mardi 22 août 2017

Le sujet est le maître



Bien du temps est passé depuis les uns et les autres étaient encore de petits enfants et jouaient avec une innocence qui devait tout à l'ignorance. À moins que cette ignorance fut la clé de tous les savoirs... Ce qui reste à démontrer...




" Cher Cap'tain,

Comme vous le savez, jusqu'à il y a peu de temps, je ne savais ni lire ni écrire. J'apprends cependant, et si mon apprentissage de la lecture ne fait certes que commencer, il se trouve que, emporté par un désir aussi subit qu'imprévisible, je me suis aussi mis à écrire. Peut-être suis-je présomptueux, mais si je dois travailler longuement et souvent corriger, je n'en éprouve pas plus de fierté que de difficulté. Certes il se peut que, de votre point de vue, je sois parfaitement inculte ou pour dire les choses avec plus de subtilité "que je ne correspond à rien de connu". Si je suis aujourd'hui capable d'écrire, ce n'est pas le résultat d'une méthode ou d'un système, c'est à mes lectures et à mon travail que je le dois. Je sais combien ces lectures sont encore présentes à mon esprit lorsque je rédige. En est-il aussi ainsi de vous? Je fais référence aux deux lettres que vous avez eu l'amabilité de me faire parvenir. Même si je sais que vous n'en êtes pas l'auteur et que je n'en étais point le destinataire principal, elles n'ont finalement, comme il se doit, pas été pour moi seul. Tout le monde les voit, tout le monde les entend, tout le monde les croit. Elles ne sont pas seulement estimées par les théologiens; elles sont encore agréables aux gens du monde, et intelligibles aux femmes mêmes.* Il faut simplement que je vous dise, par écrit à défaut de vous le dire en face –ce n'est que partie remise–, que malgré l'agréable bienveillance des mots, de la croyance, de l’intelligibilité des concepts et même de la foi qu'elles pourraient inspirer, quelque chose d'aussi minuscule qu'un grain de sable est ressenti et qui, loin d'être négligeable, entrave radicalement la possibilité d'une bonne marche du navire."

– Si le sujet est le maître, alors peut-être faudrait-il revisiter tout ce qui peut se dire du pouvoir...





[...] que le sujet soit une chose ou une personne qui prononcent les mots, ils sont prononcés...

– Concentrez-vous, cher Justin, et entendez la petite merveille qui va suivre!
– Je suis toute ouïe!
– Les sujets qui les prononcent deviennent leurs maîtres...
– Je n'y comprend rien...
– C'est pourtant simple. La manière dont se comporte le verbe dépend de son sujet...
– Oui, cela je l'ai appris...




– Eh bien, faites donc un petit pas supplémentaire, ouvrez les yeux et les oreilles: c'est du sujet que dépend le verbe! Ou si vous souhaitez que cela soit dit autrement: c'est le verbe qui s'accorde à son sujet! On pourrait aussi ajouter...

* Les Provinciales, Pascal

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