terrorisés à devenir des tyrans qui s'ignorent, caché derrière leur sourire?

– Au point où nous en sommes, il ne nous appartient pas de le dire. Ce que nous ne pouvons savoir par la raison serait-il accessible par le cœur? Ne serait-ce donc point chose plus facile, désirable et bonne que d'attendre ce qu'il aurait à nous dire?

Si vraiment  l'un remplaçait l'autre qu'aurions à attendre de cette raison que tantôt l'on place en haut, et subitement tout en bas lorsque le reproche nous vient à l'esprit.  Ce que nous avons à craindre en remplaçant l'un par l'autre, peu importe dans quel ordre, est bien plutôt celui de notre entreprise… Venons-en à ce point...

Aucun commentaire: