dimanche 23 juin 2019

(23) Bien des années...


« Le premier moyen pour bien connaître les sauvages est en quelque sorte de devenir l’un d’entre eux.»





Huit-cents-troisième rapport de Don Carotte
Extrait 

En repensant, bien des années plus tard, à certaines rencontres, on ne peut s'empêcher de penser à ce qui en furent l'origine. À tout cet incessant cheminement qui a amené à ces instant et à celui, particulier pour moi, où je feuillette en secret de mes personnages, instant si semblable à tous les autres, unique à chaque fois cependant, et qui, l'instant d'après va rejoindre tous les autres pour former ce que nous avons l'habitude, sans réfléchir, de considérer comme un tout... Je commençais à douter et à mettre en place un certain nombre de questionnements qui furent causes de ce cheminement et à ce que je croyais être la vérité. Je craignais alors ce qui m'avait amené exactement ici, là devant le rapport que j'avais rédigé il y a fort longtemps déjà, bien avant les événements dont il faudra que je parle encore, ne pouvait être en être la cause unique. Du moins c'est ce que je pensais alors. 




Pour rappel:

– Je ne suis point souffrant, loin s'en faut et l'on prend bien soin de moi, croyez le bien, mais dites-moi d'abord quel est ce compagnon que vous avez introduit et qui n'eut dû, pas plus que vous même apparaître ici sans voile ? Et puis il me semble aussi, puisque vous vous autorisez quelque remarque personnelle, que votre bosse, selon l'écho qui me parvient, grandirait sensiblement...

 – Je n'y puis rien mon Illustre Seigneur, je n'ai point introduit ce petit chien au demeurant fort curieux. Curieux, il l'est, mais aussi et surtout, il rend curieux. J'avoue que depuis qu'il est à mes côtés. je vois les choses sous un autre angle..., il me suit depuis que je suis entré à votre service, c'est-à-dire il y a fort longtemps... et pour répondre à votre question et sans vouloir vous manquer de respect, même si jusqu'alors vous ne l'ayez encore point vu,  personne n'a jamais vu un chien qui supporte le voile. Il ne l'a donc jamais porté. Ainsi la raison de son invisibilité n'est donc point une histoire de voile. Cependant, et cela m'étonne, il dit aussi vous connaître et même prétend que vous avez commerce avec lui.

– Comment est-il entré?

– Je ne le sais, mais si j'en juge selon son aisance il semble bien connaître les lieux. Quant à ma bosse elle se porte bien et je n'y ai remarqué aucun changement. 

– Une petite voix, mais très claire,  me chuchote à l'oreille de me méfier. Donnez-moi, je vous prie, quelques détails à propos de ces bouchées que vous me présentez et que vous aimeriez que je mange. Il faut que je vous dise qu'il me serait agréable que vous pensiez... non... que vous découvriez, que ne suis plus aussi candide que vous vous plaisez à penser. Peut-être faudrait-il que quelqu'un goûte à ces mets délicats que vous me préparez. Donnez-en une à votre compagnon!

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