dimanche 24 décembre 2017

Depuis si longtemps


« Mais ses tentatives demeurèrent vaines. Mirko fixait d’un œil vide les caractères d’écriture qu’on lui avait déjà expliqués cent fois: son cerveau fonctionnant avec effort était impuissant à assimiler, même les notions les plus élémentaires. À quatorze ans, il s’aidait encore de ses doigts pour compter et quelques années après, il ne lisait encore un livre ou un journal qu’au prix des plus grands efforts. On n’eût pu dire cependant qu’il y mettait de la mauvaise volonté ou de l’entêtement. Il faisait avec docilité ce qu’on lui ordonnait, portait l’eau, fendait le bois, travaillait aux champs, nettoyait la cuisine: bref, il rendait consciencieusement, bien qu’avec une lenteur exaspérante, tous les services qu’on lui demandait. Mais ce qui chagrinait surtout le bon curé, c’était l’indifférence totale de son bizarre protégé. Il n’entreprenait rien de son propre chef, ne posait jamais une question, ne jouait pas avec les garçons de son âge et ne s’occupait jamais spontanément, si on ne lui demandait rien : sitôt sa besogne finie, on voyait Mirko s’asseoir quelque part dans la chambre, avec cet air absent et vague des moutons au pâturage, sans prendre le moindre intérêt à ce qui se passait autour de lui.»

Le joueur d'échec, Stefan Zweig



– Cher Nounours, cette histoire demanderait quelques explications que nous devrons pouvoir fournir avant tout, afin que l'on sache bien comment nous l'entendons et qu'il n'y ait à cet égard aucune équivoque.





– Vous savez fort bien, malgré toute l'estime que j'ai envers vous et vos progrès permanents, que ce n'est pas en notre pouvoir... pas pour le moment... mais regardez ce qui nous arrive!


– "Depuis si longtemps, dans un lointain de pierres élevées"...

On entend la propre voix de Pinocchio. Il la reconnait, réfléchit et se dit qu'il va prendre le relais:

–  Je la reconnais. C'est elle  que je recherche depuis si longtemps. Je sais fort bien la vanité de courir derrière le vent sans relâche, cette course, jours après nuits, n'amène que pauvres matins et mots après mots n'amènent que questions auxquelles il est si difficile de répondre.



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