samedi 20 janvier 2024

«Voir»

 
« Quel rapport existe t-il entre l'acte de « voir » et le fait d'être un témoin? «Voir» implique le sujet instinctivement, émotionnellement et intellectuellement. En cela « voir» ne consiste pas à être un simple témoin distant de l'objet perçu. Mais dans la mesure où «voir» c'est percevoir la réalité profonde, intelligible, telle qu'elle est, «voir» c'est être témoin de la vérité et partant de la Tradition. A présent quel rapport existe t-il entre l'acte de «voir» et l'acte de regarder?
Regarder peut être deux choses: examinons donc l'un après l'autre chacun de ces deux cas.
Regarder peut être d'abord regarder de manière neutre les phénomènes sensibles en s'en tenant aux informations sensorielles sans chercher à aller jusqu'à les comprendre: or cet acte se différencie du «voir» en ce que celui-ci est un acte intellectuel de l'intuition et non un acte des sens. Et ensuite regarder peut être regarder avec les yeux du désir en sélectionnant dans le spectacle sensible qu'on a sous les yeux ceux des phénomènes qui sont susceptibles de satisfaire nos désirs : or cet acte possède un point commun et une différence avec le «voir».
Le point commun est que le «voir» est lui aussi animé par un désir, mais ce désir vise à comprendre et non à se satisfaire. Quant à la différence, elle tient au fait que dans le regard animé par le désir de se satisfaire c'est le sujet qui sélectionne dans le spectacle sensible les seuls objets répondant à ses désirs subjectifs alors que dans le «voir» c'est l'inverse qui se produit: c'est le phénomène extérieur qui, en prenant l'initiative de me regarder, me sélectionne et fixe en retour ma perception sur lui, ce qui me permet finalement de prendre conscience de son niveau abstrait, objectif.»





 Dans la tête d'Ulysse, emplie d'un ciel nuageux, des vagues se brisent sur des falaises. Vu du ciel un cours d'eau serpente entre des collines rocheuses. Émergent d'une eau turquoise de longs rochers rougeâtres. Un volcan bouillonne de lave et de petit caillou rouges, étincelant par moments, sont projetés dans le ciel. Dans la tête d'Ulysse, miroir du monde qui l'entoure, émergent lentement tout un faisceau de signes qu'il ne comprend pas. Peu à peu ils composent une fresque abstraite qui ne cesse de se transformer et de coloniser son esprit...
– Se pourrait-il qu'ici je puisse entrevoir ce à quoi pouvait ressembler la terre primitive, bien avant que les hommes ne la soumettent? Se demande-t'il avec naïveté en essayant d'en tracer, d'en comprendre le contour avant que de plonger dans le vide des profondeurs.
Il est accompagné d'un âne à propos duquel il se demande:
– Que peut-il bien voir... ou comprendre que moi-même je ne peux pas...
 
 
 
 
 
 

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