dimanche 17 décembre 2023

Blasphème


 


– Croyez-vous que notre maître sait que nous parlons dans son dos?
– Dans l’absolu… il se peut...
– Mais alors il se pourrait...
– … Comme vous le pensez il se pourrait que nous disions ce qu'il a prévu de nous faire dire quand nous pensons le faire à son insu.
– Vouloir trop connaître pourrait vous procurer moult désagréments...
– Qu'insinuez-vous par là?
C'est une question assez ardue… Il n’est peut-être pas impossible d'aller au-delà de ce qui est notre monde... en tous cas de ce qui nous est connu.
– Je ne comprend pas pourquoi ce serait impossible. Il me semble que dans une certaine mesure nous sommes déjà allé au delà de notre monde puisque nous sommes et avons été en relation avec cet au-delà que vous prétendez être interdit.
– Comment cela?
– Le simple fait de parler avec notre maître le prouve... sans compter le fait que ce que nous disons… enfin… ce que nous répétons vient de l’au-delà ou d’un autre monde…
– Je crois que vous ne comprenez pas. Il y a une chose qui est incontestable ...
– Laquelle?
– Nous sommes ses créatures... sans lui nous n'existerions pas.
– Nonobstant le fait problématique de son existence… qu'en déduisez-vous?
– Que le chemin inverse, que vous le souhaitiez ou non, n'est pas possible...
– Je crois que vous vous trompez…
– Dans quel sens?
– Si nous ne pouvons pas accéder à son monde… lui, je ne l’ai jamais aperçu ici… et j’ai quelques doutes concernant son existence… Cependant, nous pourrions, sans mauvais esprit, aller plus loin encore...
– Il est réconfortant que chacun veuille faire preuve de sa valeur...  mais ne craignez-vous pas ce qu'en pourrait être le prix!
– Pourrions-nos faire avec lui ce qu'il 
a fait de nous?
– C'est blasphème que cela!
– Comme vous y allez!
– Je ne vais nulle part, c'est votre idée que de réfuter notre état. La question se pose de savoir pourquoi le fait de pouvoir, ou de savoir, dépasser cette limite, le fait de vouloir trop connaître, pourrait nous conduire à une condamnation?
– Parce que ce que vous envisagez est pour ainsi dire une trahison.
– Je parle de franchir une limite que nous n'avons point promis de ne pas dépasser. N'est-ce point la faute, sa faute, que de nous y avoir emmenés?
– C'est là précisément que s'annonce votre trahison! Ce n'est pas la limite qui importe… C'est cette trahison...
– Que je ne vois pas!
– C'est précisément ce qui aggrave votre cas.
– Pourquoi, dites-moi, pourrait-il explorer notre monde sans que nous puissions en faire de même?
– Parce qu'il est le créateur de notre monde.
– Se pourrait-il que nous puissions imaginer que nous puissions faire de même...
– Vous aggravez votre cas! Il n'est d'autre créateur que notre maître!
– Il me semble que cette deuxième condamnation, pour ainsi dire, la première pour, soi-disant une trahison, que réfute, et la deuxième, si je vous comprend bien, pour vouloir créer... en franchissant une limite que je ne reconnais pas comme étant intangible. 
– Nous sommes ses porte-paroles et en tant que tels nous nous devons de ne rien ajouter...
– Ce n'est point ce que vous me répétez depuis des lustres!

 

Aucun commentaire: